16/05/2010
Je n’approuve point qu’une abeille qui travaille soit obligée de partager son miel et sa cire avec des animaux oisifs
« A Jean-François Marmontel
Aux Délices le 16 mai 1758
Digne Cakouac,[d’après le mot grec kakos = méchant ; cacouac, déjà employé dans le Mercure d’octobre 1757 ; terme employé dans une satire allégorique des jésuites pour étoffer un écrit périodique Le religion vengée ; cf. lettre à d‘Alembert 8 janvier 1758] fils de Cakouac [#1], fili mi dilecte in quo bene complacui,[mon fils chéri, en qui j’ai mis ma complaisance] grâces vous soient rendues pour vous être souvenu de moi dans votre planète de Mercure,[le Mercure de France qu’il dirigera de 1758 à janvier 1760] quoique je ne sois plus de ce monde. J’apprends que votre bénéfice qui n’est pas simple est pourtant chargé de grosses pensions. (Je n’approuve point qu’une abeille qui travaille soit obligée de partager son miel et sa cire avec des animaux oisifs.[Piron, Crébillon père et une dizaine d‘autres écrivains avaient reçu des pensions assignées sur le Mercure]) Il y a plus de quinze ans que je n’ai lu aucun Mercure. Mais je vais lire tous ceux qui paraitront. Je vous prie de me faire inscrire parmi les souscrivants. Quand vous n’aurez plus rien de nouveau, je pourrai vous fournir quelque sottise qui ne paraitra pas sous mon nom et qui servira à remplir le volume. Je vous embrasse de tout mon cœur, et je me réjouis avec le public de ce qu’un ouvrage si longtemps décrié [la copie de la BN porte « désiré » et n’a pas la parenthèse précédente] est enfin tombé entre les mains d’un véritable homme d’esprit et d’un philosophe capable de le relever et d’en faire un très bon journal.
Adieu, nos Délices vous font mille compliments.
Le Suisse V. »
#1 Le 27 novembre 1757, Thiriot a annoncé à V* que les jésuites vont publier « un écrit périodique intitulé La religion vengée », où ils devaient attaquer entre autres, d ’Alembert et Diderot et qu’ils faisaient « précéder … d’une satire allégorique … dans laquelle ils (les) appellent des Kakouaks … ». Dans le Mercure d’octobre 1757, un premier mémoire nommé Avis utile cite déjà « cacouac », monstre ayant sous la langue une poche de poison distillé à chaque mot.
Jacob-Nicolas Moreau a publié en décembre 1757 un Nouveau Mémoire pour servir à l’histoire des cacouacs.
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