10/12/2020
je suis fâché qu’au lieu d’en faire des prêtres vous n’en ayez pas fait des hommes
... Pan ! dans les dents .
« A Sébastien Dupont
Avocat au
Conseil souverain d'Alsace etc.
à Colmar
16 auguste 1765. 1
Mon cher ami, j’ai langui longtemps ; et je suis toujours étonné de vivre. Quand mes forces sont un peu revenues, Mlle Clairon est arrivée ; on a joué des tragédies sur mon petit théâtre de Ferney ; mon ermitage a été tout bouleversé. Je n’ai point écrit. Je réponds enfin à une ancienne lettre de vous, où vous me dites que vous mettez vos enfants dans l’Église. Je vous souhaite les biens de l’Église, à vous et à vos enfants ; mais je suis fâché qu’au lieu d’en faire des prêtres vous n’en ayez pas fait des hommes. La fortune force toujours nos inclinations. J’ai toujours le château de Montbéliard pour point de vue ; et vous pouvez être bien sur qu’une de mes plus grandes consolations sera de vous y voir.
L’impératrice de Russie a écrit une lettre charmante au neveu de l’abbé Bazin 2, et m’a chargé de la lui rendre. Elle a fait présent de quinze mille livres à M. Diderot, et de cinq mille livres à Mme Calas , le tout avec une politesse qui est au-dessus de ses dons. Vous voyez bien qu’elle n’a pas fait tuer son mari, et que jamais, nous autres philosophes, nous ne souffrirons pas 3 qu’on la calomnie. Bonsoir, mon cher ami. Mme Denis vous fait mille compliments ; frère Adam aussi.
Voltaire. »
1 Sur le manuscrit le mois est de la main de Wagnière et l'année de Dupont.
3 Mot qui manque dans toutes les éditions et qui est ajouté au dessus de la ligne sur le manuscrit (bien que ce soit boiteux avec le jamais précédent ).
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