30/06/2009
A qui doit-on être attaché ? pour qui doit –on faire des vœux ? qui doit-on aimer ?
Je suis encore sous, ou plutôt sur, le coup de l'émotion qui ce 27 juin 2009 m'a accordé un plaisir rare . Fête à Voltaire au château de Voltaire à Ferney-Voltaire et dans la ville. A peine ouvert le portail à 14 h , déjà de nombreux visiteurs passent par la petite boutique-accueil . Une belle dame s'enqiert d'un certain James auprès de moi. Mon coeur ne peut faire plus qu'un mini bond : "je suis James et vous êtes loveVoltaire !" -"Oui"... Bonheur de mon côté, je la vois et je lui parle en vrai, celle dont j'admire le blog depuis quelque temps, et je ne suis pas le seul.
http://www.monsieurdevoltaire.com/
Vous voyez, je ne vous mens pas !
Elle me remet un conte de Volti illustré de photos . Je ne vous en donne pas le titre ; ça reste entre nous deux (ou plutôt trois, je le crois) , bande de curieux !
Plaisir de la guider dans ce château qu'elle mérite plus que tout autre de visiter, je vous l'assure !
Tristesse de ne pouvoir que lui faire un petit signe de la main lors de son départ .
Fan de Volti, oui et c'est peu de le dire.
Je dois l'avouer -même sans être torturé !- moi je suis fan de loveVoltaire .
Admirez son travail et celui de son "photographe préféré", les deux me laissent émerveillé. Beauté et qualité .
...Pour autant ne quittez pas mon blogounet de voltairien qui a encore beaucoup à apprendre !
Notre Volti , toujours capable de prouesse littéraires et épistolaires, ne nous déçoit pas ce 29 juin 1759.
« A Frédéric II, roi de Prusse
Sire,
J’appelle de César à César, et de Salomon à Salomon. Il me traite comme François Ier traita Charles Quint, un démenti par la gorge, dans ses lettres patentes de Hennesdorf 8 juin [lettre publiée comme étant du 20 juin (?), de Frédéric : « Si j’étais du temps de l’ancienne chevalerie, je vous aurais dit que vous en aviez menti par la gorge en avançant en public que je vous avais écrit pour défendre mon histoire de Brandebourg contre les sottises qu’en dit un abbé en ic ou en ac… »]. Mais César se souviendra que je lui demandai il y a longtemps la permission de réfuter le livre de l’évêque du Puy [Jean-Georges Lefranc de Pompignan] et de l’abbé de Caveirac, intitulé Apologie de la révocation de l’édit de Nantes dans lequel il s’en faut de beaucoup qu’on ait rendu à Votre Majesté la justice qu’on lui doit. Elle daigna m’écrire de Breslau le 21 mars, ces propres mots [quasiment]: vous pourrez ajouter une lettre selon votre bon plaisir, quoique je sois très indifférent sur ce qu’on peut dire de moi en France. On ne me fâchera pas quand on dira que vous êtes l’auteur de mon histoire de Brandebourg.
C’est sur cette permission expresse de Votre Majesté que j’ai réfuté une partie des calomnies de ce livre [dans une note ajoutée à l’Ode sur la mort se S.A.S. la princesse de Bareith, avec la phrase suivante : « je suis en droit… »]. Je suis en droit, ai-je dit, sur une lettre du roi de réfuter quelques mensonges imprimés.
Vous m’avez donné ce droit. J’en ai usé pour confondre ceux qui en effet ont menti par leur gorge, et qui, ont osé parler de votre personne avec une malignité très outrageante. Si vous lisiez ce livre, vous verriez que j’ai bien fait d’infirmer le témoignage de l’auteur. Vous me sauriez quelque gré de mon zèle. Vous reconnaitriez celui qui vous a été longtemps si dévoué et qui le sera toujours, celui qui brave vos ennemis quand il s’agit de rendre justice à vos grandes qualités.
