Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

15/06/2016

Le grand art de cette guerre est de ne paraître jamais défendre son terrain, et de ravager seulement celui de son ennemi, de l’accabler gaiement

... Belle tactique que nos politiciens de tous poils me semblent incapables de pratiquer tant ils sont obtus, tant ils se prennent au sérieux, tant ils sont rabâcheurs et sans imagination créatrice .

 Afficher l'image d'origine

 Carnaval permanent, grand Guignol à volonté ...

 

« A Ponce-Denis Ecouchard Le Brun, Secrétaire

des Commandements de Mgr le prince de Conti

au Temple

à Paris

11 juillet [1761]1

Il y a des choses bien bonnes et bien vraies dans les trois brochures que j’ai reçues 2. J’aurais peut-être voulu qu’on y marquât moins un intérêt personnel. Le grand art de cette guerre est de ne paraître jamais défendre son terrain, et de ravager seulement celui de son ennemi, de l’accabler gaiement ; mais après tout je ne suis pas fâché de voir relever des critiques très injustes d’une ode dont j’ai admiré les beautés, et à laquelle je dois non seulement mademoiselle Corneille, mais l’honneur de commenter à présent le grand homme auquel elle appartient.

Les oreilles d’âne sont attachées pour jamais au chef de ce malheureux Fréron. On a prouvé ses âneries, et il y a dans les trois brochures un grand mélange d’agréable et d’utile.

Je ne savais pas que ce Baculard fût un croupier de Fréron. J’ai eu soin autrefois de ce Baculard qu’on appelait d’Arnaud, comme j’ai soin de mademoiselle Corneille. J’ai été payé d’une ingratitude 3 dont je crois le cœur de mademoiselle Corneille incapable.

Adieu, monsieur ; je me flatte que le nom de monseigneur le prince de Conti décorera la liste de ceux qui souscrivent pour la gloire du grand Corneille et pour l’avantage de sa famille. Je serais toute ma vie pénétré d’estime et d’attachement pour vous.

V. »

1 Le manuscrit porte la mention : « M. Damilaville est venu pour avoir l'honneur de voir M. Le Brun et lui remettre cette lettre . »

 

Je prends beaucoup plus d'intérêt aux succès des frères, à la liberté de la littérature , à l'édition de l'Encyclopédie qu'à toutes ces misères

... qui me touchent sans me blesser gravement , ajoutè-je subito in petto .

 Afficher l'image d'origine

Nota bene : "Aux origines de la lutte pour la liberté d'expression"

 

 

« A Etienne-Noël Damilaville

11 juillet [1761]

Voici une lettre d'un Italien 1 homme de très grande considération qu'il sera bon, mes frères de faire imprimer dans tous les journaux . Je crois que Mme de Pompadour n'en sera pas fâchée .

Je ne sais pas encore si on a joué Oreste . J'en attends des nouvelles, redolet antiquitatem 2; mais il fait bien chaud, et les Français parum colunt antiquitatem 3.

Je reçois dans ce moment la lettre d'un cher frère dans laquelle il me parle du bon goût du sieur Bellecour 4. Je crois qu'il serait bon de joindre le titre du Droit du seigneur à celui de L’Écueil du sage 5; car les Bellecour et ejusdem farinae homines 6 ne savent pas qu'autrefois les seigneurs séculiers et prêtres avaient dans leur domaines le droit de cuissage , le droit de prélitation ; cette partie du sujet ignorée des comédiens perd de son piquant aux yeux de ceux qui n'en sont pas instruits .

On m'avait mandé qu'on jouait Oreste ; apparemment qu'il n'en est rien .

Je prends beaucoup plus d'intérêt aux succès des frères, à la liberté de la littérature , à l'édition de l'Encyclopédie qu'à toutes ces misères, et je ne suis attaché au Droit du seigneur que pour l'avantage de frère Thiériot .

Voici une pièce de vers d'un M. Poinsinet . Il y a des choses heureusement dites et touchantes, intérêt à part . Ce M. Poinsinet n'est point du tout ami de Fréron, comme on me l'avait écrit . Au contraire il me paraît très honnête homme . »

1 Cette lettre d'Albergati du 30 juin 1761dont on voit des extraits en note de la lettre du 8 juillet 1761 de V* à celui-ci, parut dans le Journal encyclopédique du 15 juillet 1761 .

2 Sent l'antiquité ; Cicéron, Brutus, XXI, 82 .

3 Réverent trop peu l'antiquité .

6 Et les gens de même farine .