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24/10/2018

C’est à de vieux laboureurs comme moi qu’il faudrait des enfants ; un ambassadeur n’en a pas tant besoin . Ne pouvant en avoir par moi-même, j’en fais faire par d’autres

... Emmanuel Macron en dira-t-il de même sur ses vieux jours ?

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 https://www.youtube.com/watch?v=9nWs_5988DQ

 

 

« A Bernard-Louis Chauvelin

A Ferney , 3è novembre 1763

J’avais donc bien deviné, et vos deux Excellences doivent être fort contentes. Je me réjouis d’un bonheur que je ne connais qu’en idée 1. C’est à de vieux laboureurs comme moi qu’il faudrait des enfants ; un ambassadeur n’en a pas tant besoin. Ne pouvant en avoir par moi-même, j’en fais faire par d’autres ; Mlle Corneille, que j’ai mariée, va me rendre ce petit service, et me fera grand-père dans quelques mois.

Je voudrais bien, monsieur, avoir quelque chose de prêt pour amuser madame l’ambassadrice, lorsqu’elle sera quitte de toutes les suites de couche, et surtout de visites, de compliments. Je ne vous ai envoyé que  de l’histoire. Un Anglais, qui doit passer par Turin, vous aura sans doute remis un petit paquet . On fit partir il y a six semaines, par les muletiers, quelques volumes ; mais comme vous ne m’en avez jamais accusé la réception, je commence à douter que les muletiers aient été fidèles. On dit même qu’il y a dans Turin des gens plus infidèles que les muletiers qui saisissent tous les livres, sans respecter l’adresse . Mais je suis bien éloigné de croire qu’on ose ainsi violer le droit des gens. A tout hasard, ma ressource est dans les Anglais. Il y en a un qui part dans quinze jours, et qui vous apportera encore de la prose.

Toujours de la prose ! me direz-vous . Oui sans doute, car nous ne sommes pas en 1764. Et pourquoi attendre l’année 1764 ? C’est que les vers ne se font pas si aisément qu’on pense ; c’est qu’il faut du temps pour les corriger ; c’est qu’on pense ; c’est qu’il faut du temps pour les corriger ; c’est qu’on ambitionne extrêmement de vous plaire, et que, pour y réussir, on lime autant qu’on le peut son ouvrage. Pardonnez la lenteur aux vieillards, c’est leur apanage. Ne croyez point qu’on fasse des vers comme vous faites des enfants. Vous avez choisi pour vos ouvrages le plus beau sujet du monde. Il n’en est pas de même de moi ; je lutte contre les difficultés ; j’ai plus tôt planté mille arbres que je n’ai fait mille vers. Voilà mon papier fini, mes yeux refusent le service.

Mille tendres respects. »

 

 

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