30/05/2012
de tous ceux qu'on a amusés, en est-il un seul qui daigne vous rendre le même service?
... Je ne sais si toi, Volti , qui est mort il y a tout juste 334 ans, t'amuses en voyant notre monde actuel, mais, bien que je t'aime, je ne veux pas avancer le moment où je pourrais te rendre ce service que tu nous offres encore .
Permets que je reste ton débiteur encore un peu !
A ton esprit éclatant Volti
Et une pensée particulière pour Mam'zelle Wagnière ...
« A M. LE COMTE D'ARGENTAL.
A Monrion, 26 février [1756]
Moi, vous avoir oublié, mon cher ange! Ah! cela est bien impossible! Il y a plus de trois semaines que j'envoyai à Mme de Fontaine le petit ouvrage 1 dont vous me parlez, pour vous être donné sur-le-champ. Si vous avez quelqu'un de la famille à gronder, c'est à Mme de Fontaine qu'il faut vous adresser. Je n'ai point reçu cette lettre où vous me chantiez pouilles; apparemment que vos gens, voyant que vous me grondiez, n'ont pas cru que la lettre fût pour moi. Je reçois très-régulièrement toutes celles qu'on m'écrit par M. Tronchin 2. Ne craignez point, mon cher ange, de m'écrire par cette voie. Il me semble qu'il faudrait faire à présent quelque tragédie maritime; on n'a encore représenté des héros que sur terre je ne vois pas pourquoi la mer a été oubliée. La scène serait sur un vaisseau de cent pièces de canon. Vous m'avouerez que l'unité de lieu y serait exactement observée, à moins que les héros ne se jetassent dans la mer. En vérité, je ne trouve rien de neuf sur la terre, ce sont toujours les mêmes passions, et des aventures qui se ressemblent. Le théâtre est épuisé, et moi aussi et puis, quand on s'est tué à travailler deux ans de suite à l'ouvrage le plus difficile que l'esprit humain puisse entreprendre, quelle en est la récompense? Les comédiens, daignent-ils seulement remercier du présent qu'on leur a fait?3 On amuse la cour deux heures; mais, de tous ceux qu'on a amusés, en est-il un seul qui daigne vous rendre le même service? La parodie nous tourne en ridicule; un Fréron nous déchire; voilà tout le fruit d'un travail qui abrège la vie. C'est à ce coup que vous m'allez bien gronder. Vous auriez tort, mon cher ange; ne voyez-vous pas que si mon sujet était arrangé à ma fantaisie, j'aurais déjà commencé les vers?
Mais quelle est donc la maladie de Mme d'Argental ? que veut donc dire son pied ? Si la comédie ne la guérit point, que pourra Fournier 4? Son état m'afflige sensiblement Quand vous irez à la Comédie, mon cher et respectable ami, faites, je vous prie, pour moi les remerciements les plus tendres à Gengis-kan 5. Il est vrai que je ne pouvais mieux me venger de l'auteur 6 de Mérope, opéra, qu'en vous en envoyant un petit échantillon. Je crois qu'à présent on doit trouver ses vers fort mauvais à Versailles. Je suis toujours attaché à Mme de Pompadour je lui dois de la reconnaissance, et j'espère qu'elle sera longtemps en état de faire du bien. Adieu, mon cher ange; je vous embrasse tendrement. »
4 Ou Fournié, médecin du duc d'Orléans. Médecin nommé dans la lettre du 13 janvier 1754 à d'Argental :
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