07/04/2010
un homme dont le cœur vrai, tendre et désintéressé vous sera attaché pour jamais.
« A Jean-Jacques Amelot de Chaillou
A Paris 7 avril [1744]
Monseigneur,
Permettez qu’après vous avoir excédé en vers et en chiffre [cf. lettre du 5 juin 1743], je vous ennuie un peu en prose. Vous n’aurez pas le temps de lire cette seconde édition du catéchisme de Neuton [Eléments de la philosophie de Newton, publiés probablement en mars 1744], mais honorez-la du moins d’une place dans votre bibliothèque.
Si vous daignez vous souvenir de moi plus que de mes livres, j’ose espérer que vous voudrez bien parler au roi des extrêmement petits services que j’ai rendus de si bon cœur [« mission » diplomatique en Prusse en 1743], et du juste refus que je fais d’une maison meublée et de douze mille francs de pension que le roi de Prusse m’offre ; j’aime mieux vivre sous la protection de mon souverain, que d’aller chercher les faveurs des autres rois . Et je me flatte que cette façon de penser ne vous déplaira pas.
Si vous êtes curieux d’une des dernières lettres du roi de Prusse, vous trouverez souligné l’article où il me reproche de ne pas venir occuper ma maison de Berlin. Donnez-moi, Monseigneur, je vous en prie, la plus belle récompense de mes rigueurs avec ce monarque, en disposant favorablement l’esprit de mon roi pour un homme dont le cœur vrai, tendre et désintéressé vous sera attaché pour jamais.
Je suis avec bien du respect,
Monseigneur,
Votre très humble et très obéissant serviteur.
Voltaire.
Je vous supplie de me renvoyer à Cirey la lettre du roi de Prusse. »
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