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18/05/2009

qu’il est aisé de se cacher dans la foule.

Grande satisfaction pour le château de Voltaire . Le parc va retrouver allure "peignée". Volti disait qu'il avait du "peigné et du sauvage", et depuis quelques semaines le bon sauvage qui aurait fait plaisir à Rousseau (le Jean-Jacques genevois) était maître des lieux : "ex-gazon", style prairie à foin sauvée par les fleurettes qui mettaient des taches de couleurs. Défense aux enfants d'y aller s'amuser, il aurait fallu l'hélicoptère pour aller les rechercher!!! J'exagère à peine ...

 

Voyez par vous même, quelques photos prises par un visiteur anonyme la semaine passée :  http://www.monsieurdevoltaire.com/article-31358201.html

 

 

Pour la première fois, j'ai eu le plaisir de voir des jardiniers et non pas de vulgaires conducteurs d'engins (bien sur, les plus gros possibles : petite cervelle, gros moteurs, comme ceux qui ont petites bi.... et grosses bagnoles !!!). Travail impeccable, odeur d'herbe coupée en non pas de fumée d'un quatre temps mal réglé... Ce qui ne gâte rien, sourires et politesse. Merci les gars...

 

 

 

 

 

« A Charles-Augustin Ferriol, comte d’Argental

Envoyé de Parme, en son hôtel, quai d’Orsay à Paris.

 

 

                            Quelque chose qui soit arrivée, et qui arrive, je ne veux pas mourir sans avoir la consolation d’avoir revu mes anges. Il n’y a que ma malheureuse santé qui puisse m’empêcher de faire un petit tour à Paris. Je n’ai affaire à aucun secrétaire d’État. Je ne suis point de l’ancien parlement. Il n’y avait qu’une petite tracasserie entre le défunt [Louis XV mort le 10 mai] et moi, tracasserie ignorée de la plus grande partie du public, tracasserie verbale qui ne laisse nulle trace après elle .Il me parait que je suis un malade qui peut prendre l’air partout sans ordonnance des médecins.

                           

                            Cependant je voudrais que la chose fût très secrète. Je pense qu’il est aisé de se cacher dans la foule. Il y aura tant de grandes cérémonies, tant de grandes tracasseries que personne ne s’avisera de penser à la mienne.

                            En un mot, il serait trop ridicule que Jean-Jacques le Genevois eût la permission de se promener dans la cour de l’archevêché, que Fréron pût aller voir jouer L’Écossaise, et moi que je ne pusse aller ni à la messe ni aux spectacles dans la ville où je suis né.

 

choiseul chateau_de_Chanteloup_-_1.jpg

                            Tout ce qui me fâche, c’est l’injustice de celui qui règne à Chanteloup [Choiseul, qui accuse V* d’ingratitude, parce qu’après sa disgrâce V* a fait l’éloge de Maupéou et sa réforme ; Mme du Deffand rassurera V*] , et qui doit régner bientôt dans Versailles. Non seulement je ne lui ai jamais manqué, mais j’ai toujours été pénétré pour lui de la reconnaissance la plus inaltérable. Devait-il me savoir mauvais gré d’avoir haï cordialement les assassins du chevalier de La Barre et les ennemis de la couronne ? Cette injustice encore une fois me désespère. J’ai quatre-vingts ans mais je suis avec M. de Chanteloup comme un amant de dix-huit ans quitté par sa maîtresse.

 

                            Quand vous jugerez à propos, mon cher ange, d’engager, de forcer votre ami et votre voisin M. de Praslin à présenter mon innocence, vous me rendrez la vie.

 

                            Je ne vous parle point de bruits qu’on fait déjà courir de l’ancien parlement qu’on rappelle, de monsieur le Chancelier qu’on renvoie. Je n’en crois pas un mot ; tout ce que je sais, c’est que je suis dévot à mes anges.

 

 

                            Voltaire

                            18 mai 1774. »

 

11/12/2008

coupe-jarrets ou bouchers ?

