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29/09/2024

il n'a fait que m'inquiéter, et m'envoyer des billets et il me menace

... On n'entend plus que ça au Moyen-Orient entre chaque bombardement pour justifier ces massacres, car à ce stade ce sont bien des massacres quand tant de civils périssent, dommages collatéraux pour les uns, tueries ciblées pour les autres . Une tête vient de tomber, combien va-t-il falloir en couper pour éradiquer les terroristes ? Mal nécessaire ? https://www.lemonde.fr/international/article/2024/09/29/a...

 

 

 

« A Pierre Gros 1

François-Marie de Voltaire, gentilhomme ordinaire de la chambre du roi, seigneur de Ferney, etc., de soixante et quinze ans passés, étant d'une constitution très faible, s'étant traîné à l'église le jour du dimanche des Rameaux, malgré ses maladies, et ayant depuis ce jour essuyé plusieurs accès d'une fièvre violente, dont le sieur Biagroz 2, chirurgien a averti M. le curé de Ferney selon les lois du royaume ; et ledit malade se trouvant dans l'incapacité totale d'aller se confesser et communier à l'église pour l'édification de ses vassaux, comme il le doit et le désire, et pour celle des protestants dont ce pays est entouré, prie M. le curé de Ferney de faire en cette occasion tout ce que les ordonnances du roi et les arrêts des parlements commandent, conjointement avec les canons de la sainte Église catholique professée dans le royaume, religion dans laquelle ledit malade est né, a vécu et veut mourir, et dont il veut remplir tous les devoirs ainsi que ceux de sujet du roi, offrant de faire toutes les déclarations nécessaires, toutes protestations requises soit publiques soit particulières, se soumettant pleinement à tout ce qui est de règle, ne voulant omettre aucun de ses devoirs quel qu'il puisse être, invitant M. le curé de Ferney à remplir les siens avec la plus grande exactitude, tant pour l'édification des catholiques que des protestants qui sont dans l'enceinte de la maison dudit malade . La présente signée de sa main et de deux témoins, dont copie restée au château, signée aussi du malade et des deux mêmes témoins, l'original et une autre copie laissés entre les mains de mon dit sieur curé de Ferney par les deux témoins soussignés, sauf à le rendre authentiques par les mains de notaire si besoin est.

Le 30 mars 1769 à 10 heures du matin

Voltaire ; Bigex témoin ; Wagnière témoin. »

1 Copie contemporaine datée par erreur du 3 ; édition Longchamps- Wagnière ; Charles Rebord « Correspondance de Mgr Biord avec Voltaire », La Revue savoisienne, 1922, LXII, 22.

On trouvera aussi une lettre de Mgr Biord à Anthelme Castin, curé, relative à cette affaire dans l'édition Besterman . Mais les documents les plus intéressants sont ceux qui émanent du curé Gros ; le premier est la lettre écrite par lui au père capucin Claude Joseph le 30 mars, sans doute la matin :  « Mon révérend père,

Je fus hier chez M. de Voltaire où j'eus avec lui une grande conférence . Il est dans les dispositions de faire une rétractation de tout ce qu'il a fait de mauvais, et il me chargea de vous prier de vous donner la peine de descendre samedi prochain . Je puis vous assurer que cela sera très honorable et pour vous et pour moi […]  Gros, curé de Ferney . »

A cette lettre était jointe une « copie au net de profession de foi que M. de Voltaire a fait entre les mains de son confesseur et qu'il a réitéré publiquement avant la Communion. » : « Je crois en un seul Dieu en trois personnes, père, fils et saint-Esprit, réellement distinctes, ayant la même nature, la même divinité, la même puissance ; que la seconde personne s'est fait homme, s'appelle Jésus-Christ, mort pour le salut de tous les hommes, qu'il a établi la Sainte-Eglise à qui il appartient de juger du véritable sens des Saintes Écritures ; je condamne aussi toutes les hérésies que l’église a condamné et rejeté, toutes les interprétations et mauvais sens qu'on peut y donner .

C'est cette foi véritable et catholique hors de laquelle on ne peut être sauvé, que je professe et que je crois véritable ; je jure et promets et je m'engage de la professer avec le secours de Dieu. »

Alors qu'il avait entre les mains cette profession de foi, certainement authentique, le pauvre curé reçut la lettre de V* vers midi, ce qui lui inspira la missive suivante adressée à son supérieur Anthelme Castin : « Monsieur,

Comme c'est notre devoir de consulter nos supérieurs dans les choses qui regardent notre état, c'est avec confiance que je m'adresse à vous . Voici le fait, le sieur de Voltaire le mardi de la semaine sainte me fit demander chez lui, me disant qu'il avait la fièvre, et qu'il voulait qu'on lui portât le viatique . Je lui dis qu'il n’était pas malade pour exiger cela, il me répondit qu'il ne voulait encourir les peines de l’Église . Je lui répondis que s’étant présenté il ne pouvait pas les encourir, que d'ailleurs il devait se préparer aux sacrements par des dispositions qui ne lui étaient pas inconnues . Depuis ce temps-là il n'a fait que m'inquiéter, et m'envoyer des billets et il me menace du Parlement , et de l'infraction des ordonnances du roi . Vous trouverez ci-joint [sic] cela avec cette lettre qu'il m'a envoyée sur le midi . Je vous supplie de me marquer comment je dois agir et avoir la complaisance de le mettre tout au long sur le papier . Je suis bien fâché que mon infirmité me prive de l'honneur de vous aller rendre mes devoirs, vous priant d'être bien persuadé du parfait respect avec lequel j'ai l'honneur d'être, monsieur, votre très humble et très obéissant serviteur

Gros curé.

Ferney ce 30 mars 1769. »

On verra que le curé Gros n'était pas au bout des manœuvres, demi-aveux, demi-démentis, contre-démentis et autres ruses par lesquels son paroissien parvint à embrouiller inextricablement l'histoire de sa profession de foi .

2 Bergroz dans les deux éditions .

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