10/01/2010
Nous aurons bientôt la médiation et la comédie , ce qui raccommodera tout.
"C'est comme ça qu'on aime ! Exactement ! ... "
http://video.google.fr/videoplay?docid=914129657018377759...#
Volti dans un exercice qui lui plait, endosser une fausse identité pour informer un ami . Juste pour le fun comme on dirait de nos jours, car à première vue ses propos de doivent pas encourir les foudres de la censure . Enfin, je crois ...
« A Etienne-Noël Damilaville
10 janvier 1766
Vous m’avez recommandé, monsieur, de vous envoyer les petites brochures innocentes qui paraissent à Neuchâtel et à Genève. En voici une que je vous dépêche [1]. Il serait à souhaiter que nous ne nous occupassions que de ces gaietés amusantes ; mais nos tracasseries toutes frivoles qu’elles sont nous attristent . M. de Voltaire, votre ami a fait longtemps tout ce qu’il a pu pour les apaiser ; mais il nous a dit qu’il ne lui convenait plus de s’en mêler quand nous avions un résident qui est aussi sage qu’aimable. Nous aurons bientôt la médiation et la comédie [2], ce qui raccommodera tout.
Le petit chapitre intitulé Du czar Pierre et de J.-J. Rousseau [3] est fait à l’occasion d’une impertinence de Jean-Jacques, qui a dit dans son Contrat insocial [4] que Pierre Ier n’avait point de génie, et que l’empire russe sera bientôt conquis infailliblement.
Le dialogue sur les Anciens et les Modernes [5] est une visite de Tullia, fille de Cicéron, à une marquise française. Tullia sort de la tragédie de Catilina [6] et est tout étonnée du rôle qu’on y fait jouer à son père. Elle est d’ailleurs fort contente de notre musique, de nos danses et de tous les arts de nouvelle invention et elle trouve que les Français ont beaucoup d’esprit, quoiqu’ils n’aient point de Cicéron.
J’ai écrit à M. Fauche [7]. Voilà, Monsieur, les seules choses dont je puisse vous rendre compte pour le présent. J’ai l’honneur d’être, Monsieur, votre très humble et très obéissant serviteur.
Boursier. »
1- Le Sentiment des citoyens, attribué à Voltaire, publié le 27 décembre 1764
2- Hennin ; sur les « tracasseries de Genève », voir lettres des 3 et 10 janvier à Damilaville et aux d’Argental.
3- Il sera inclus dans l’Opinion en alphabet sous le titre de « Pierre le Grand et J.-J. Rousseau ».
4- Contrat social.
5- Les Anciens et les Modernes ou la Toilette de Mme de Pompadour, paru dans les Nouveaux mélanges, 1765.
6- Tragédie de Crébillon.
7- Samuel Fauche, de Neuchâtel, qui semble avoir imprimé certaines des Questions sur les miracles de Voltaire.
Fi de la morosité !...
http://video.google.fr/videoplay?docid=914129657018377759...
14:55 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : voltaire, damilaville, boursier, rousseau, pompadour, genève, neuchatel
28/08/2009
pour mon siècle je n’attends que des vessies de cochon par le nez.
Nous aussi, nous attendons la décision de nos oracles pour la restauration de la chapelle -ex-église- batie par Volti . Suspense ! Nous prenons gentiment le chemin de la fin de saison . J'ai déjà un peu le blues !
http://www.youtube.com/watch?v=HCTJeT2i9QU
Il ne me reste que 8 journées de visites à faire ( plus une qui me tient à coeur, celle que je désire faire avec Mamzelle Wagnière qui plus que tout autre le mérite , mais chut : ).
