Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

28/08/2010

il faut montrer la vérité avec hardiesse à la postérité, et avec circonspection à ses contemporains.

Une vérité qui peut faire mal à entendre, de nos banlieues  (je mets à part le ton et la musique stéréotypés ! c'est du rap ! que Lekain et Rameau leur pardonnent ...) :

http://www.deezer.com/listen-5363376

Vérité grecque ?

http://www.deezer.com/listen-931436

 Encore plus loin, toujours vérité, sans frontière , black ! comme on dit :

http://www.deezer.com/listen-3022226

La fameuse "heure de vérité" :

http://www.deezer.com/listen-2748999 ;http://www.deezer.com/listen-2749015 ; ou celle-ci qui décoiffe et que j'aime bien : http://www.deezer.com/listen-2749015

Vous décrochez ? Bon, alors ... Cool :Tu veux la vérité : http://www.deezer.com/listen-2689732

Celle-ci est assez en accord avec la définition de Volti de ce jour, je vous la recommande : http://www.deezer.com/listen-606456

 

 

 « A Charles-Augustin Ferriol, comte d'Argental

 

A Berlin 28 août [1751]

 

Mon cher et respectable ami, milord Maréchal qui est une espèce d'ancien Romain, apporte Rome à Mme Denis . Cicéron ne se doutait pas qu'un jour un Écossais apporterait de Prusse à Paris ses Catilinaires en vers français. C'est d'ailleurs une assez bonne épigramme contre le roi George, que deux braves rebelles de chez lui, ambassadeurs en France et en Prusse [i]. Il est vrai que milord Maréchal a plus l'air d'un philosophe que d'un conjuré, cependant il a été conjuré. C'est peut-être en cette qualité qu'il m'a paru assez content de Rome sauvée, quand j'ai eu l'honneur de jouer Cicéron. Enfin il apporte la pièce, et Nonnius est le père d'Aurélie, ce qui est beaucoup mieux, parce que Nonnius est fort connu pour avoir été tué.

 

Si j'avais reçu votre lettre plus tôt, j'aurais glissé quatre vers à Catilina pour accuser ce Nonnius d'être un perfide qui trompait Cicéron.

 

Je vous jure que la scène est toujours dans le temple de Tellus, et que Caton au 5è acte dit au reste des sénateurs qui sont là, qu'il a marché avec Cicéron et l'autre partie du sénat. S'il faut encore des coups de rabot, ne m'épargnez pas. Mais milord Maréchal peut vous dire qu'il m'est impossible de partir de quelques mois, car non seulement j'ai encore quelque petite besogne littéraire avec mon roi philosophe [ii], mais j'ai un Siècle sur les bras. Je suis dans les angoisses de l'impression,[iii] et de la crainte. Je tremble toujours d'avoir dit trop ou trop peu, il faut montrer la vérité avec hardiesse à la postérité, et avec circonspection à ses contemporains. Il est bien difficile de réunir ces deux devoirs. Je vous enverrai l'ouvrage. Je vous prierai de le montrer à M. de Malesherbes et je ferai tant de cartons que l'on voudra. M. le maréchal de Richelieu doit un peu s'intéresser à l'histoire de ce siècle ; lui et M. le maréchal de Belle-Isle sont les deux seuls hommes vivants dont je parle. Mais en même temps il doit sentir l'impossibilité physique où je suis de venir faire un tour en France avant que ce Siècle soit imprimé, corrigé, et bien reçu. Figurez-vous ce que c'est que de faire imprimer à la fois son Siècle, et une nouvelle édition de ses pauvres œuvres,[iv] de se tuer du soir à matin, à tâcher de plaire à ce public ingrat, de courir après toutes ses fautes et de travailler à droite et à gauche. Je n'ai jamais été si occupé. Laissez-moi bâtir ces deux maisons avant que je parte . Les abandonner ce serait les jeter par terre. Mon cher ange, représentez vivement à M. le maréchal de Richelieu la nécessité indispensable où je me trouve de toutes façons, de rester encore quelques mois où je suis . Ma santé va mal, mais elle n'a jamais été bien. Je suis étonné de vivre. Il me semble que je vis de l'espérance de vous revoir. Je viens de lire Zarès.[v] L'imprimera-t-on au Louvre ? Adieu, mille tendres respects à tous les anges.

 

 

Vraiment j'oubliais le bon, et j'allais fermer ma lettre sans vous parler de ce prophète de La Mecque, pour lequel je vous remercie d'aussi bon cœur que j'ai remercié le pape. Nous verrons si je séduirai le parterre comme la cour de Rome [vi]. Il y a un malheur à ce Mahomet, c'est qu'il finit par une pantalonnade. Mais Lekain dit si bien : il est donc des remords.[vii]

A propos de remords j'en ai bien d'être si loin de vous et si longtemps. Mais je ne peux plus faire de tragédies. Vous ne m'aimerez plus.

 

V. »


iLe comte Marischal, écossais d'origine, dit milord Maréchal, ambassadeur extraordinaire du roi de Prusse en France et milord Tyrconnel, Irlandais , ambassadeur de France en Prusse.

ii V* doit encore aider à corriger ses œuvres, peut-être le mystérieux et satyrique Palladion que Frédéric corrige encore début 1752 ?

iii Il fait imprimer à Berlin Le Siècle de Louis XIV.

iv Chez Walther à Dresde ; cf. lettre du 24 août à Walther.

vDe Palissot de Montenoy, créé le 3 juin 1751 ; Zarès deviendra Sardanapale, puis Ninus second.

vi Mahomet sera repris le 30 septembre. V* a fait circuler en 1745 une lettre où le pape disait qu'il avait pris plaisir à la lecture de Mahomet ; ce texte dont l'exactitude fut contestée ne sera pas démenti par le pape. Cf. lettre à d'Argenson du 16 juin 1745 et d'Argental du 9 octobre 1745.

vii Mahomet.

Les commentaires sont fermés.