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24/05/2011

si j'ai fait des romans j'en demande pardon à Dieu ; mais tout au moins je n'y ai jamais mis mon nom, pas plus qu'à mes autres sottises

 

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« A Charles-Joseph Panckoucke

 

Aux Délices 24 mai 1764

 

Vous me mandez, Monsieur, que vous imprimez mes romans 1, et je vous réponds que si j'ai fait des romans j'en demande pardon à Dieu ; mais tout au moins je n'y ai jamais mis mon nom, pas plus qu'à mes autres sottises ; on n'a jamais, Dieu merci, rien vu de moi contresigné et paraphé Cortiat secrétaire 2 etc. Vous me dites que vous ornerez votre édition de culs-de-lampe : remerciez Dieu, Monsieur, de ce qu’Antoine Vadé n'est plus au monde ; il vous appellerai Welche sans difficulté, et vous prouverait qu'un ornement, un fleuron, un petit cartouche, une petite vignette ne ressemble ni à un cul ni à une lampe 3.

 

Vous me proposez la paix avec maître Aliboron dit Fréron, et vous me dites que c'est vous qui voulez bien lui faire sa litière . Vous ajoutez qu'il m'a toujours estimé , et qu'il m'a toujours outragé 4. Vraiment voilà un bon petit caractère ! C'est-à-dire que quand il dira du bien de quelqu'un, on peut compter qu'il le méprise . Vous voyez bien qu'il n'a pu faire de moi qu'un ingrat et qu'il n'est guère possible que j'aie pour lui les sentiments dont vous dites qu'il m'honore . Paix en terre aux hommes de bonne volonté 5; mais vous m'apprenez que maître Aliboron a toujours été de volonté très maligne . Je n'ai jamais lu son Année Littéraire . Je vous en crois seulement sur votre parole .

 

Pour vous, Monsieur, je vois que vous êtes de la meilleure volonté du monde, et je suis très persuadé que vous n'avez imprimé contre moi rien que de fort plaisant pour réjouir la cour 6; ainsi je suis très pacifiquement, Monsieur, votre etc. 7»


1 Panckoucke a écrit à V* que « quoiqu'il eût acquis ... par la cession de M. Lambert le droit de réimprimer le recueil de ses romans , il croyait devoir lui en demander la permission ».

2 Formule utilisée dans l'Instruction pastorale ... de Jean-Georges Lefranc de Pompignan ; le nom du secrétaire était Cortial .

3 Cf. la parole prêtée à « feu Antoine Vadé » au début du Supplément du Discours aux Welches : « un cul-de-sac, et tous les termes vulgaires qui défigurent une langue, me donnent un mortel chagrin. » Cf. aussi le Discours aux Welches .

4 Panckoucke a écrit : « Personne n'a de vous une si haute estime ... Quand il lit vos ouvrages immortels, il est obligé ensuite de se déchirer les flancs pour en dire le mal qu’il ne pense pas ...si vous daigniez prendre confiance en moi, vous verriez ... que celui que vous regardez comme votre plus cruel ennemi, que vous traitez ainsi deviendrait de votre admirateur secret, votre admirateur public. »

5 Évangile de Luc .

6 Panckoucke imprimait L’Année littéraire de Fréron .

7 La lettre de Panckoucke et la réponse de V* seront publiées . Panckoucke fera paraitre un démenti dans L'Année littéraire et dans L’Avant-coureur du 23 juillet : « Je déclare que je ne suis point l'auteur de cette lettre telle qu'elle est ; et j'en appelle au propre témoignage de M. de Voltaire ... » V* de son côté écrira à Damilaville le 6 août : « Ce que j'ai ... de meilleur à faire ... c'est de vous envoyer l'original de la lettre de Panckoucke . Vous verrez qu'on ne l'a point falsifiée, et qu'on en a simplement retranché des choses fort inutiles. »

 

 

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