« A Marie-Jean-Antoine-Nicolas de Caritat, marquis de Condorcetcondorcet tableau couleur.jpg

 

Le voici enfin cet exécrable procès-verbal [sur le chevalier de La Barre et d’Etallonde]; le voici avec toutes se contradictions, ses imbécillités et ses noirceurs, accumulées par une cabale d’Hottentots  welches. Deux coquins suscitèrent ce procès horrible uniquement pour perdre Mme l’abbesse de Villancour, qui n’avait pas voulu coucher avec eux.

J’envoie aux deux Bertrands l’extrait fidèle des dépositions avec la réfutation en marge. Il faut espérer que la France se lavera de cet opprobre d’une façon  ou d’une autre.

Je donne avis à M. d’Hornoy que j’ai entre les mains la procédure. Je pense qu’il faut absolument purger la contumace, les cinq ans sont passés, on a besoin de lettres du Sceau, mais elles ne sont jamais refusées, c’est une chose de droit.

Il serait plus difficile de réhabiliter le chevalier de La Barre au parlement même. Jamais ces assassins ne voudront convenir qu’ils ont été des coupe-jarrets absurdes. On ne pourrait parvenir à cette réhabilitation qu’en cas que la famille obtint la révision à un autre tribunal.

Mais songez que la famille des de Thou n’a jamais  pu parvenir à faire revoir le procès de son parent juridiquement assassiné pour s’être conduit en honnête homme. [décapité avec Cinq-Mars sans avoir révélé le complot]

D’ailleurs je crois qu’il y a eu quelques profanations prouvées contre le chevalier de La Barre. Ainsi, tout ce qu’on pourrait obtenir serait une condamnation à une moindre peine ; à moins qu’on ne portât l’affaire à un tribunal tout à fait philosophe, ce qui n’arrivera pas sitôt.

Toute notre ressource est donc de purger la contumace d’Etallonde. Le succès me parait sûr, et fera le même effet que si on cassait le jugement rendu contre La Barre. Car le public croira avec raison que La Barre était aussi innocent que son camarade ; et en justifiant l’un, nous les justifions tous les deux.

Pour parvenir à cette justification, nous écartons un ou deux témoins des Hottentots d’Abbeville. Personne ne paraissant plus pour l’accuser, il sera en ce cas absous infailliblement, et il pourra même obtenir la permission de procéder contre ses accusateurs.

Voilà où nous en sommes. La générosité du grand-duc de Russie envers M. de La Harpe [qui en reçoit une pension] est une belle leçon pour nos Welches.

J’embrasse tendrement nos deux Ajax qui combattent vaillamment pour la cause des Grecs.

J’allais faire partir cette lettre par la voie indiquée, lorsque M. de Villevieille a eu la bonté de s’en charger. Alors je l’ai mis dans la confidence ; bien sûr qu’il nous gardera le secret et qu’il pourra même nous aider des ses bons offices. Son cœur est digne du vôtre.

Il faut encore que je vous dise, et que l’avocat sache qu’il y a dans la déposition de Moinel, page 2, que ledit Moinel avait entendu dire que d’Etallonde avait donné des coups de canne au crucifix du grand chemin. J’ai mis insulter pour ne pas effaroucher les Welches.

 

V.

11 décembre 1774 »

 

Voltaire fait encore du rentre-dedans contre les « coquins » qui mènent une justice diablement partiale,  malheureusement , dans cette affaire il n’aura pas gain de cause de son vivant : « Jamais ces assassins ne voudront convenir qu’ils ont été des coupe-jarrets absurdes », cri du cœur contre la peine de mort et ceux qui la décident !

Dans un autre domaine qui me touche de près, je serais heureux que le commissaire russe d’une exposition qui est prévue au château de Voltaire en 2010, en l’honneur des liens France – Russie, Voltaire et Catherine II ne nous oublie pas dans ses prières et ne fasse pas à notre propos de la procrastination (eh oui ! quand on m’énerve je trouve des grands mots à tirette ; à vos dicos mes amis !). Allez, je balance : le prénom commence par D et le nom finit par ov. N'insistez pas, il est très discret, mais je vous donnerai peut-être le lien qui vous permettra de le voir en interview avec une journaliste qui mérite le détour, si vous êtes sages ou si vous me le demandez ...

Allez, je mets mes raquettes et je vais faire chauffer la soupe.

Spécial pour Jacques : "Mais il est tard monsieur, il faut que je rentre chez moi !"