31/05/2020
quand un prêtre ne peut plus dire la messe, ce n'est pas la peine d'avoir un autel
... Et quand on n'a plus de vacances, on n'a pas besoin d'hôtel .
https://verviers.lameuse.be/539290/article/2020-03-28/le-...
« A David-Louis Constant de Rebecque, seigneur d'Hermenches
[à monsieur le colonel
d'Hermenches chez monsieur le comte de Bezenval, Lieutenant-général
Inspecteur général des Suisses en son hôtel
à Paris ]
15è mars 1765 à Ferney
Je ne suis pas étonné , monsieur, que vous soyez content des Français . Vous êtes comme une belle qui se voit avec complaisance entourée de ses amants . Peut-être avez-vous perdu un peu du côté de l'intérêt, mais cela se regagne en agréments ; et d'ailleurs, il est bien difficile que vous ne soyez pas bientôt colonel en pied . Pour peu que vous voyiez M. le duc de Choiseul il connaîtra bien vite tout ce que vous valez ; il y a des gens pour qui l’ordre du tableau n'est pas fait .
Je suis extrêmement sensible à l’honneur du souvenir de M. de Bezenval . Je suis persuadé que son amitié pour vous a été le principal motif qui vous a fait donner la préférence à la France sur la Hollande . Voulez-vous bien avoir la bonté, monsieur, de lui présenter mes très humbles hommages ? Si M. le maréchal de Richelieu regrette mon petit théâtre de Ferney je le regrette bien aussi ; mais quand un prêtre ne peut plus dire la messe, ce n'est pas la peine d'avoir un autel . Je perds la vue, je n'ai plus de voix, je suis condamné à souffrir, j'entre dans ma soixante et douzième année, il n'y a plus moyen d’amuser des Genevois . D'ailleurs, Jean-Jacques Rousseau m'avait écrit que je corrompais sa république en donnant des spectacles 1; je n'ai pas voulu m'exposer plus longtemps aux excommunications de ce père de l’Église . Je ne fais donc plus de tragédie, ni n'en joue ; j'applaudis de loin au Siège de Calais, et au lieu d'un théâtre, je bâtis deux ailes au château de Ferney . Si jamais vous daignez en occuper une quand vous irez à Hermenches vous comblerez de joie et d'honneur toute ma petite famille, et surtout le vieux malade qui vous est dévoué avec la tendresse la plus respectueuse .
V. »
1 Lettre du 17 juin 1760 ; voir à ce propos la lettre du 23 juin 1760 à d'Alembert : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2015/06/28/je-voudrais-que-vous-ecrasassiez-l-infame-c-est-la-le-grand-5647116.html
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