« A Charles-Augustin Ferriol, comte d’Argental
et à
Jeanne Grâce Bosc du Bouchet, comtesse d’Argental
J’attends la décision de mes oracles, mais je les supplie de se rendre à mes justes raisons. Je viens de recevoir une lettre de Mme de Pompadour, pleine de bonté, mais dans ces bontés mêmes qui m’inspirent la reconnaissance, je vois que je lui dois écrire encore, et ne laisser aucune trace dans son esprit des fausses idées, que des personnes qui ne cherchent qu’à nuire ont pu lui donner. Soyez très convaincu, mon cher et respectable ami, que j’aurais commis la plus lourde faute et la plus irréparable, si je ne m’étais pas hâté d’informer Mme de Pompadour de mon travail [réponse à « une foudroyante lettre ( des d’Argental) du 17 » : « Il m’était impossible de faire secrètement Catilina dans cette cour-ci, et il eut été fort mal à moi de n’en pas instruire Mme de Pompadour … Je sais bien que je fais la guerre, et je la veux faire ouvertement »], et d’intéresser la justice et la candeur de son âme à tenir la balance égale [ elle protégeait Crébillon et son Catilina, tout en protégeant V*. Elle répondra à V* le 5 septembre « Je suis bien éloignée de penser que vous ayez rien fait contre Crébillon. C’est ainsi que vous, un talent que j’aime et que je respecte… » en ajoutant qu’elle l’a défendu.], et à ne plus souffrir qu’une cabale envenimée capable des plus noires calomnies se vantât d’avoir à sa tête la beauté et la vertu. C’est en un mot une démarche dont dépendait entièrement la tranquillité de ma vie. M’étant ainsi mis à l’abri de l’orage qui me menaçait, et m’étant abandonné avec une confiance nécessaire à l’équité et à la protection de Mme de Pompadour, vous sentez bien que je n’ai pu me dispenser d’instruire Mme la duchesse du Maine que j’ai fait ce Catilina qu’elle m’avait tant recommandé [le 14 août il lui a écrit : « Votre Altesse Sérénissime est obéie…Vous m’avez ordonné Catilina, et il est fait. La petite fille du Grand Condé avait raison d’être indignée de voir la farce monstrueuse du Catilina de Crébillon trouver des approbateurs. Jamais Rome n’avait été plus avilie, et jamais Paris plus ridicule… » Il décrivait ensuite la genèse et « le fond » de la pièce]. C’était elle qui m’en avait donné la première idée, longtemps rejetée, et je lui dois au moins l’hommage de la confidence. J’aurai besoin de sa protection, elle n’est pas à négliger. Mme la duchesse du Maine tant qu’elle vivra disposera de bien des voix et fera retentir la sienne. Je vous recommande plus que jamais le président Hénault [attaché à la cour de la reine]. J’ai lieu de compter sur son amitié et sur ses bons offices. Des amis qui ont quelque poids et qu’on met dans le secret font autant de bien qu’une lecture publique chez une caillette fait de mal. Je ne sais pas si je me trompe, mais je trouve Rome sauvée fort au dessus de Sémiramis. Tout le monde sans exception est ici de cet avis. J’attends le vôtre pour savoir ce que je dois penser.
J’ai vu aujourd’hui une centaine de vers du poème des Saisons de M. de Saint-Lambert. Il fait des vers aussi difficilement que Despréaux. Il les fait aussi bien, et à mon gré beaucoup plus agréables. J’ai là un terrible élève. J’espère que la postérité m’en remerciera, car pour mon siècle je n’attends que des vessies de cochon par le nez. Saint-Lambert par parenthèse ne met pas de comparaison entre Rome sauvée et Sémiramis. Savez-vous que c’est un homme qui trouve Électre [de Crébillon] détestable ? Il pense comme Boileau s’il écrit comme lui. Électre amoureuse ! et une Iphianasse, et un plat tyran, et une Clytemnestre qui n’est bonne qu’à tuer ! et des vers durs, et des vers d’églogue après des vers d’emphase ; et pour tout mérite un Palamède, homme inconnu dans la fable, et guère plus connu dans la pièce. Ma foi saint Lambert a raison. Cela ne vaut rien du tout. Si je peux réussir à venger Cicéron, mordieu, je vengerai Sophocle [il écrivit le 17 mars à Frédéric : « Vous aimez Radamiste et Electre. J’ai la même passion que vous, Sire, je regarde ces deux pièces comme des ouvrages vraiment tragiques malgré leurs défauts, malgré l’amour d’Itis et d’Iphianasse… malgré l’amour d’Arsame, malgré beaucoup de vers… Je me garderais bien de faire Radamiste et Electre. »].
Je ne vous dirai que dans quelques mois des nouvelles de votre Prussien [Baculard d’Arnaud (?) appelé à la cour de Frédéric], vous en aurez les raisons. J’espère que tout ira bien, mais il faut du temps.
Mme du Châtelet n’accouche encore que de problèmes. Bonsoir, bonsoir anges charmants. Comment se porte Mme d’Argental ?
V.