A l’égard du prince votre frère, j’ai rapporté mot à mot à Votre Majesté la réponse de Tronchin sans y rien changer. Il ne sort plus de Genève. Il donne ses consultations, il en use précisément comme Borave [Boerhaave]. On va chez lui comme on allait à Épidaure ; les princes malades y viennent. Il n’approuve point du tout les eaux pour les maladies de poitrine, mais il exige le changement d’air, et il est très vrai qu’on n’en peut changer d’une manière plus utile qu’en venant auprès de lui. Devrais-je donc faire autre chose que vous dire exactement ce qu’il m’a répondu en vous envoyant son avis ? [Frédéric, écrivit sèchement le 10 juin à V*, très piqué de la réponse négative de Théodore Tronchin qui refuse d’aller soigner le prince Ferdinand et transmise par V*] et en quoi ai-je mérité vos reproches lorsque je me suis occupé de vous servir ? et quel rapport, je vous prie, de cette exactitude fidèle, avec roi mon maître et avec le ridicule des vieux ambassadeurs ? [V* a rappelé à Fréderic le 19 mai qu’il avait « été le dépositaire de toutes les tentatives faites pour parvenir à la paix » en particulier de celle qu’avait faite en 57-58 le cardinal de Tencin et la margravine de Bayreuth] et avec mes pauvres terres contribuables du Bien-Aimé ? Mes petites terres, je l’avouerai à Votre Majesté, ne sont point contribuables, elles sont sur la frontière de la France, mais elles ne payent rien du tout à la France. Elles en ressortissent et c’est ce qui causa les frayeurs de ma malheureuse nièce quand nous reçûmes à Ferney en France à une lieue des Délices votre gros paquet qui paraissait avoir été ouvert. Vous savez, Sire, qu’il contenait des choses que vous seul êtes en droit de dire [entre autre ces vers de Frédéric : « Je vois leur vil assemblage / Aussi vaillant au pillage / Que lâche dans les combats /…. Quoi votre faible monarque, / Jouet de la Pompadour, / Flétri par plus d’une marque / Des opprobres de l’amour … / Au hasard remet les rênes / De son empire aux abois … »], et qui auraient pu nous perdre. On ne m’appelle à la cour de France que le Prussien [Mme de Pompadour lui avait écrit le 14 juin : « …je n’ai pensé qu’à Voltaire français, et j’ai oublié qu’il avait été prussien, je l’oublie encore dans ce moment… »]. C’est un surnom dont je me glorifie. Mais vous entrez sans doute dans la situation d’une femme accoutumée à tout craindre. Elle n’a pas voulu qu’un monument si funeste subsistât. Je vous assure que ma vie n’eût pas été en sureté s’il eût été trouvé chez moi [bien qu’ayant affirmé à Frédéric que sa nièce avait brûlé cet écrit, il avait envoyé ce paquet au duc de Choiseul]. Que la générosité naturelle de votre cœur, que votre compassion épargne donc une femme qui n’a été que trop maltraitée [allusion au traitement et sévices de Francfort en juin 1753]. Pour moi, je ne désire dans ma douce retraite que la consolation de finir ma carrière avec l’idée d’être toujours dans les bonnes grâces du grand Fédéric [le roi signe : Fédéric]. Il sait que mon cœur ne peut perdre les sentiments de respect et d’admiration que j’ai pour lui.
V.
Encore un petit mot, soit que Votre Majesté ait donné bataille ou non, daignez résoudre le problème suivant. A qui doit-on être attaché ? pour qui doit –on faire des vœux ? qui doit-on aimer ?
Est-ce un roi philosophe, qui cultive nos arts, qui fait honneur à l’esprit humain, qui ne persécutera jamais personne pour sa religion, qui empêchera que les jésuites ne gouvernent la terre ? ou les puissances gouvernées par le révérend père Poignardini, et par le révérend père Aconiti ?
Ah ! héros à faire enrager qui voulez toujours avoir raison, si votre cœur !…
Mais je suis si vieux, et j’ai si mal aux yeux, que je ne me soucie plus de rien. Pas même de votre cœur, si pourtant… mais non… vous n’êtes qu’un grand homme pour tout potage, un génie universel, sans indulgence, un maudit héros qui n’avez jamais aimé l’imbécile.
V.
Aux Délices 29 juin 1759. »
Le même jour ce filou de Volti est capable d’écrire au comte d’Argental –sincèrement cette fois, je le crois, car il parle à un vrai ami- une lettre qui se termine par ces considérations : « M. le duc de Choiseul est donc parti et déjà près de Vienne [où il est ambassadeur]. Mais battra-t-on Luc ? C’est là le grand point. Il serait bien honteux de faire avec lui une paix qui serait pour lui un triomphe. »
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