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29/05/2016

Nièce, et Cornélie-chiffon, et V., vous disent tout ce qu’il y a de plus tendre

... Bonne fête MAMANS !

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N'oublions pas que le petit Voltaire perdit sa maman à sept ans .

 

 

« A Charles-Augustin Ferriol, comte d'Argental

Ferney 26 juin 1761

Je n’ai guère la force d’écrire, parce que, depuis quelque temps, j’écris jour et nuit. Mes anges sauront que je rends grâces au corsaire qui a fait imprimer Zulime. L’impression m’a fait apercevoir d’un défaut capital qui régnait dans cette pièce ; c’était l’uniformité des sentiments de l’héroïne, qui disait toujours j’aime : c’est un beau mot, mais il ne faut pas le répéter trop souvent ; il faut quelquefois dire, je hais. Je commence à être moins mécontent de cet ouvrage que je ne l’étais, et je me flatte enfin qu’il ne sera pas tout à fait indigne des bontés dont mes anges l’honorent. Il sera prêt quand ils l’ordonneront. Je n’abandonnerai pourtant ni les moissons, ni mon église, ni ma petite négociation avec le pape.

Je relis cet infâme et excommunié Corneille avec une grande attention. Je l’admire plus que jamais en voyant d’où il est parti. C’est un créateur ; il n’y a de gloire que pour ces gens-là ; nous ne sommes aujourd’hui que de petits écoliers. Je suis persuadé que mes notes au bas des pages des bonnes pièces de Corneille ne seront pas sans utilité et sans agrément ; elles pourront former une poétique complète, sans avoir l’insolence et l’ennui du ton dogmatique.

Je suis résolu à ne faire imprimer que le nombre des exemplaires pour lesquels on aura souscrit Les petites éditions seront au profit des libraires ; et s’il y a, comme je le crois, quelque amour de la véritable gloire dans la nation, la grande édition assurera quelque fortune aux héritiers du nom du grand Corneille. Je finirai ainsi ma carrière d’une manière honorable, et qui ne sera pas indigne de l’ancienne amitié dont mes anges m’honorent. Je les supplie de vouloir bien me procurer sans délai le nom de M. le duc d’Orléans par M. de Foncemagne, afin que je l’imprime dans le programme.

Je voudrais avoir celui de M. le premier président 1; il me le doit en dédommagement de la banqueroute que son beau-frère 2 m’a faite. Jamais mon entreprise ne vaudra au sang de Corneille la moitié de ce que Bernard m’a volé. Je crois avoir déjà prévenu M. le comte de Choiseul 3, l’ambassadeur, que je ne doutais pas qu’il n’honorât ma liste de son nom, et j’attends ses ordres. Je demande la même grâce à M. de Courteilles, à M. de Malesherbes , à madame sa sœur, et à tous les amis de mes anges.

Je désirerais passionnément la souscription du président de Meynières, et de quelques membres du parlement, pour expier les sottises de maître Le Dains et de maître Omer.

Je n’ai point encore écrit à M. le duc de Choiseul sur cette petite affaire. Je supplie M. le comte l’ambassadeur d’avoir la bonté de lui en parler : ils sont aussi tous deux mes anges. Je vous baise à tous le bout des ailes, et je recommande à vos bontés Cinna, Horace, Sévère, Cornélie 4, et la cousine issue de germaine de Cornélie. Si on me seconde avec quelque vivacité, cette édition ne sera qu’une affaire de six mois.

Nièce, et Cornélie-chiffon, et V., vous disent tout ce qu’il y a de plus tendre. »

3 Ambassadeur à Vienne, on n'a pas la lettre que V* lui adressa ?

4 On sait que Sévère et Cornélie sont respectivement des personnages de Polyeucte et de La Mort de Pompée ; il est significatif que V* préfère désigner la première de ces deux pièces par le nom du personnage qu'il admire plutôt que par celui de son véritable héros .

 

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