A Lunéville ce 28 août 1749.
Ma nièce doit vous prier de lui faire lire Catilina. Ma nièce est du métier, elle mérite vos bontés. »
Comment peut-on s'imaginer en voyant encore de gentils touristes, que l'automne vient d'arriver :
http://www.dailymotion.com/related/x2zlpj/video/x20fek_fe...
Chanson que les jeunettes , comme loveV, n'ont pas entendue à la radio (la TSF). O ! nostalgie !!
P.S. : du 31 : loveV, j'ai corrigé mon bug qui m'a fait afficher deux fois le même titre ; comme quoi, je suis un peu perturbé ...
18:13 | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : voltaire, argental, pompadour, maine, denis, saint lambert
30/06/2009
A qui doit-on être attaché ? pour qui doit –on faire des vœux ? qui doit-on aimer ?
Je suis encore sous, ou plutôt sur, le coup de l'émotion qui ce 27 juin 2009 m'a accordé un plaisir rare . Fête à Voltaire au château de Voltaire à Ferney-Voltaire et dans la ville. A peine ouvert le portail à 14 h , déjà de nombreux visiteurs passent par la petite boutique-accueil . Une belle dame s'enqiert d'un certain James auprès de moi. Mon coeur ne peut faire plus qu'un mini bond : "je suis James et vous êtes loveVoltaire !" -"Oui"... Bonheur de mon côté, je la vois et je lui parle en vrai, celle dont j'admire le blog depuis quelque temps, et je ne suis pas le seul.
http://www.monsieurdevoltaire.com/
Vous voyez, je ne vous mens pas !
Elle me remet un conte de Volti illustré de photos . Je ne vous en donne pas le titre ; ça reste entre nous deux (ou plutôt trois, je le crois) , bande de curieux !
Plaisir de la guider dans ce château qu'elle mérite plus que tout autre de visiter, je vous l'assure !
Tristesse de ne pouvoir que lui faire un petit signe de la main lors de son départ .
Fan de Volti, oui et c'est peu de le dire.
Je dois l'avouer -même sans être torturé !- moi je suis fan de loveVoltaire .
Admirez son travail et celui de son "photographe préféré", les deux me laissent émerveillé. Beauté et qualité .
...Pour autant ne quittez pas mon blogounet de voltairien qui a encore beaucoup à apprendre !
Notre Volti , toujours capable de prouesse littéraires et épistolaires, ne nous déçoit pas ce 29 juin 1759.
« A Frédéric II, roi de Prusse
Sire,
J’appelle de César à César, et de Salomon à Salomon. Il me traite comme François Ier traita Charles Quint, un démenti par la gorge, dans ses lettres patentes de Hennesdorf 8 juin [lettre publiée comme étant du 20 juin (?), de Frédéric : « Si j’étais du temps de l’ancienne chevalerie, je vous aurais dit que vous en aviez menti par la gorge en avançant en public que je vous avais écrit pour défendre mon histoire de Brandebourg contre les sottises qu’en dit un abbé en ic ou en ac… »]. Mais César se souviendra que je lui demandai il y a longtemps la permission de réfuter le livre de l’évêque du Puy [Jean-Georges Lefranc de Pompignan] et de l’abbé de Caveirac, intitulé Apologie de la révocation de l’édit de Nantes dans lequel il s’en faut de beaucoup qu’on ait rendu à Votre Majesté la justice qu’on lui doit. Elle daigna m’écrire de Breslau le 21 mars, ces propres mots [quasiment]: vous pourrez ajouter une lettre selon votre bon plaisir, quoique je sois très indifférent sur ce qu’on peut dire de moi en France. On ne me fâchera pas quand on dira que vous êtes l’auteur de mon histoire de Brandebourg.
C’est sur cette permission expresse de Votre Majesté que j’ai réfuté une partie des calomnies de ce livre [dans une note ajoutée à l’Ode sur la mort se S.A.S. la princesse de Bareith, avec la phrase suivante : « je suis en droit… »]. Je suis en droit, ai-je dit, sur une lettre du roi de réfuter quelques mensonges imprimés.
Vous m’avez donné ce droit. J’en ai usé pour confondre ceux qui en effet ont menti par leur gorge, et qui, ont osé parler de votre personne avec une malignité très outrageante. Si vous lisiez ce livre, vous verriez que j’ai bien fait d’infirmer le témoignage de l’auteur. Vous me sauriez quelque gré de mon zèle. Vous reconnaitriez celui qui vous a été longtemps si dévoué et qui le sera toujours, celui qui brave vos ennemis quand il s’agit de rendre justice à vos grandes qualités.
