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07/08/2013

Les visites qu'on doit aux dames de quatre vingts ans ne peuvent guère être différées

 ... Et ce n'est pas Bernadette Chichi qui dira le contraire , sans chichis

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« A Charles-Augustin Ferriol, comte d'Argental

Aux Délices 21 avril 1758

Mon divin ange, j'avoue d'abord que l'envie de vous voir est très capable de me faire donner les conseils les plus intéressés . Je ferais des friponneries pour obtenir de vous un petit voyage aux Délices . Mais si je suis capable de ne pas écouter un si grand intérêt je vous dirai que le vôtre est assurément de faire un tour à Lyon . Soyez bien sûr que le confident vous servira comme vous méritez d'être servi . Mais votre présence fera bien mieux . Ce serait une façon bien simple , bien honnête de vous faire prier par Mme de Grolée de venir la voir . Je suis persuadé que le confident n'aura pas de peine à lui faire dire qu'elle en meurt d'envie , quoique à son âge on n'ait peut-être d'autre envie que celle de vivre .

Mais s'il lui reste quelque étincelle de bon goût, comment ne souhaiterait-elle pas très ardemment de vous avoir quelque temps auprès d'elle ? Je vous crois bien gauche, mon cher et respectable ami, quand il s'agit de mitonner un héritage, mais le confident 1 travaillera pour vous . Votre unique besogne est de plaire, et c'est à quoi vous réussissez le mieux que personne au monde sans même y songer . Le confident sera à Lyon au mois de mai . Plût à Dieu que vous y fussiez au mois d'août ! Voilà peut être une belle chimère, mais je ne connais point de vérité qui me fasse autant de plaisir qu'une si chère illusion . Et pourquoi serait-ce une chimère ? Vous sentez bien qu'il n'y a pas de temps à perdre . Les visites qu'on doit aux dames de quatre vingts ans ne peuvent guère être différées . C'est à Mme de Grolée à vous payer votre maison de l'île d'Aix puisque le gouvernement ne peut vous indemniser . Mme de Crêvecoeur 2 a eu vingt mille francs de pension pour épouser le fils de Mme de Lutzelbourg . Si on fait beaucoup de pareils arrangements, il ne reste pas de quoi payer les maisons brûlées . Il ne restera pas même de quoi empêcher qu'on en brûle d'autres s'il est vrai qu'on ait pris les vaisseaux de M. Duquesne 3 et si les affaires de terre sont aussi délabrées qu'on le dit . Cependant a-t-on joué La Fille d'Aristide ?4 A-t-on donné quelque belle tragédie nouvelle ? Recommence-t-on le travail de l'Encyclopédie ? D'Alembert se laisse-t-il fléchir ? Je voudrais bien savoir où l'on en est afin de m'arranger pour mes petits articles .

Mes respects à Mme d'Argental et à tous les anges .

V. »

1 Jean-Robert Tronchin qui en ce moment là était à Paris .

2 Charlotte-Catherine de Fargès, veuve de Louis-Sébastien Castel, marquis de Saint-Pierre-Crêvecoeur (mort en 1749) épousa effectivement le comte de Lutzelbourg ; sa fille deviendra plus tard l'épouse du président De Brosses .

3 Sans doute un des memebres de la famille de marins, peut-être Ange, appelé marquis Dusuesne-Menneville qui deviendra gouverneur du Canada .

4 Voir le lettre du 22 mars 1758 à Mme de Graffigny : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2013/07/19/s...

 

 

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