27/11/2023
les seuls soupçons peuvent conduire aux extrémités les plus funestes
... D'où le suicide de malheureux adolescents qui prennent à coeur toute l'ordure qu'on leur jette sur les réseaux sociaux, gazettes infernales de notre temps . Le monde virtuel est peuplé de foutus lâches ; apprenons à nos jeunes fragiles à faire clic sur Erase all, sans crainte de ne plus avoir d' "amis"[sic] . Quant aux harceleurs.euses en chair et en os , qu'ils.elles soient dénoncé.e.s et puni.e.s sans tarder .
« A Etienne-Noël Damilaville
1er avril 1768
Mon cher ami, je reçois votre lettre du 26 mars . Votre sensibilité me pénètre. L'aventure de La Harpe a des suites bien désagréables . Malheur à la célébrité ! On a mis contre lui et contre moi dans la Gazette d’Utrecht un article abominable . Cela est fait par quelques-uns de ces polissons de Paris qui sont aux gages des gazetiers étrangers, et qui leur fournissent des calomnies contre les particuliers ne sachant pas un mot des affaires publiques . On dit dans cette Gazette d'Utrecht du 11 mars que La Harpe m'a volé Le Catéchumène et l'a fait imprimer . C'est là une des moindres douceurs de cet article . Je suis tous les jours en butte aux plus affreuses calomnies . Vous savez bien de qui est Le Catéchumène . C'est un ouvrage très médiocre dans lequel il y a quelques plaisanteries ; c'est une viande au gros sel . Peut-on supporter un voyageur qui est étonné de voir un temple et qui est tout surpris que ce temple ait des portes qu'on ouvre et qu'on ferme ? Cependant on ose m'attribuer cent ouvrages dans ce goût et enfin je puis en être la victime .
Le baron d'Holbach fait venir tous ces rogatons de Hollande . On ne manque pas chez lui de me les imputer et les bruits courent dans tout Paris . Vous allez quelquefois dans sa maison ; je me recommande à vous et je vous supplie de détourner les coups qu'on m'y porte .
Le correspondant qui m'a fait votre éloge, dont vous êtes si content, ne serait pas lui-même en état de me sauver si l'imposture m'attaquait avec des armes contre lesquelles il n'y a point de bouclier .
Vous me mandâtes il y a près d'un mois qu'on avait dit que chez le baron d'Holbach ma lettre à mon neveu sur La Harpe avait été lue devant vingt personnes . Il est vrai qu'on l'a dit ; mais il est vrai aussi que jamais cette lettre n'y a été lue .
Comptez que le public ne fait que mentir . Comptez encore qu'il n'y a pas un mot de vrai dans la prétendue histoire de l'honnête criminel , puisque Favre lui-même m'a écrit, m’a envoyé le procès-verbal, m'a prié d'envoyer un placet à M. le prince de Beauvau et qu'assurément je suis plus instruit que personne de cette affaire . Comptez que je sais très bien ce qui se passe . Comptez surtout qu'on est très irrité contre ces misérables brochures dont on est inondé . Le plus grand malheur qui puisse arriver à un honnête homme est d'en être soupçonné et les seuls soupçons peuvent conduire aux extrémités les plus funestes .
La Harpe m'a fait bien du mal, mais il m'en a demandé pardon . Il m'a tout avoué avec componction, il n'y a que le diable qui ne pardonne point . J'ai dû le gronder, mais je ne dois point le laisser en proie aux outrages qu'on lui fait dans les gazettes .
Adieu, mon très cher ami, la vertu et votre amitié me consolent de tout .
Je ne vois pas ce que la calomnie peut m'imputer sur Mme Denis . Je lui donne vingt mille francs de pension . Je lui en ai assuré trente-cinq mille . La petite Corneille a eu plus de quarante mille écus en mariage . Si on vend Ferney, tout le prix de la terre sera pour Mme Denis . J'ai donné à mes autres parents tout ce que j'ai pu . J'en suis fâché pour la calomnie. »
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