A l’égard du prince votre frère, j’ai rapporté mot à mot à Votre Majesté la réponse de Tronchin sans y rien changer. Il ne sort plus de Genève. Il donne ses consultations, il en use précisément comme Borave [Boerhaave]. On va chez lui comme on allait à Épidaure ; les princes malades y viennent. Il n’approuve point du tout les eaux pour les maladies de poitrine, mais il exige le changement d’air, et il est très vrai qu’on n’en peut changer d’une manière plus utile qu’en venant auprès de lui. Devrais-je donc faire autre chose que vous dire exactement ce qu’il m’a répondu en vous envoyant son avis ? [Frédéric, écrivit sèchement le 10 juin à V*, très piqué de la réponse négative de Théodore Tronchin qui refuse d’aller soigner le prince Ferdinand et transmise par V*] et en quoi ai-je mérité vos reproches lorsque je me suis occupé de vous servir ? et quel rapport, je vous prie, de cette exactitude fidèle, avec roi mon maître et avec le ridicule des vieux ambassadeurs ? [V* a rappelé à Fréderic le 19 mai qu’il avait « été le dépositaire de toutes les tentatives faites pour parvenir à la paix » en particulier de celle qu’avait faite en 57-58 le cardinal de Tencin et la margravine de Bayreuth] et avec mes pauvres terres contribuables du Bien-Aimé ? Mes petites terres, je l’avouerai à Votre Majesté, ne sont point contribuables, elles sont sur la frontière de la France, mais elles ne payent rien du tout à la France. Elles en ressortissent et c’est ce qui causa les frayeurs de ma malheureuse nièce quand nous reçûmes à Ferney en France à une lieue des Délices votre gros paquet qui paraissait avoir été ouvert. Vous savez, Sire, qu’il contenait des choses que vous seul êtes en droit de dire [entre autre ces vers de Frédéric : « Je vois leur vil assemblage / Aussi vaillant au pillage / Que lâche dans les combats /…. Quoi votre faible monarque, / Jouet de la Pompadour, / Flétri par plus d’une marque / Des opprobres de l’amour … / Au hasard remet les rênes / De son empire aux abois … »], et qui auraient pu nous perdre. On ne m’appelle à la cour de France que le Prussien [Mme de Pompadour lui avait écrit le 14 juin : « …je n’ai pensé qu’à Voltaire français, et j’ai oublié qu’il avait été prussien, je l’oublie encore dans ce moment… »]. C’est un surnom dont je me glorifie. Mais vous entrez sans doute dans la situation d’une femme accoutumée à tout craindre. Elle n’a pas voulu qu’un monument si funeste subsistât. Je vous assure que ma vie n’eût pas été en sureté s’il eût été trouvé chez moi [bien qu’ayant affirmé à Frédéric que sa nièce avait brûlé cet écrit, il avait envoyé ce paquet au duc de Choiseul]. Que la générosité naturelle de votre cœur, que votre compassion épargne donc une femme qui n’a été que trop maltraitée [allusion au traitement et sévices de Francfort en juin 1753]. Pour moi, je ne désire dans ma douce retraite que la consolation de finir ma carrière avec l’idée d’être toujours dans les bonnes grâces du grand Fédéric [le roi signe : Fédéric]. Il sait que mon cœur ne peut perdre les sentiments de respect et d’admiration que j’ai pour lui.
V.
Encore un petit mot, soit que Votre Majesté ait donné bataille ou non, daignez résoudre le problème suivant. A qui doit-on être attaché ? pour qui doit –on faire des vœux ? qui doit-on aimer ?
Est-ce un roi philosophe, qui cultive nos arts, qui fait honneur à l’esprit humain, qui ne persécutera jamais personne pour sa religion, qui empêchera que les jésuites ne gouvernent la terre ? ou les puissances gouvernées par le révérend père Poignardini, et par le révérend père Aconiti ?
Ah ! héros à faire enrager qui voulez toujours avoir raison, si votre cœur !…
Mais je suis si vieux, et j’ai si mal aux yeux, que je ne me soucie plus de rien. Pas même de votre cœur, si pourtant… mais non… vous n’êtes qu’un grand homme pour tout potage, un génie universel, sans indulgence, un maudit héros qui n’avez jamais aimé l’imbécile.
