20/03/2015
Il arrivera du grabuge . C'est moi qui vous le dis Mademoiselle
... Les retraités manifestent !
Ouh la la ! le gouvernement doit trembler sur sa base grâce aux parkinsoniens et sucreurs de fraises en colère .
Cette manif arrive trop tard, aucun ministère ne peut lâcher quoi que ce soit pour améliorer leur sort et du coup, évidemment l'issue des élections prochaines ; le poids des votes des têtes chenues est loin d'être négligeable, attention , elles peuvent faire pencher la balance à leur gré .
Vous noterez qu'il n'y a pas ci-dessus de mémés flingueuses, elles sont à la maison pour préparer la tisane des héros/héraults fatigués
« A Louise-Dorothée von Meiningen, duchesse de Saxe-Gotha
A notre métairie, 21 mars 1760
Ma très honorée Demoiselle,1
J'ai bien reçu celle qu'il vous a plu m'écrire avec l'incluse de la chère demoiselle Féderci 2. C'est dommage qu'elle ait tant de caprices comme mon cousin a toujours eu l'honneur de vous le dire . Son mariage entre nous n'a pas l'air de se conclure sitôt . On lui proposait pourtant un beau garçon et vous savez qu'elle ne hait pas les beaux garçons 3. Mais voyez-vous, elle n'est pas assez craignant Dieu . Il arrivera du grabuge . C'est moi qui vous le dis Mademoiselle . Cette personne- là était bien élevée et paraissait avoir de beaux sentiments . Le monde l'a gâtée . Il ne tenait qu'à elle de vivre la plus heureuse personne du monde ; elle a dépensé son bien en passant pour un avare . Il y a là une mauvaise étoile . Cela finira mal Mademoiselle . Son oncle le capitaine de vaisseau a mieux conduit sa barque . Pour mon cousin je vous avouerai qu'il n'a pas le sens commun et qu'il se ruine en se faisant moquer de lui . Il tire toujours sa poudre aux moineaux, bat les buissons pour qu'un autre prenne les oisillons, fait de cent sous quatre livres, et de quatre livres rien . On ne voit que des sottises dans presque toutes les familles . Que vous êtes heureuse ma chère et honorée Demoiselle d'être auprès de Mme la duchesse ! Tredame 4! C'est un modèle de bonté et de vertu . Si je n’étais pas si vielle et si infirme j’irais vous voir et je prierais la respectable Mme de Bukvald de me mettre aux pieds de Son Altesse Sérénissime . Le bruit a couru dans nos quartiers que ses augustes enfants représentent une comédie en d'Amérique . Cela s'appelle je crois Alzire . Je ne sais pas si c'est en allemand, mais je crois que c'est en français, car on parle admirablement bien la langue française dans le palais de Son Altesse Sérénissime, et je n'ai pas trouvé qu'on eût le moindre accent . Il faut que Mme la duchesse ait bien de la raison et de l'esprit, Mademoiselle, car elle a trouvé le secret de préserver son pays des horreurs de la guerre dans le temps que tant d'autres pâtissent . Je lui souhaite toutes sortes de prospérités car elle les mérite, car elle est adorable . Mon beau-frère Rigourney et ma tante Bougeant vous saluent . Nos terres ont rapporté bien peu de grain cette année, il faut se consoler et espérer, et je suis bien humblement votre servante
Lamentier »
1 Pour les allusions codées, voir lettre du 11 mars 1760 à la duchesse : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2015/03/14/il-trouve-tres-bon-qu-elle-consulte-le-cousin-qui-est-un-peu-5582513.html
2Sans doute celle-ci : « DE FRÉDÉRIC II, ROI DE PRUSSE.
Freyberg, 20 mars [1760].
TOUJOURS SUR LA PAIX.
Peuple charmant, aimables fous,
Qui parlez de la paix sans songer à la faire,
A la fin donc résolvez-vous :
Avec la Prusse et l'Angleterre
Voulez-vous la paix ou la guerre?
Si Neptune sur mer vous a porté des coups,
L'esprit plein de vengeance et le cœur en courroux,
Vous formez le projet de subjuguer la terre;
Votre bras s'arme du tonnerre.
Hélas! tout, je le vois, est à craindre pour nous;
Votre milice est invincible,
De vos héros fameux le dieu Mars est jaloux,
La fougue française est terrible;
Et je crois déjà voir, car la chose est plausible.
Vos ennemis vaincus tremblant à vos genoux.
Mais je crains beaucoup plus votre rare prudence,
Qui par un fortuné destin
A du souffle d'Éole, utile à la finance,
Abondamment enflé les outres de Bertin 1.
Vous parlez à votre aise de cette cruelle guerre. Sans doute les contributions que votre seigneurie de Ferney donne à la France nourrissent la constance des ministres à la prolonger. Refusez vos subsides au Très-Chrétien, et la paix s'ensuivra. Quant aux propositions de paix dont vous parlez 2, je les trouve si extravagantes que je les assigne aux habitants des petites- maisons, qui seront dignes d'y répondre. Que dirai-je de vos ministres? Certes ces gens sont fous, ou ces gens sont des dieux 3. Ils peuvent s'attendre de ma part que je me défendrai en désespéré ; le Hasard4 décidera du reste.
De cette affreuse tragédie
Vous jugez en repos parmi les spectateurs,
Et sifflez en secret la pièce et les acteurs ;
Mais de vos beaux esprits la cervelle étourdie
En a joué la parodie.
Vous imitez les rois : car vos fameux auteurs
De se persécuter ont tous la maladie.
Nos funestes débats font répandre des pleurs,
Quand vos poétiques fureurs
Au public né moqueur donnent la comédie.
Si Minerve de nos exploits
Et des vôtres un jour faisait un juste choix,
Elle préférerait, et j'ose le prédire,
Aux fous qui font pleurer les peuples et les rois,
Les insensés qui les font rire.
Je vous ferai payer jusqu'au dernier sou, pour que Louis du Moulin5 ait de quoi me faire la guerre. Ajoutez dixième au vingtième, mettez des capitations nouvelles, créez des charges pour avoir de l'argent; faites, en un mot, ce que vous voudrez : nonobstant tous vos efforts, vous n'aurez la paix signée de mes mains qu'à des conditions honorables à ma nation. Vos gens bouffis de vanité et de sottise peuvent compter sur ces paroles sacramentales :
Cet oracle est plus sûr que celui de Calchas. (RACINE, Iphigénie, acte III, scène VII.)
Adieu, vivez heureux; et, tandis que vous faites tous vos efforts pour détruire la Prusse, pensez que personne ne l'a jamais moins mérité que moi, ni de vous, ni de vos Français. »
1. Ces vers ont été aussi insérés par Frédéric dans sa lettre à d'Argens, du 20 mars 1760.
2. On n'a pas retrouvé la lettre où Voltaire parlait de paix à Frédéric. (Clogenson.)
3. Épître à Algarotti (1735).
4. Voyez le commencement de la lettre du 30 mars 1759 à Frédéric II : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2014/05/19/c...
5. Louis XV .
3 Moquerie que ne craint pas de renouveler V* envers Frédéric II et ses « favoris ».
4 Variante euphémistique bien connue de « Notre Dame » qu'on trouve aussi sous la forme tredanse, tredinse, etc.
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