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24/04/2015

Vous ne savez pas, madame, ce que c'est que d'être Français en pays étranger. On porte le fardeau de sa nation ; on l'entend continuellement maltraiter : cela est désagréable

... Dit François Hollande à Julie Gayet, qu'il a du mal à reconnaitre, au retour d'un de ses innombrables voyages présidentiels, en posant son casque .

A ce propos, je conçois parfaitement que notre Fanfoué ne puisse absolument pas sérieusement s'occuper des affaires intérieures nationales, il ne dispose , à mon avis , d'aucun temps de réflexion, en tournée à l'égal d'une pop star au sommet . Ses conseillers et ministres ont beau temps pour sortir toutes les idées possibles dont il devra se débrouiller , bien ou mal , souvent mal .

 

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« A Marie de Vichy de Chamrond, marquise du DEFFAND

25 avril [1760]

Je suis si touché de votre lettre 1, madame, que j'ai l'insolence de vous envoyer deux petits manuscrits très-indignes de vous 2 ; tant je compte sur vos bontés ! Lisez les vers quand vous serez dans un de ces moments de loisir où l'on s'amuserait d'un conte de Boccace ou de La Fontaine ; lisez la prose quand vous serez un peu de mauvaise humeur contre les misérables préjugés qui gouvernent le monde, et contre les fanatiques ; et, ensuite, jetez le paquet au feu. J'ai trouvé sous ma main ces deux sottises; il y a longtemps qu'elles sont faites, et elles n'en valent pas mieux.
Je n'ai jamais été moins mort que je le suis à présent. Je n'ai pas un moment de libre : les bœufs, les vaches, les moutons, les prairies, les bâtiments, les jardins, m'occupent le matin ; toute l'après-dînée est pour l'étude, et, après souper, on répète les pièces de théâtre qu'on joue dans ma petite salle de comédie.
Cette façon d'être donne envie de vivre ; mais j'en ai plus d'envie que jamais, depuis que vous daignez vous intéresser à moi avec tant de bonté. Vous avez raison, car, dans le fond, je suis un bon homme. Mes curés, mes vassaux, mes voisins, sont très contents de moi ; et il n'y a pas jusqu'aux fermiers généraux à qui je ne fasse entendre raison, quand j'ai quelques disputes avec eux sur les droits des frontières.
Je sais que la reine dit toujours que je suis un impie ; la reine a tort. Le roi de Prusse a bien plus grand tort de dire, dans son Épître au maréchal Keit 3 :
Allez, lâches chrétiens; que les feux éternels

Empêchent d'assouvir vos désirs criminels, etc.
Il ne faut dire d'injures à personne ; mais le plus grand tort est dans ceux qui ont trouvé le secret de ruiner la France en deux ans, dans une guerre auxiliaire.
J'ai reçu, ce matin, une lettre de change d'un banquier d'Allemagne sur M. de Montmartel. Les lettres de change sont numérotées, et vous remarquerez que mon numéro est le mille quarantième, à commencer du mois de janvier. Il est bien beau aux Français d'enrichir ainsi l'Allemagne.
Il me vient quelquefois des Anglais, des Russes ; tous s'accordent à se moquer de nous. Vous ne savez pas, madame, ce que c'est que d'être Français en pays étranger. On porte le fardeau de sa nation ; on l'entend continuellement maltraiter : cela est désagréable. On ressemble à celui qui voulait bien dire à sa femme qu'elle était une catin, mais qui ne voulait pas l'entendre dire aux autres.
Tâchez, madame, d'être payée de vos rentes, et de prendre en pitié toutes les misères dont vous êtes témoin. Accoutumez- vous à la disette des talents en tout genre, à l'esprit devenu commun, et au génie devenu rare : à une inondation de livres sur la guerre, pour être battus ; sur les finances, pour n'avoir pas un sou: sur la population, pour manquer de recrues et de cultivateurs, et sur tous les arts, pour ne réussir dans aucun.
Votre belle imagination, madame, et la bonne compagnie que vous avez chez vous, vous consoleront de tout cela : il ne s'agit, après tout, que de finir doucement sa carrière ; tout le reste est vanité des vanités, dit l'autre 4. Recevez mes tendres respects. »

2Ils ne parviennent apparemment pas à Mme du Deffand, si bien qu'on ne sait en quoi ils consistaient ; ce qu'en dit V* suggère des œuvres dans le genre de celles qu'on trouve dans les Contes de Guillaume Vadé . V* avait été touché de la réaction de Mme du Deffand à l'annonce de sa mort ; voir un passage de la lettre du 16 avril . Mais celle-ci ne reçut probablement pas la présente lettre , ce qui provoqua une rupture dans leur correspondance jusqu'au 5 juillet 1760 où elle en reprendra le fil : « Le président [Hénault] qui est aux Ormes chez M. d'Argenson, me mande qu'il vient de recevoir de vous une lettre charmante où […] vous vous plaignez de ce que je ne vous écris plus […] je vous boudais […] Vous ne répondez jamais [...] » ; voir page 445 : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k6514333b/f461.image.r=5%20juillet

4 Salomon, auteur de l'Ecclésiaste, 1, 2.

 

 

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