Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

21/01/2024

On souhaite d’être ignoré, mais c’est quand il n’est plus temps. Dès que les trompettes de la renommée ont corné le nom d’un pauvre homme, adieu son repos pour jamais

... C'est vrai éternellement, et le grand Georges Brassens nous le chante: https://www.youtube.com/watch?v=gWRzopyZBSA&ab_channe...

maxresdefault.jpg

 

 

 

« A Jean Capperonnier

1er Juin 1768 1

J’ai bientôt fait usage, monsieur, du livre de la Bibliothèque royale que vous avez eu la bonté de me prêter 2. Il a été d’un grand secours à un pauvre feu historiographe de France, tel que moi. Je voulais savoir si ce Montecuculo, que nous appelons mal à propos Montecuculli, accusé par des médecins ignorants d’avoir empoisonné le dauphin François, parce qu’il était chimiste, fut condamné par le Parlement ou par des commissaires ; ce que les historiens ne nous apprennent pas. Il se trouve qu’il fut condamné par le Conseil du roi. J’en suis fâché pour François Ier . La vérité est longtemps cachée ; il faut bien des peines pour la découvrir. Vous ne sauriez croire ce qu’il me coûte de soins pour la chercher à cent lieues dans le Siècle de Louis XIV et de Louis XV. Ce travail est rude. Il y a trois ans qu’il m’occupe et qu’il me tue, sans presque aucune diversion. Enfin il est fini. Jugez, monsieur, si je peux avoir eu le temps de faire toutes les maudites brochures qu’on débite continuellement sous mon nom. Je suis l’homme qui accoucha d’un œuf ; il en avait pondu cent avant la fin de la journée. Les nouvellistes de Paris ne sont pas si scrupuleux en fait d’historiettes que je le suis en fait d’histoire. Ils en débitent souvent sur mon compte, non seulement de très extraordinaires, mais de très dangereuses . C’est la destinée de quiconque a le malheur d’être un homme public. On souhaite d’être ignoré, mais c’est quand il n’est plus temps. Dès que les trompettes de la renommée ont corné le nom d’un pauvre homme, adieu son repos pour jamais.

J’ai l’honneur d’être avec la plus sensible reconnaissance pour toutes vos bontés,

monsieur,

votre très humble et très obéissant serviteur

Voltaire. »

1 Le destinataire n'est pas Jean-Augustin Capperonnier comme le pensait Beuchot, suivi par Moland, mais l'oncle de ce dernier, bibliothécaire de la Bibliothèque royale.

Écrire un commentaire