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03/02/2019

Les Français ont actuellement l'estomac surchargé de mandements, de remontrances et d'opéra-comiques . Il faut laisser passer leur indigestion

... Et leur gueule de bois .

L'histoire est un éternel recommencement , et le XXIè siècle des Français est un bégaiement semblable au XVIIIè . Nos révolutionnaires en gilets jaunes, stylos rouges, et manifestants de toutes couleurs nous annoncent un printemps bigarré, après les casseurs en noir et les nuages des lacrymogènes . Reste à savoir si tout ça donnera un été fructueux .

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 What's new Pussycat ?

 http://www.informaction.info/iframe-1000-idees-recues-les...

 

 

« A Etienne-Noël Damilavile

27è janvier 1764 1

Les deux dernières lettres de mon cher frère sont charmantes . Elles me font voir combien les philosophes sont au-dessus des autres hommes . Il me semble que vous voyez les choses comme il les faut voir . Je vous remercie bien de l’exploit du marquis de Créquy2 ; voilà de tous les exploits qu'ont fait les Français depuis vingt ans, le meilleur assurément . Cela vaut mieux que tous les mandements que vous pourriez m'envoyer . Christophe à Sept Fonds aura l’air d'un martyr, et j'en suis fâché ; mais on se souviendra que, non sept-fonds, sed causa facit martirem 3.

Les mandements des autres évêques ne feront pas, je crois, un grand effet dans la nation, mais le rappel des commandants, le triomphe des parlements etc. sont une énigme dont je ne puis, ou n'ose deviner le mot . C'est le combat des éléments dont les yeux profanes ne peuvent découvrir le principe .

Je demeure toujours persuadé avec vous que ce temps-ci n'est pas propre à faire paraître le Traité sur la tolérance . Je n'en suis point l'auteur mais je m'intéressais, comme vous savez , à cet ouvrage, uniquement par principe d'humanité . Ce même principe me fait désirer que l'ouvrage ne paraisse point, c'est un mets qu'il ne faut présenter que quand on aura faim . Les Français ont actuellement l'estomac surchargé de mandements, de remontrances et d'opéra-comiques . Il faut laisser passer leur indigestion .

Vous avez dû, mon cher frère, recevoir dans mon dernier paquet , un petit billet pour frère Thieriot . S'il ne peut me trouver le livre que je lui demande, il n'y a qu'à s'adresser à Briasson . Ce Briasson m'envoie enfin mes estampes ; c'est à vous que j'en ai l'obligation . Ma santé est bien mauvaise . Je reprocherai bien à la nature de me faire mourir sana avoir vu mon cher frère . Recommandez-moi aux prières des fidèles .

Écr l'inf. »

1 L'édition de Kehl fait un amalgame de le lettre du 22 janvier avec celle ci : http://www.monsieurdevoltaire.com/2014/07/correspondance-annee-1764-partie-4.html

2 Dans l'article « Prières » des Questions sur l'Encyclopédie, V* cite un document selon lequel « M. le comte de Créquy-Canaples, surnommé Hugues au baptême », interdit à son curé de prier pour lui, pour la raison que les prières interféreraient avec la volonté de Dieu . C'est en cette année 1764 que Jean-Antoine de Créquy, baron de Frohard appelé le comte de Canaples, époux de Charlotte de Rohan, fut admis à la cour . Les deux faits ne sont peut-être pas sans corrélation .

3 Ce n'est pas sept fonds, mais la cause, qui fait le martyr . V* joue sur un aphorisme attribué à Tertullien, non poena, sed causa, facit martyrem (ce n'est pas le supplice, c'est la cause qui fait le martyre ), et qui était parfois appliqué à des missionnaires persécutés pour leur zèle apostolique .

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