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03/07/2012

Il n'y a que le cœur qui soit inépuisable. Je voudrais bien que les talents fussent comme l'amitié, qu'ils augmentassent avec les années.

 ... Et cet homme génial a prouvé jusqu'à son dernier souffle sa fidèlité en amitié et la qualité de ses talents .

Si mes talents sont relatifs, avec ce qu'on peut appeler une bonne marge de croissance, mon amitié affectueuse pour Mam'zelle Wagnière se confirme à chaque rencontre , et je la crois bien inépuisable.

 

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« A M. le comte d'ARGENTAL.

Aux Délices, 3 mai [1756]

Thieriot me mande, mon divin ange, que vous avez été content de l'édition de mes sermons, que ma morale vous a plu, que les Notes ont eu votre approbation mais vous saviez l'affront qu'on venait de faire au père de l'Église des sages, à Bayle 1. On venait de le traiter comme le père Berruyer et comme la Christiade; on l'associait à l'évêque de Troyes. On bullait tout, et Ancien et Nouveau Testament, et mandements, et philosophie. Cette capilotade est assez singulière, et le discours de M. Joly peu courtois pour le philosophe de Rotterdam. Mon mauvais ange voulut que, précisément dans ce temps-là, il se soit glissé au bout de mon Petit Carême une note sur Bayle qui devient tout juste la satire d'un jugement que j'ignorais, et du discours éloquent de M. Joly de Fleury, que je n'avais pu deviner. Je n'ai été informé que par les gazettes de l'arrêt contre l'Écriture sainte et contre Bayle. J'ai écrit aussitôt à Thieriot, l'éditeur; je l'ai prié de réformer ma scandaleuse note faite si innocemment. Je ne veux pas être brûlé avec la Bible; à moi n'appartient tant d'honneur. Il est certain qu'il y a deux ou trois petits mots qui doivent déplaire beaucoup à M. Joly de Fleury « Que ceux qui se déchainent contre Bayle apprennent de lui à raisonner et à être modérés » et, à la fin de la note: « C'est qu'ils sont injustes. » Encore une fois, je ne pouvais deviner que des hommes qui raisonnent, qui sont modérés et justes, traitassent Bayle comme ils l'ont fait; mais je ne dois pas le leur dire. Vous venez toujours à mon secours, mon ange; mais en est-il temps? et Thieriot n'a-t-il pas déjà fait imprimer ma bévue? Je vous supplie aussi de ne pas permettre qu'on gâte ce vers
L'empereur ne peut rien sans ses chers électeurs 2.
Le mot de cher est celui dont il se sert en leur écrivant. Ce sont ces mots propres et caractéristiques qui font le mérite d'un vers. Qu'avec ses électeurs est dur et faible. Je voudrais bien n'être ni brûlé ni mutilé.
Je mérite ces grâces de vous, puisque je vous fais faire deux tragédies à la fois sous mes yeux. La première est ce Botoniate, ce Nicéphore, que le conseiller 3 genevois raccommode, la seconde est Alceste, à laquelle votre très-humble servante, ma nièce, travaille tout doucement. Il ne reste plus que moi mais je vous ai déjà dit qu'il me fallait du temps, de la santé, et flatus divinus 4. J'attends le moment de la grâce. Si mon état continue, je serai un juste à qui la grâce aura manqué. Je ne peux d'ailleurs songer à présent qu'à Port-Mahon. Je me flatte que vous apprendrez bientôt la réduction de toute l'île. Ce sera là un beau coup de théâtre, un beau dénoûment; mais, en vérité, il est plus aisé de prendre Minorque que de faire une bonne tragédie à mon âge. Je ne connais plus les acteurs, je suis loin de vous. Les sujets sont épuisés, et moi aussi. Il n'y a que le cœur qui soit inépuisable. Je voudrais bien que les talents fussent comme l'amitié, qu'ils augmentassent avec les années. Adieu mille tendres respects à tous les anges. »

 

2 La Loi naturelle, seconde partie, v. 19, page 378, http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k80005b/f384.tableDesMatieres

3 François Tronchin

4 Souffle divin

 

" ... les hommes sont inconséquents, c'est qu'ils sont injustes. » Ces mots étaient une prophétie; supprimons-la

 ... Et coupons toutes les têtes qui dépassent !

"Les hommes, lorsqu'ils ne sont plus que l'ombre d'humains résonnent comme des cruches et raisonnent comme leurs pieds !" : paroles de pigeon voyageur  .

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 En attendant le TGV, le 30/6/2012

 

« A M. THIERIOT.

