21/03/2020
Ne doutez pas que je ne fasse ce que vous m'ordonnez
... A regret, certes, mais je le fais, et je compte les jours comme avant la quille . Je vous assure que j'arroserai ça avec des copains/copines et non avec cette sempiternelle et tristounette modération rabat-joie .
« A Paul-Claude Moultou
à Genève
[11 ou 12 janvier 1765] 1
Les lettres du vendredi, mon cher ami, arrivent je crois le même jour que celles du samedi . Ne doutez pas que je ne fasse ce que vous m'ordonnez . Vous connaissez le voyageur Dampier 2, il dit qu'il a traversé l'Amérique d'un bout à l'autre sans jamais rencontrer un seul sauvage qui trouvât mauvais qu'il fut de la religion anglicane . J'écrirai donc une seconde lettre, quoique je pense fermement que vous n'en avez pas besoin . J'avouerai votre turpitude, puisque vous le voulez ; mais pour vous rassurer je vous dirai que lorsque M. Carbon s'en retourna avec sa famille, je demandai un passeport à M. le maréchal de Richelieu qui m'envoya faire faire 3 avec mon passeport , et qui me dit que pourvu que ce M. Carbon n'ameutât point le peuple et ne priât point Dieu la baïonnette au bout du fusil, il serait le très bien venu . Il est aujourd'hui très tranquille et très heureux dans sa patrie ; et cependant il était violemment soupçonné d’être apôtre . Enfin, puisque vous le voulez je vais avouer votre apostolat . Allez, vous étiez fait pour être ministre d’État et non ministre d’Église .
Je vous embrasse bien tendrement . »
1 Cette lettre est postérieure à celle que V* dut écrire à Choiseul-Praslin le 11 janvier afin de solliciter un passeport pour Moultou et pour son père obligé d'aller à Montpellier pour se soigner , antérieure à celle du 12 janvier 1765 à d'Argental ; voir : http://www.monsieurdevoltaire.com/2014/09/correspondance-annee-1765-partie-2.html
2 Sur le voyage de Dampier, voir https://data.bnf.fr/fr/12321686/william_dampier/
3 Euphémisme encore en usage pour faire foutre .
00:10 | Lien permanent | Commentaires (0)
Les commentaires sont fermés.