28/08/2010
Je voudrais que tout homme public, quand il est près de faire une grosse sottise, se dît toujours à lui-même : l'Europe te regarde.
Et à plus forte raison quand c'est le monde entier qui vous regarde ![1]
Ce qui est clair et évident aux yeux de Volti, homme du XVIIIè, impatient mais réfléchi, vif mais profond, mordant mais magnanime, riche mais généreux ne semble pas du tout préoccuper un président (qui m'agace au point que je n'aime même pas écrire son nom ), Sarko ( ah ! je me fais du mal !), impatient et gribouille, vif et superficiel, mordant et revanchard, riche et profiteur .
Sarko & Co, quand ils sont près de faire de grosses bêtises, la font puis perdent leur temps à faire croire à leur génie, leur force .
Brasseurs de boue ! qu'elle vous retombe sur vos beaux costumes de corbeaux-croque-morts (que ces deux espèces me pardonnent ce triste rapprochement ;-) ) .
Au passage, je trouve ridicule et révélateur l'uniformisation des costumes des hommes politiques, tous en costar de banquiers, uniforme civil .
[1] NDLR : Volti a encore raison ( d'abord, il a toujours raison !! ).
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« A Jean Le Rond d'Alembert
28 auguste [1765]
Mon très cher et très vrai philosophe, je m'intéresse pour le moins autant à votre bien-être qu'à votre gloire ; car après tout, le vivre dans l'idée d'autrui ne vaut pas le vivre à l'aise. Je me flatte qu'on vous a enfin restitué votre pension qui est de droit.[i] C'était vous voler que ne vous la pas donner. Il y a des injustices dont on rougit bientôt. Celle qu'on faisait à la famille Calas de s'opposer au débit de son estampe était encore un vol manifeste.[ii] Une telle démarche a bien surpris les pays étrangers. Je voudrais que tout homme public, quand il est près de faire une grosse sottise, se dît toujours à lui-même : l'Europe te regarde.
Mlle Clairon a été reçue chez nous comme si Rousseau n'avait pas écrit contre les spectacles . Les excommunications de ce Père de l'Église n'ont eu aucune influence à Ferney.[iii] Il eût été à désirer pour l'honneur de ce saint homme si honnête et si conséquent qu'il n'eût pas déclaré, écrit et signé par devant un nommé Montmolin, son curé huguenot, qu'il ne demandait la communion que dans le ferme dessein d'écrire contre le livre abominable d'Helvétius [iv]. Vous voyez que ce n'est pas assez pour Jean-Jacques de se repentir, il pousse la vertu jusqu'à dénoncer ses complices et à poursuivre ses bienfaiteurs, car s'il avait renvoyé quelques louis à M. le duc d'Orléans il en avait reçu plusieurs d'Helvétius. C'est assurément le comble de la vertu chrétienne de se déshonorer, et d'être un coquin pour faire son salut.
Ce sont de tels philosophes qui ont rendu la philosophie odieuse et méprisable à la cour. C'est parce que Jean-Jacques a encore des partisans que les véritables philosophes ont des ennemis. On est indigné de voir dans le Dictionnaire encyclopédique une apostrophe à ce misérable [v] comme on en ferait une à Marc Antonin.
Ce ridicule suffit avec l'article Femme [vi] pour décrier un livre fût-il en vingt volumes in-folio? Comptez que je ne me suis pas trompé en mandant il y a longtemps que Rousseau ferait tort aux gens de bien.
Quand on a donné des éloges à ce polisson c'était alors qu'on offrait réellement une chandelle au diable.[vii]
Croyez, mon cher philosophe, que je ne donnerai jamais à aucun seigneur les éloges que j'ai prodigués à Mlle Clairon ; le mérite et la persécution sont mes cordons bleus, mais aussi vous êtes trop juste pour exiger que je rompe en visière à des personnes à qui j'ai les plus grandes obligations. Faut-il manquer à un homme qui nous a fait du bien parce qu'il est grand seigneur ?[viii] Je suis bien sûr que vous approuverez qu'on estime et qu'on méprise, qu'on aime ou qu'on haïsse très indépendamment des titres . Je vous aimerais, je vous louerais fussiez-vous pape, et tel que vous êtes je vous préfère à tous les papes, ce qui n'est pas coucher gros,[ix] mais je vous aime et vous révère plus que personne au monde. »
i Après la mort de Clairault le 17 mai, « l'Académie des sciences en corps » avait « demandé pension pour » d'Alembert ; mais on faisait des difficultés pour la lui verser ; V* soupçonnait Choiseul, et d'Alembert Saint-Florentin.
ii Il s'agit de l'estampe vendue par souscription au profit des Calas ; cf. lettre du 14 août à Grimm ; aux d'Argental, le 23 août : « vous craignez que cela ne déplaise à M. David et à huit conseillers de Toulouse » qui ont condamné Jean Calas. Mais dans sa lettre du 3 septembre à Végobre, il « espère que la démarche inattendue du parlement ne servira qu'à augmenter l'empressement du public. »
iii Cf. lettre à Grimm du 14 août.
iv Pas exactement ; Montmolin venait de publier dans sa Réfutation de la lettre à m*** relative à m. Rousseau, 1765, une lettre du 25 septembre 1762 ; il y disait que Rousseau lui avait dit qu'un des objets qu'il avait eus dans Émile était de « s'élever non pas précisément directement, mais pourtant assez clairement contre l'ouvrage infernal De l'esprit qui ... prétend que sentir et juger sont une seule et même chose, ce qui est évidemment établir le matérialisme », et de « foudroyer plusieurs de nos nouveaux philosophes qui ... sapent par les fondements et la religion naturelle et la religion révélée. »
v Dans l'article de l'Encyclopédie ; cf. lettres du 31 décembre et du 25 mars à Damilaville.
vi Cf. lettre du 13 novembre 1756 à d'Alembert sur cet article de Desmahis.
vii Allusion à un reproche de d'Alembert ; cf. lettre du 7 mars 1764 à Mme du Deffand.
viii V* veut parler de Choiseul que d'Alembert lui a déclaré ne pouvoir « ni aimer ni estimer » dans une lettre du 13 août.
ix = Miser gros.
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