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12/01/2022

Les fous atrabilaires, les furieux, sont plus remarqués dans notre nation que dans toute autre

... Je ne sais si c'est tout à fait vrai, mais notre histoire française actuelle est riche en furieux, les anti-ceci-cela, démolisseurs forcenés . Il est à souhaiter que la sélection naturelle nous en débarrasse au plus tôt .

Pour me dépolluer de cette ambiance détestable j'écoute Leny Esccudero, un grand , digne de Brassens et Brel : https://www.bing.com/videos/search?q=Leny+Escudero&do...

A écouter attentivement : https://www.bing.com/videos/search?q=Leny+Escudero&&a...

Cartoons - Dessins - Université d'été du MEDEF - Partie 14

 

 

 

« A Jean Le Rond d'Alembert

15 octobre [1766]

Mon vrai philosophe, Jean-Jacques est un maître fou, et aussi fou que vous êtes sage. La lettre de M. Hume 1 me prouve que les Anglais ne sont point du tout hospitaliers, puisqu’ils n’ont pas donné une place dans Bedlam à Jean-Jacques. Ce petit bonhomme aurait été enchanté d’y être logé, pourvu qu’on eût mis son nom sur la porte, et que les gazettes en eussent parlé. Au moins les folies de cette espèce ne font pas grand mal ; mais nous en avons eu à Toulouse et à Paris d’une espèce plus dangereuse. Les fous atrabilaires, les furieux, sont plus remarqués dans notre nation que dans toute autre. Je m’imagine que mon ancien disciple 2 vous a écrit ce qu’il en pensait . Il est admirable sur ce chapitre. Je le crois enfin devenu tout à fait philosophe. Je me trompe fort, ou plus il vieillira, plus il sera humain et sage. Je voudrais savoir si vous écrivez toujours à une certaine dame qui donne des carrousels 3 ; elle donne quelque chose de mieux ; elle a minuté de sa main un édit sur la tolérance universelle. L’Église grecque n’était pas plus accoutumée que la latine à ce dogme divin. Si elle continue sur ce ton, elle aura plus de réputation que Pierre le Grand.

Ne pourriez-vous point me dire ce que produira, dans trente ans, la révolution qui se fait dans les esprits, depuis Naples jusqu’à Moscou ? Je n’entends pas les esprits de la Sorbonne ou de la halle, j’entends les honnêtes esprits.

Je suis trop vieux pour espérer de voir quelque chose, mais je vous recommande le siècle qui se forme.

Adieu, je me console en vous écrivant, et vous me rendrez heureux quand vous m’écrirez. »

1 V* a certainement en vue la publication A Concise and Genuine Account of the Dispute between Mr Hume and Mr Rousseau, traduit par J.-B. Suard sous le titre Exposé succinct de la contestation qui s'est élevée entre M. Hume et M. Rousseau .

Voir : https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k718136.texteImage

2 Frédéric II.

3 Catherine II .

la tolérance est d’accord avec la religion et avec la politique. Apparemment que ce qui convient à la Russie n’est pas praticable dans d’autres États

... On en veut pour preuve l'actualité ukrainienne : https://www.20minutes.fr/monde/3214067-20220110-ukraine-americains-russes-entament-pourparlers-cruciaux-lundi

Kanye West bouffi de suffisance ne doute pas de pouvoir rencontrer Poutine et de devenir résident russe . Osera-t-il demander la nationalité russe comme l'a obtenue notre Gérard Depardieu national ? Les Ukrainiens ne doivent pas compter sur une quelconque prise de position en leur faveur, le rappeur milliardaire U.S. ne les a pas choisi pour en faire ses compatriotes d'adoption : https://www.20minutes.fr/arts-stars/people/3215303-202201...

 

 

 

« A Etienne-Noël Damilaville

10 octobre 1766 1

Mon cher ami, j’ai trouvé dans une de vos lettres, reçue le 4 octobre, un paquet de Russie. L’impératrice daigne m’écrire qu’elle établit la tolérance universelle dans tous ses États . Elle a la bonté de me communiquer la teneur de l’édit. Cet article, écrit de sa main, porte ces propres mots 2 : Que la tolérance est d’accord avec la religion et avec la politique. Apparemment que ce qui convient à la Russie n’est pas praticable dans d’autres États. Vous savez que nous ne nous piquons ni vous ni moi, dans notre obscurité, de raisonner sur les volontés des souverains. Je vous mande seulement le fait tel qu’il est. Je crois vous avoir instruit que le sieur Deodati m’a écrit. J’attends aussi des certificats de plusieurs autres personnes ; et, quand je les aurai, je ferai un petit mémoire 3 pour le passé, le présent, et l’avenir. La justification est si claire que je n’aurai pas besoin de me mettre en colère ; j’userai de la plus grande modération, et tous les journaux pourront se charger de ce mémoire. Je crois seulement que nous serons obligés de supprimer quelque chose du commencement de votre déclaration, qui pourrait effaroucher les ennemis des lettres.

Je me flatte, mon cher frère, que je recevrai bientôt le mémoire de feu M. de La Bourdonnais 4, avec tout ce que j’attends.

Je suis très curieux, je vous l’avoue, de lire la lettre de Jean-Jacques à M. Hume 5. On dit que c’est un chef-d’œuvre d’impertinence.

L’intérêt que vous prenez à M. et à Mme de Beaumont ne vous a-t-il pas engagé à lire le factum de son adverse partie ? Un seul mémoire ne met jamais au fait. Si le mémoire de M. de La Roque pouvait se trouver dans votre paquet, je serais bien content.

Vous n’avez rien reçu par M. de La Borde ; mais l’ainé Calas doit arriver à Paris avant cette lettre, et M. de La Borde devait aller de Ferney en Anjou.

Ô qu’il serait doux de vivre ensemble, et de se rassembler cinq ou six sages loin des méchants et loin des obstacles ! Comme on est bridé et garrotté de tous côtés !

Avez-vous des nouvelles d’Élie ? Ce pauvre Sirven se désespère. Je lui ai donné vingt fois des espérances qui l’ont trompé. Je suis la cause innocente de ses larmes ; il fait pitié.

Adieu, mon cher frère . Vos lettres sont ma plus grande consolation. »

1 L'édition Correspondance littéraire ne donne pas le destinataire .

4 Mémoire pour M. de La Bourdonnais (avec le Supplément par de Gennes), 1750-1751, deux volumes in-4°, ou quatre volumes in-12.

5 Elle est du 10 juillet 1766.