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30/09/2021

Je suis tenté d'aller mourir dans une terre étrangère où les hommes soient moins injustes

... C'est une option qui ne me déplairait pas M. Sarkozy , et même vous pourriez vous faire accompagner par tous ceux qui vous comblent de leur amitié (intéressée ) , lèches-bottes d'une droite désespérante et à la traine . Profitez bien de la grasse retraite que nous vous payons pour régaler vos avocats " Ô ! plus grand des présidents ", et gros bisous . Entendez-vous se rapprocher le cliquetis des menottes , tricheur patenté ?

 

 

« A Etienne-Noël Damilaville

7 juillet 1766 1

Mon cher frère, mon cœur est flétri, je suis atterré 2. Je me doutais qu'on attribuerait la plus sotte et la plus effrénée démence à ceux qui ne prêchent que la sagesse et la pureté des mœurs . Je suis tenté d'aller mourir dans une terre étrangère 3 où les hommes soient moins injustes . Je me tais, j'ai trop à dire .

Je vous prie instamment de m'envoyer la lettre qu’on prétend que j'ai écrite à Jean-Jacques, et qu’assurément je n'ai point écrite 4.

Le temps se consume à confondre la calomnie . On vous demande bien pardon de vous charger de faire rendre tant de lettres . »

1 Copie contemporaine Darmstadt B. ; l'édition Correspondance littéraire , philosophique et critique de Grimm (C.L.) n'identifie pas le destinataire .

2 V* vient de recevoir la nouvelle de l’exécution de La Barre le 1er juillet 1766. Voir lettre du 16 juin 1766 à son neveu d'Hornoy : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2021/09/09/je-suis-tres-touche-du-sort-des-polyeuctes-et-des-nearques-que-les-velches.html

Parmi les livres trouvés chez le chevalier de La Barre se trouvait le Dictionnaire philosophique, qu’on mit sur le bûcher qui consuma ses restes ; voir l’avertissement du Beuchot : https://fr.wikisource.org/wiki/Dictionnaire_philosophique/Garnier_(1878)/Avertissement_de_Beuchot

3 Ce mot manque dans les éditions .

On attend beaucoup de la génération qui se forme . La jeunesse est instruite, elle n’arrive point aux dignités avec les préjugés de ses grands-pères

... Instruite, oui, plus ou moins, mais surtout diablement dissipée .

Pas de préjugés de grands-pères, mais des préjugés distribués larga manu par ces auto-proclamés "influenceurs. ceuses" et répercutés à l'infini par les réseaux dits sociaux .

Certains les voient paresseux, intolérants, égoïstes . C'est vrai, il y en a ; comment n'y en aurait-il pas avec les modèles tordus qu'on leur donne à la une : "vu à la télé/smartphone" donc important, à suivre . Et puis, j'ose espérer, une majorité qui est encore capable d'apprendre, et de créer pour leur bien et celui de tous, devenir modèles à leur tour . Pas des saints, juste des jeunes de bonne volonté , ça sera déjà pas mal .

 

 

 

« A Louise-Florence-Pétronille de Tardieu d'Esclavelles d'Epinay

6 juillet [1766] partira par Lyon je ne sais quand.

Je bénis la providence, ma respectable et chère philosophe, de ce que votre pupille va devenir tuteur 1 . S’il y a un corps qui ait besoin de philosophes, c’est assurément celui dans lequel il va entrer. Les philosophes ne rouent point les Calas, ils ne condamnent point à un supplice horrible 2 des insensés qu’il faut mettre aux petites-maisons. De quel front peut-on aller à Polyeucte après une pareille aventure ? Le tuteur, élevé par sa tutrice, sera digne de l’emploi auquel il se destine. On attend beaucoup de la génération qui se forme . La jeunesse est instruite, elle n’arrive point aux dignités avec les préjugés de ses grands-pères. J’ai, Dieu merci, un neveu 3 dans le même corps, qui a été élevé, et qui pense comme il faut penser. La lumière se communique de proche en proche ; il faut laisser mourir les vieux aveugles dans leurs ténèbres . La véritable science amène nécessairement la tolérance. On ne brûlerait pas aujourd’hui la maréchale d’Ancre comme sorcière, on ne ferait pas la Saint-Barthélemy ; mais nous sommes encore loin du but où nous devons tendre . Il faut espérer que nous l’atteindrons. Nous sommes, en bien des choses, les disciples des Anglais ; nous finirons par égaler nos maîtres.

Vous devez à présent, ma chère et respectable philosophe, jouir d’une santé brillante ; et moi, je dois être languissant : aussi suis-je, puisqu'Esculape est à Paris . Que vos bontés me soutiennent.

Permettez que je fasse les plus tendres compliments au tuteur.

V.

Tout notre petit ermitage est à vos pieds. »

1 Allusion à la prétention qu’avait le parlement de Paris de s’appeler tuteur des rois.

2 La condamnation du chevalier de La Barre et du chevalier d’Étallonde ; voir page 501 : https://fr.wikisource.org/wiki/Relation_de_la_mort_du_che... et voir page 513 .

3 L'abbé Mignot .