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30/11/2014

Je vois bien que le lieu où il est à présent est pour lui un petit théâtre.

... Un petit théâtre pour un petit homme, une UMP pour un Sarkozy, un théâtre de Guignols pour un Polichinelle ou un Gnaffron.

La version féminine est pour Marine Le Pen, un Front National qui veut se camoufler sous un nouveau nom, -si possible-, pour la tante d'une nièce aux dents longues .

Les acteurs sont heureux, ils n'ont aucun mal à apprendre leur texte, l'improvisation et le rabachage sont de mise, et ils sont bien payés . Sans moi !

 

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« A Ivan Ivanovitch SCHOUVALOW.
Aux Délices, 22 novembre 1759
Monsieur, j'ai reçu aujourd'hui le paquet dont vous m'avez honoré, par les mains de M. de Soltikof 1, qui me paraît de jour en jour plus digne de son nom et de vos bontés. Je peux assurer Votre Excellence que rien ne vous fera plus d'honneur que d'avoir développé ce mérite naissant. Vous avez la réputation de répandre des bienfaits ; mais vous ne pouviez jamais les placer ni sur une âme qui les méritât mieux, ni sur un cœur plus reconnaissant. Il se formera très-vite aux affaires, et vous aurez un jour en lui un homme capable de vous seconder dans toutes vos vues, de rendre votre patrie aussi supérieure par les arts qu'elle l'est par les armes. Je vois bien que le lieu où il est à présent est pour lui un petit théâtre. Votre Excellence le fera voyager en France, en Italie : je regretterai sa perte; mais tout ce qui sera de son avantage fera ma consolation.
Je me flatte, monsieur, que vous avez reçu à présent tout ce que vous avez permis que je vous envoyasse ; le premier volume de Pierre le Grand, un autre paquet assez gros de livres et de manuscrits, et une caisse d'eau de Colladon 2, que je ne vous ai présentée que comme un des meilleurs remèdes pour les maux d'estomac, aussi agréable à boire que l'eau des Barbades 3, et qui peut servir à vos amis dans l'occasion, car, pour vous, je sais que vous joignez à vos vertus celle d'être sobre. Votre Excellence m'honore de présents plus dignes d'elle et de sa cour. Je brave, avec vos belles fourrures, les neiges des Alpes, qui valent bien les vôtres. Un présent bien plus cher est celui des manuscrits que je reçois : ils me serviront beaucoup pour le second tome auquel je vais me mettre. Je n'ai point de temps à perdre. Mon âge et ma faible santé m'avertissent qu'il ne faut pas négliger un instant. Pierre le Grand mourut avant d'avoir achevé ses grandes entreprises ; son historien veut achever sa petite tâche.
Le catalogue de tous les livres écrits sur Pierre le Grand me servira peu, puisque, de tous les auteurs que ce catalogue indique, aucun ne fut conduit par vous. La triste fin du czarovitz 4 m'embarrasse un peu : je n'aime pas à parler contre ma conscience. L'arrêt de mort m'a toujours paru trop dur. Il y a beaucoup de royaumes où il n'eût pas été permis d'en user ainsi. Je ne vois dans le procès aucune conspiration ; je n'y aperçois que des espérances vagues, quelques paroles échappées au dépit, nul dessein formé, nul attentat. J'y vois un fils indigne de son père ; mais un fils ne mérite point la mort, à mon sens, pour avoir voyagé de son côté, tandis que son père voyageait du sien. Je tâcherai de me tirer de ce pas glissant, en faisant prévaloir, dans le cœur du czar, l'amour de la patrie sur les entrailles de père.
Je suis bien surpris de voir, dans les Mémoires que je parcours, ces mots-ci : « Les biens du monastère de la Trinité ne sont point immenses, ils ont deux cent mille roubles de rente. » En vérité, il est plaisant de faire vœu de pauvreté pour avoir tant d'argent ; les abus couvrent la face de la terre.
Quelques lettres de Pierre le Grand seront bien nécessaires ; il n'y a qu'à choisir les plus dignes de la postérité. Je demande instamment un précis des négociations avec Görtz et le cardinal Albéroni, et quelques pièces justificatives. Il est impossible de se passer de ces matériaux. Ayez la bonté, monsieur, de me les faire parvenir. Donnez-moi vite, et vous recevrez vite. Vous êtes cause que j'ai fait une tragédie, et que j'ai bâti un théâtre dans mon château, n'ayant rien à faire. J'en suis honteux; j'aurais mieux aimé travailler pour vous. J'aime mieux traiter l'histoire de votre héros que de mettre des héros imaginaires sur la scène. N'allez pas me réduire à m'amuser, quand je ne veux m'occuper qu'à vous servir. Regardez-moi comme votre secrétaire tendrement attaché.

V. »

1La lettre de Scouvalov est consevée ; voir lettre du 6 octobre 1759 à Schouvalov : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2014/10/25/la-vie-est-bien-courte-et-tout-ouvrage-est-bien-long-5475952.html

 

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