Aux Délices, 30 avril [1756]

Je viens de lire la gazette, et, en conséquence, je vous prie, mon ancien ami, de faire corriger la note 1 sur Bayle, s'il en est temps. Je ne veux point me brouiller avec gens qui traitent si durement Pierre Bayle. Le parlement de Toulouse honora un peu plus sa mémoire; mais altri tempi, altre cure. L'auteur des Notes sur le Sermon de Lisbonne ne pouvait prévoir qu'on ferait une Saint-Barthélemy de Bayle, du pauvre jésuite Berruyer 2, de l'évêque de Troyes 3, et de je ne sais quelle Christiade 4. Il faut retrancher tout ce passage « Je crois devoir adoucir ici, etc. » (page 20), et mettre tout simplement: « Tout sceptique qu'est le philosophe Bayle il n'a jamais nié la Providence, etc. » et, à la fin de la note, il faut retrancher ces mots: « C'est que les hommes sont inconséquents, c'est qu'ils sont injustes. » Ces mots étaient une prophétie; supprimons-la. Les prophètes n'ont jamais eu beau jeu dans ce monde. Mettons à la place « C'est apparemment pour d'autres raisons qui n'intéressent point ces principes fondamentaux, mais qui regardent d'autres dogmes non moins respectables. » Je vous prie, mon ancien ami, de ne pas négliger cette besogne; elle est nécessaire. Il se trouve, par un malheureux hasard, que la note, telle qu'elle est, deviendrait la satire du discours d'un avocat
général 5 et d'un arrêt du parlement; on pourrait inquiéter le libraire, et savoir mauvais gré à l'éditeur le pauvre père Berruyer sera de mon avis. Tâchez donc, mon ancien ami, de raccommoder par votre prudence la sottise du hasard.
Je crois actuellement M. de Richelieu dans Port-Mahon, il n'est pas allé là par la cheminée 6.
Je vous embrasse de tout mon cœur. »

 

 1 Voir la lettre du 3 mai à d'Argental . L'arrêt de la cour de parlement du 9 avril 1756, sur le réquisitoire d'Omer Joly de Fleury, condamnait à être supprimés ou lacérés et brulés, non le Dictionnaire de Bayle, mais son Analyse raisonnée (par le jésuite de Marsy), 1755, 4 vol. in-12 (auxquels Robinet en ajouta quatre en 1773); la Christiade, dont il est parlé tome XX, page 32; les première et seconde parties de l'Histoire du peuple de Dieu, par Berruyer.

3 Mathias Poncet de La Rivière, évêque de Troyes en 1742, Voir tome XVI, note 6, page 88.

6 Richelieu s'introduisait chez Mme de La Popelinière par une cheminée tournante.

 

02/07/2012

Je ne suis pas le seul qui parie pour vous.

... Monsieur le président .

J'en connais d'autres, qui misent sur vous, dont une que j'ai fait  attendre en plein soleil samedi (voir la preuve en image suivante), qui sont partie prenante .

 

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Hassan II is alive !!

Note de dernière seconde, sur Antenne 2, le commentateur du résumé de l'étape se terminant à Tournai vient de ressusciter un mort , Hassan II, qui selon lui honore de sa présence l'arrivée du jour . Mort de rire, je suis, d'autant plus que Gérard Holz , emporté par un enthousiasme que je ne partage pas, attribue le titre de "roi du commentaire" au magnifique gaffeur . Je ne sais qui va remporter ce tour, mais la palme de l'autosatisfaction et de l'à-peu-près me semble difficile à enlever à ces deux bazus .Je crois que la boite à coïonneries est largement ouverte !

Quant à Hassan II, il ne lui reste plus, après une bonne douche, qu'à se recoucher dans son cercueil pour récupérer , l'étape de demain ne sera pas facile . Le verra t'on à Boulogne ?

 

 

 

 

« A M. le maréchal duc de RICHELIEU.

Aux Délices, près de Genève, avril [1756]

Prenez Port-Mahon, mon héros; c'est mon affaire. Vous savez qu'un fou d'Anglais parie vingt contre un, à bureau ouvert dans Londres, qu'on vous mènera prisonnier en Angleterre avant quatre mois. J'envoie commission à Londres de déposer vingt guinées contre cet extravagant, et j'espère bien gagner quatre cents livres sterling 1, avec quoi je donnerai un beau feu de joie le jour que j'apprendrai que vous avez fait la garnison de Saint- Philippe prisonnière de guerre. Je ne suis pas le seul qui parie pour vous. Vous vengerez la France, et vous enrichirez plus d'un Français. Je me flatte que, malgré la fatigue et les chaleurs, la gloire vous donne de la santé, à vous et à M. le duc de Fronsac.
Vous avez auprès de vous toute votre famille. Permettez-moi de souhaiter que vous buviez tous à la glace dans ce maudit fort de Saint-Philippe, couronnés de lauriers comme des Romains triomphant des Carthaginois.
Je n'ose pas vous supplier d'ordonner à un de vos secrétaires de m'envoyer les bulletins mais, si vous pouvez me faire cette faveur, vous ne pouvez assurément en honorer personne plus intéressé à vos succès.
Permettez que les deux Suisses vous présentent leur tendre respect. »