25/07/2014
vous nous avez sauvé de la petite honte de voir que les étrangers protestants, et ayant porté les armes contre le roi, puissent avoir des droits que les Français catholiques n'avaient pas
... J'adore cet homme, ce Volti quand il pousse le bouchon et se fiche de la tête des puissants avec toutes les apparences de la bienséance .
Bravo Volti de nous avoir sauvés de "la petite honte" de voir que l'on peut encore dans notre république, maltraiter, tuer qui que ce soit en fonction de son appartenance religieuse, rejeter tous ceux qui ne sont pas Français de France et catho si possible comme le prônent un certain nombre de bas du front .
NDLR - Voltaire dans sa grande sagesse laisse les hommes libres, libres de connaître la "petite mort" sans distinctions de croyances ; il n'y a pas de petits plaisirs à négliger .
Manifestations permises ou interdites, pour les Palestiniens, contre Israël, ou pour les Juifs et contre l'antisémitisme, beaucoup de bruit, de désordre, de conneries dites et faites et au bout du compte ni un Palestinien épargné, ni un Juif tranquille, du gâchis humain et matériel .
Tolérance où es-tu ?
Ici , pour ceux qui ont encore plus de deux neurones et ne se laissent pas embrigader sous n'importe quelle bannière de meneurs/semeurs de m..., prenez en de la graine et dîtes merci à Voltaire (et à Mam'zelle Wagnière) :
« Voltaire et Marie-Louise Denis
à
Dominique-Jacques Barberie, marquis de Courteilles 1
3è juin 1759 à Lausanne 2
Nous sommes très sensibles, monsieur, à la bonté que vous avez eue de vouloir bien vous prêter à nos justes demandes . Nous avons reçu le brevet du roi, et nous vous présentons nos très sincères remerciements ; vous nous avez sauvé de la petite honte de voir que les étrangers protestants, et ayant porté les armes contre le roi, puissent avoir des droits que les Français catholiques n'avaient pas ; ce qui vous 3 a touché encore plus, c'est qu'une telle grâce fait beaucoup de bien à un petit pays très malheureux et très pauvre , en donnant du prix à une terre qui sans cela n'en aurait eu aucun .
La terre de Tournay se trouve précisément dans le même cas ; M. de Brosses ne 4 l'a vendue très chèrement et fort au-delà de son prix que parce qu'il en a garanti tous les droits et toutes les franchises .
Il est vrai que de longtemps nous ne pourrons demeurer dans ces terres . Ce qu’on appelle le château de Tournay est une vilaine prison, ou plutôt un nid de hibou, qui malgré toutes les dépenses qu'on y fait n’est point logeable . C'est d'ailleurs un pays où l'on gèle au mois de juin . Le château de Ferney ne peut être achevé de longtemps ; ainsi, monsieur, nous sommes obligés de passer presque tout notre temps aux Délices sur le territoire de Genève . Vous savez que nous ne pouvons nous nourrir que de blé étranger, et que notre sol n'en porte Pas . Vous nous donnâtes il y a quelques années une permission de prendre soixante coupes de blé en France . Cette permission est encore à la maison de Délices, nous n'en avons fait usage qu'une ou deux fois , avec le commis des Bureaux, parce que nous avons toujours acheté notre froment de M. de Boisy, ancien seigneur de Ferney, et du fermier de M. de Brosses, et quand nous en avons acheté des jésuites nous n'avons écrit une carte aux commis que pour les instruire que le blé des jésuites était pour nous .
Nous enverrons aux commis la permission qui nous reste encore, nous la laisserons entre leurs mains, et elle pourra servir en partie à nous faire avoir le blé qui nous manque jusqu'à la récolte . Nous nous en remettons entièrement à vos bontés et aux convenances pour le blé de nos terres . Nous comptons n'en semer que ce qu'il faudra pour notre maison, et pour la nourriture d'environ soixante et dix domestiques, soit de campagne, soit autres . Le reste de nos terres sera destiné pour les pâturages afin d'entretenir les haras du roi dont nous nous sommes chargés à nos frais, sans recevoir aucun avantage, et sans avoir d'autres chevaux que les nôtres ; nous ne voulons que servir, et servir librement . Ce petit pays si délabré et si misérable a déjà changé de face ; il y a moins de misère et moins de maladies , les loups et les renards étaient le seul gibier du canton ; nous avons établi des gardes-chasse , que l'on ne connaissait pas avant nous ; et nous avons fait venir des œufs de perdrix de cent lieues 5 ; les dépenses sont immenses et la recette nulle, mais le plaisir de faire du bien est le plus grand des revenus . Si tous ceux qui ont des terres pensaient ainsi, le royaume serait peut-être encore plus florissant qu'il ne l'est . Nos efforts pourront mériter au défaut de nos succès, votre estime et votre bienveillance .
Nous ajoutons que nous avons fait deux semoirs qui coûtent chacun 400 livres . Ils labourent, sèment et recouvrent cinq rayons à la fois ; cette invention est chère, mais elle peut être d'une très grande utilité à tous les seigneurs qui voudront prendre le soin, trop négligé, de cultiver leurs terres .
Nous avons l'honneur d'être avec toute la reconnaissance possible, et toute l'envie de vous plaire,
monsieur,
vos très humbles et très obéissants serviteur et servante
Voltaire . Denis . »
2 Mentions sur le manuscrit : « R[eçu] le 10 juin 1759 », et minute de la réponse de Courteilles qui écrit notamment : « Je suis fort aise que vous preniez du goût pur le pauvre pays de Gex . Il a grand besoin de secours . Quand vous aurez besoin de grains, vous n'aurez qu'à vous adresser à M. Fabry et je lui envoierai un passeport . »
3 Pour nous, sans doute .
4 V* avait d'abord écrit me ; que dans la suite a été ajouté au-dessus de la ligne .
5 Oeufs envoyés par le duc de La Vallière , voir lettre à Jean-Robert Tronchin du 16 mai 1759 : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2014/06/30/je-veux-peupler-mes-terres-d-hommes-et-de-perdrix-5402179.html
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