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21/06/2010

vouloir échauffer dans le cœur d'un homme qui se pique de sentiments, les bontés dont votre aimable ambassade lui donne l'exemple

 

 

 

« A Charles-Augustin Ferriol, comte d'Argental

conseiller du parlement

rue de la Sourdière à Paris.

 

Aux Délices 21 juin [1758]




Premièrement, mon divin ange, le confident Tronchin fera sa principale occupation de ménager mon bonheur, c'est à dire de vous attirer à Lyon [Jean-Robert Tronchin, ami de feu le cardinal de Tencin et de Mme de Grolée, est chargé d'obtenir qu'elle invite d'Argental à Lyon ; celui-ci n'aurait alors qu'à « plaire » et ce serait un premier pas vers l'héritage et de plus V* pourrait voir son ami]. Et je veux absolument croire qu'il en viendra à bout.



Quand à la négociation d'un très aimable ambassadeur je n'en connais pas de plus facile [Chauvelin, ambassadeur à Turin, chargé de la négociation avec le représentant de l'Autriche et le gouvernement français en faveur de V*; cf. lettre du 24 mai 1758] . Et je vous aurai la plus grande obligation à vous et à lui du petit mot en général qu'il veut bien avoir la bonté de dire de lui-même. Il peut très aisément et sans se compromettre encourager les sentiments favorables qu'on me conserve [= l'abbé de Bernis, académicien, poète et qui a fait comme V* autrefois des vers à Etioles chez Mme de Pompadour ], il peut faire regarder comme une chose honnête et même honorable de revoir un ancien camarade en poésie, en Académie et non pas en visage [V* se plait à opposer la face « rubiconde » de Bernis à la sienne ; cf. lettre du 24 mai]. Il y a du mérite, il y a de la gloire à faire certaines actions. Et tout cela peut être représenté sans être mendié, et sans autre dessein que de vouloir échauffer dans le cœur d'un homme qui se pique de sentiments, les bontés dont votre aimable ambassade lui donne l'exemple. C'est d'ailleurs un plaisir de dire à un auteur que je suis un des plus ardents partisans de sa pièce [= les traités d'alliance avec l'Autriche en 1756 et 1757, dont Bernis a été un des principaux auteurs], et que je la prône partout. Je ne veux point qu'on me donne une loge. Je ne veux rien mais je désire ardemment que votre ancien ami parle à votre ancien ami comme vous parleriez vous-même. Et je vous prie de remercier d'avance votre ambassadeur.



Il faut que je vous confie, mon cher ange, que je vais passer quelques jours à la campagne chez Mgr l'Électeur palatin .Je laisserai les nièces se réjouir et apprendre des rôles de comédie pendant ma petite absence. Je ne peux remettre ce voyage. Il faut que pour mon excuse vous sachiez que ce prince m'a donné les marques les plus essentielles de sa bonté, qu'il a daigné faire un arrangement pour ma petite fortune et pour celle de ma nièce [un prêt de 130 000 livres à l'Electeur qui doit assurer « une rente considérable » à Mme Denis], que je dois au moins l'aller voir et le remercier. M. l'abbé de Bernis a bien voulu m'envoyer de la part du roi un passeport dans lequel Sa Majesté me conserve le titre de gentilhomme ordinaire, de façon que mon petit voyage se fera avec tous les agréments possibles. J'aimerais mieux, je vous en réponds, en faire un pour venir remercier Mme la princesse Robecq [Anne-Marie de Luxembourg de Montmorency, princesse de Robecq] de la bonté qu'elle a de m'accorder son suffrage. Elle a bien senti que rien ne devait être plus glorieux et plus consolant pour moi. C'est à vous que je dois l'honneur de son souvenir et c'est par vous que mes remerciements doivent passer. Adieu mon cher et respectable ami, je pars dans quelques jours, et à mon retour je ne manquerai pas de vous écrire.



V. »

 

 

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