04/12/2013
Je ne cherche dans la terre de Ferney qu'un tombeau dans ma patrie
... Point de dépouille de Voltaire à Ferney, de toute façon il est immortel, ... et son esprit est partout .
« A Louis-Gaspard Fabry
Aux Délices près de Genève
6 novembre [1758]
Monsieur, j'ai eu l'honneur de voir monsieur votre frère à Ornex . Je lui ai témoigné combien j'étais affligé que ma mauvaise santé m'eût empêché de venir vous rendre mes devoirs . C'est tout ce que j'ai pu faire d 'aller chez M. de Boisy deux ou trois fois . Le régime où me tient M. Tronchin me condamne à des assujettissements bien tristes . Je ne cherche dans la terre de Ferney qu'un tombeau dans ma patrie .
On m'a parlé d'abord des lods et ventes de ce tombeau sur le pied du cinquantième denier, ensuite on m'a dit que c'était le huitième puis le sixième, et enfin le quart . J'écrivis d'abord à Mme la princesse de Conti . Elle m'a mandé qu'il n'était point du tout sûr que Mgr le comte de La Marche son petit-fils eût la seigneurie de Gex 1 dont dépend la terre de Ferney . J'écrivis en même temps à Mgr le comte de La Marche et à son intendant pour demander que la moitié des lods me fût remise , et je n'ai point encore eu de réponse .
J'eus l'honneur de vous écrire en ce temps-là mais j'étais fort peu instruit de tout ce que 2 on m'a remis le mémoire ci-joint que j'ai l'honneur de vous envoyer . Il peut servir ou auprès de Mgr le comte de La Marche ou auprès de celui qui sera possesseur de Gex . Il ne s'agit dans ce mémoire que des 2 tiers des lods que le seigneur dominant s'est réservé . Quant à votre tiers, monsieur, c'est un autre article sur lequel vous n'éprouverez de ma part que beaucoup d'envie de vous plaire , si je parviens à consommer entièrement cette affaire qui n'est pas sans difficultés et sans épines .
Si je peux coucher quelqu'un de ces jours chez M. de Boisy, j'irai avec beaucoup d'empressement à Gex vous demander vos lumières et vos bontés . Monsieur, votre frère m'a flatté que vous pourriez en attendant venir avec lui dans ma petite retraite dont je ne sors presque jamais , et où je dîne tous les jours à deux heures et demie . Je n'ose espérer que vos affaires vous permettent de faire ce voyage , mais je serais enchanté de vous recevoir et de vous dire avec quels sentiments j'ai l'honneur d'être,
monsieur,
votre très humble et très obéissant serviteur .
Voltaire . »
1 Louise-Elisabeth de Bourbon-Condé écrivait à V* le 23 octobre 1758 : « J'ai envoyé votre lettre , monsieur, à mon petit-fils qui est à l'armée mais je puis toujours vous y répondre qu'il ne peut rien dire à présent les affaires de la successsion n'étant pas décidées . Il ne sait si il aura la terre de Gex ou s'il ne l'aura pas . J'aurais été fort aise qu'il put faire ce que vous souhaitez . »
23:55 | Lien permanent | Commentaires (0)
Les commentaires sont fermés.