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05/10/2017

trouvez-vous que le commerce se ressente déjà de la paix, et qu'il en procure les fruits ?

... Heu ! comment dire ? franchement : NON !

Ce serait même plutôt le contraire, le commerce de l'armement est florissant, le Rafale français et toutes les munitions et armes de tous pays sont encore de bon rapport pour les balances commerciales ; on n'est pas près de forger des charrues avec . Il va falloir se faire encore à cette idée de manger des fruits amers , et pire encore s'en trouver bien, par défaut .

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Message reçu !

 

« A Ami Camp, Banquier

à Lyon

Ferney 21è novembre 1762

Mon cher correspondant, trouvez-vous que le commerce se ressente déjà de la paix, et qu'il en procure les fruits ? Vous me feriez plaisir de me dire si on compte en effet sur la cession de la Floride et si vous en avez quelques nouvelles positives ?

Je ne peux vous dire encore si j'aurai recours à vos bontés pour mon métier d'agriculteur . Je vous prierai seulement de vouloir bien me dire à votre loisir ce que coûte le quintal de bon frumental .

Je vous supplierai de défalquer sur les 120 louis de chaque mois les fournitures dont vous me permettez que Mme Denis et moi nous vous importunons afin que les 180 000 livres restent intactes .

C'est toujours en supposant que M. de Laleu paie avec la régularité qu'il a promise . Je suppose que vous touchez exactement ces 120 livres par mois, et que cela n'a rien de commun avec les 44 740 livres que vous m'avez fait toucher . Si ces objets étaient mêlés ensemble je vous prierais de m'en vouloir bien fournir une note . Mais il me semble qu'ils sont absolument séparés . Ainsi mes comptes en deviendront plus faciles en défalquant de mois en mois ce que vous pourriez avoir payé sur les 120 louis . Je tâcherai d'user avec discrétion de la bonté que vous avez de permettre que nous recourions à vous dans nos petites nécessités . Mme Denis et moi nous vous renouvelons notre tendre attachement, et Mlle Corneille en dit autant à son docteur .

V. »

n’avez-vous jamais vu un ministre donner audience, écouter cent affaires, et ne se soucier d’aucune ?

... Si, bien sûr ! la liste remonte à l'antiquité et n'a pas de fin .

Sinon ce serait trop beau d'avoir des ministres attentifs à tous les problèmes et trouvant des solutions adéquates .

 

 

« A Charles-Augustin Ferriol, comte d'Argental

et à

Jeanne-Grâce Bosc du Bouchet, comtesse d'Argental

21 novembre [1762]

O mes anges ! n’avez-vous jamais vu un ministre donner audience, écouter cent affaires, et ne se soucier d’aucune ? n’avez-vous jamais vu un avocat plaider trois ou quatre causes sans s’en mettre en peine, et les juges prononcer sans les entendre ? Vous croyez donc qu’il en est de même de votre créature des Alpes ? Il me faut à la fois faire imprimer, revoir, corriger une Histoire générale, une Histoire de Pierre-le-Grand ou le cruel, et Corneille avec ses commentaires, et passer de cet abîme à une tragédie. Le tripot, le tripot doit l’emporter, j’en conviens ; mais, encore une fois, je n’ai qu’une âme logée dans un chétif corps usé, sec, et souffrant. J’avais mis votre Olympie en séquestre, afin de la revoir avec un œil sain et frais. Il était nécessaire de laisser tomber les grosses taies que l’enthousiasme étend sur les prunelles d’un auteur, dans la première ivresse d’une composition rapide. Je vous donnerai votre Olympie pour votre carême ; c’est un temps tout à fait sacerdotal, et digne d’une pièce dont l’action se passe dans un couvent. L’Opéra-Comique célébrera gaiement, au commencement de l’hiver, les plaisirs de la paix, et Paris aura mon grave hiérophante pour sa quadragésime. Ne trouvez-vous pas cet arrangement tout à fait convenable ? Puisque je suis à présent enfoncé dans l’historique, permettez-moi de vous demander simplement le secret de l’État, qui est le secret de la comédie. Les Espagnols cèdent-ils bien réellement la Floride ?1 la chose m’intéresse. Une famille suisse, qui m’est très recommandée, veut aller s’établir dans ce pays-là, et ne veut point vendre son petit fonds helvétique sans être sûre de son fait. Ne négligez pas, je vous en prie, ma question . Elle peut être hasardée, mais elle est charitable, et vous êtes anges du temporel comme du spirituel.

Avez-vous à Paris M. de La Marche ? c’est encore un point dont je vous supplie de m’instruire.

Le philosophe épouseur 2 arrivera donc. Nous requinquerons Cornélie-Chiffon, nous la parerons. Elle prétend qu’elle pourra savoir un peu d’orthographe : c’est déjà quelque chose pour un philosophe. Enfin nous ferons comme nous pourrons . Ces aventures-là s’arrangent toujours d’elles-mêmes . Il y a une providence pour les filles.

J’avais bien deviné que M. de Chauvelin m’avait trahi. Vous vous entendez comme larrons en foire. Il a sans doute beaucoup d’esprit et de goût. Plus vous en avez, mes chers anges, plus vous sentez combien une tragédie est une œuvre difficile, surtout quand le goût du public est usé.

Je voudrais bien que M. le duc de Bethfort 3 vît Tancrède, et qu’il souscrivît pour mademoiselle Corneille.

Zulime est de mediocribus.4

Mille tendres respects. »

1 Par le traité, la Grande-Bretagne restituait La Havane et Manille, et obtenait en échange la Floride et diverses autres compensations ; voir : https://fr.wikipedia.org/wiki/Trait%C3%A9_de_Paris_(1763)

et : http://mjp.univ-perp.fr/traites/1763paris.htm

3 Ministre plénipotentiaire anglais , le duc de Bedford .

4 Médiocre .