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28/07/2023

Nous manquons d'hommes en bien des genres, mon cher ange, cela est très vrai ; mais les autres nations ne sont pas en meilleur état que nous

... Ce qui n'est ni rassurant ni réjouissant . En ce moment, il est difficile de compter sur les "malades" bidons, grands malades des forces de police qui deviennent bien peu fiables dans leurs interventions , et répréhensibles par leurs violences inadmissibles . Le soutien à ceux d'entre eux qui dépassent les normes n'est pas sans me rappeler celui apporté à des prêtres pédophiles ; soutien de caste . Il est pourtant statistiquement banal qu'on trouve des pourris dans toutes les professions, ce sont des humains avec leur proportion de vices et folies, la police n'y échappe pas . Le "pétage de plombs" est toujours inadmissible quand des vies sont en jeu .

 

 

« A Charles-Augustin Ferriol , comte d'Argental

4è janvier 1768 1

Comme les cuisiniers 2, mon cher ange, partent toujours de Paris le plus tard qu'ils peuvent, et s'arrêtent en chemin à tous les bouchons, j'ai reçu un peu tard la lettre que vous avez bien voulu m'écrire le 14 décembre. Ma réponse arrivera gelée; notre thermomètre est à douze degrés au-dessous du terme de la glace . Une belle plaine de neige, d'environ quatre-vingts lieues de tour, forme notre horizon . Me voilà en Sibérie pour quatre mois. Ce n'est pas assurément cette situation qui me fait désirer de vous revoir et de vous embrasser . Je quitterais le paradis terrestre pour jouir de cette consolation. J'espère bien quelque jour venir faire un tour à Paris, uniquement pour vous et pour Mme d'Argental. Il me sera impossible d'abandonner longtemps ma colonie. J'ai fondé Carthage, il faut que je l'habite, sans quoi Carthage périrait, mais je vous réponds bien que, si je suis en vie dans dix-huit mois, vous reverrez un vieux radoteur qui vous aime comme s'il ne radotait point.

M. de Thibouville me dit qu'il faut que je vous envoie la lettre de M. le duc de Duras; je ne sais trop où la retrouver. Elle contenait, en substance, que la belle Dubois m'avait traité comme ses amants, qu'elle m'avait trompé ; que la Comédie était, comme beaucoup d'autres choses, fort en décadence ; qu'il avait établi un petit séminaire de comédiens à Versailles 3, qui ne promettait pas grand-chose ; que Lekain était toujours bien malade, et que la tragédie était tout aussi malade que lui 4.

Nous manquons d'hommes en bien des genres, mon cher ange, cela est très vrai ; mais les autres nations ne sont pas en meilleur état que nous.

M. de Chardon m'avait promis de rapporter l'affaire des Sirven avant la naissance de notre Sauveur mais les petites niches qu'il a plu au Parlement de lui faire ont retardé l'effet de sa bonne volonté. L'affaire n'a point été rapportée ; je ne sais plus où j'en suis, après cinq ans de peines. Il faut se résigner à Dieu et au Parlement.

Pour mon petit procès avec Mme Gillet, il ne m'inquiète guère . C'est une idiote qui veut quelquefois faire le bel esprit, et qui parle quelquefois à tort et à travers à M. Gillet. Elle est peu écoutée mais M. Gillet a quelquefois des fantaisies, des lubies et il y a des affaires dans lesquelles il se rend fort difficile. Il est triste d'avoir des démêlés avec des gens de ce caractère.

Je suis sensiblement touché de la bonté que vous avez de songer à redresser l'esprit de M. Gillet.

Mon pauvre Damilaville est tout ébouriffé de la crainte de n'être pas à la tête des vingtièmes. Je vous avoue que je lui souhaiterais une autre place . C'est un lieutenant-colonel dont tout le monde désire que le régiment soit réformé. »

1 La copie Beaumarchais-Kehl, suivie par toutes les éditions, annexe à la fin de la lettre le billet du 15 janvier . En outre, les mêmes éditeurs, malgré la date explicitement portée, placent cette lettre en 1767 ; erreur corrigée par Beuchot . Voir : http://www.monsieurdevoltaire.com/app.php/2015/07/correspondance-annee-1768-partie-1.html

2 Il faut certainement corriger ce mot en courrier, comme le suggère Charrot ; voir d'ailleurs la lettre du 9 janvier 1768 à Christin .

3 Voir les Mémoires secrets (29 octobre 1767).

4 A la date du 30 janvier 1768, les Mémoires secrets notent encore : « La Comédie -Française se délabre de plus en plus […] . Le sieur Lekain périclite. »

 

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