03/11/2013
Le monde est composé de mensonges, ou proférés ou manuscrits ou imprimés
... Aussi n'en ajouterai-je pas, dans toute la mesure du possible .
A l'heure qu'il est, je peux en toute honnêteté vous dire que le château de Voltaire prend ses quartiers d'hiver et qu'il me manque , tout autant qu'il manque à Mam'zelle Wagnière . Je compte bien que sa restauration et mise aux normes avance sans encombres et qu'il sera encore plus accueillant .
« A Pierre-Michel HENNIN.
Aux Délices, 25 septembre [1758].
partira quand pourra.
La lettre 1 dont vous m'honorez, monsieur, marque bien la bonté de votre cœur. Vous voulez bien vous souvenir d'un homme qui n'a d'autre mérite que d'avoir été infiniment sensible au vôtre, et vous avez rempli pour feu notre pauvre Patu des devoirs dont les amitiés ordinaires se dispensent. J'ignore si mes remerciements vous trouveront encore à Turin je présume que vous laissez partout votre adresse, et qu'on peut vous écrire en toute sûreté. Je vous demanderai en grâce de revoir mon ermitage, au retour de vos voyages mais c'est une chose que je désire plus que je ne l'espère. Vous me retrouverez aussi tranquille que vous m'avez laissé, et probablement je ne sortirai pas de chez moi pendant que vous courrez le monde. Vous reviendrez spoliis Orientis onustus 2. Personne n'a jamais mis plus à profit ses voyages, vous vous instruisez de tout, en attendant que vous soyez fixé par quelque poste agréable. I1 n'en est point dont vous ne soyez digne. Vous avez devant vous l'avenir le plus flatteur, vous joindrez toujours l'étude aux affaires, et par là votre vie sera continuellement et solidement occupée. Je ne connais point d'état préférable au vôtre. Il est d'autant plus agréable qu'il est de votre choix, et que le roi vous paye pour satisfaire votre goût.
Quid voveat dulci nutricula majus alumno?3
Vous aurez sans doute entendu dire, comme nous, de bien fausses nouvelles que les Russes ont battu le roi de Prusse, dans un second combat qui ne s'est point donné, et que les Anglais ont levé le siège de Louisbourg, dont ils sont en pleine possession. Le monde est composé de mensonges, ou proférés ou manuscrits ou imprimés. Mais une vérité sur laquelle vous pouvez compter, monsieur, c'est que vous êtes regretté partout où vous avez paru, et particulièrement dans l'ermitage de votre très-humble et obéissant serviteur.
Le vieux Suisse V. »
1 Du 17 septembre 1758, voir lettre du 5 septembre 1758 à Hennin : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2013/10/20/le-cure-etait-venu-l-oindre-sur-le-champ-et-craignait-beauco.html
23:55 | Lien permanent | Commentaires (2)
Commentaires
Oh oui, il me manque le château ... et vous aussi vous me manquez !
Bonne journée parisienne à vous.
Mam'zelle Wagnière.
Écrit par : lovevoltaire | 04/11/2013
Je m'amusais en lisant les ordres d'exil des grands personnages du XVIIIè qui déplaisaient au pouvoir royal, relégués dans leurs terres ou autres châteaux, et je me disais que la peine était bien légère (hors le fait de la contrainte) .
Aujourd'hui j'ai le même sentiment qu'eux et sens le manque de liberté . Mais bon, point de lettre de cachet ! Tout espoir est permis .
Avec mes affectueuses pensées
Écrit par : James | 04/11/2013
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