V.
Aux Délices 29 juin 1759. »
Le même jour ce filou de Volti est capable d’écrire au comte d’Argental –sincèrement cette fois, je le crois, car il parle à un vrai ami- une lettre qui se termine par ces considérations : « M. le duc de Choiseul est donc parti et déjà près de Vienne [où il est ambassadeur]. Mais battra-t-on Luc ? C’est là le grand point. Il serait bien honteux de faire avec lui une paix qui serait pour lui un triomphe. »
13:33 | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : voltaire, frédéric, pompadour, ferdinand, délices, lefranc
20/05/2009
Non, Madame, ce n’est pas le souper qui fait l’amitié
Ah qu'il est bon de commencer la journée avec un soleil radieux (je ne me force pas pour trouver des termes plus élogieux ) et une jolie femme encensée par un Volti-champagne (même s'il apprécie le tokai )...
« A Jeanne-Antoinette Poisson Le Normant d’Étioles, marquise de Pompadour
Sincère et tendre Pompadour,
Car je veux vous donner d’avance
Ce nom qui rime avec l’amour,
Et qui sera bientôt le plus beau nom de France,
Ce tokai dont Votre excellence
Dans Étioles me régala
N’a-t-il pas quelque ressemblance
Avec le roi qui le donna ?
Il est comme lui sans mélange,
Il unit comme lui la force et la douceur,
Plait aux yeux, enchante le cœur,
Fait du bien, et jamais ne change.
Le vin que m’apporta l’ambassadeur manchot du roi de Prusse (qui n’est pas manchot) derrière son tombereau d’Allemagne qu’il appelait carrosse, n’approche pas du tokai que vous m’avez fait boire. Il n’est pas juste que le vin d’un roi du Nord égale celui d’un roi de France, surtout depuis que le roi de Prusse a mis de l’eau dans son vin par sa paix de Breslau.
Dufresnay a dit dans une chanson que les rois ne se faisaient la guerre que parce qu’ils ne buvaient jamais ensemble. Il se trompe. François Ier avait soupé avec Charles Quint et vous savez ce qui s’ensuivit. Vous trouverez en remontant plus haut qu’Auguste avait fait cent soupers avec Antoine. Non, Madame, ce n’est pas le souper qui fait l’amitié.
Etc.
Voltaire
Mai-juin 1745. »
A+, le travail m'appelle. Je n'ose pas plaider la surdité, j'y vais et cède la place à ma vaillante Babeth sur cette bécane.
10:21 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : voltaire, pompadour, étioles
25/02/2009
Les miennes sont fanées, mes divins anges !
« A Jeanne-Grâce Bosc du Bouchet, comtesse d’Argental
J’ai acquitté votre lettre de change, Madame, le lendemain de sa réception, mais je crains de ne vous avoir payée qu’en mauvaise monnaie [vers demandés en l’honneur de Maurice de Saxe]. L’envie même de vous obéir ne m’a pu donner de génie. J’ai mon excuse dans le chagrin de savoir que votre santé va mal. Comptez que cela est bien capable de me glacer. Vous ne savez peut-être pas, M. d’Argental et vous, avec quelle passion je prends la liberté de vous aimer tous deux. Si j’avais été à Paris, vous auriez arrangé de vos mains la petite guirlande que vous m’avez ordonnée pour le héros de Flandre et des filles, et vous auriez donné à l’ouvrage la grâce convenable. Mais aussi pourquoi moi ? quand vous avez la grosse et brillante Babet [le futur cardinal de Bernis surnommé Babet la bouquetière] dont les fleurs sont si fraiches ? Les miennes sont fanées, mes divins anges ; et je deviens pour mon malheur plus raisonneur et plus historiographe que jamais. Mais enfin il y a remède à tout et Babet est là pour mettre quelques roses à la place de mes vieux pavots .Vous n’avez qu’à l’ordonner.
Mon prétendu exil [la reine se serait fâchée suite à un compliment adressé à Mme de Pompadour, et non comme il le prétend pour une lettre adressée à la dauphine ] serait bien doux ici si je n’étais pas trop loin de mes anges. En vérité ce séjour-ci est délicieux. C’est un château enchanté dont le maître fait les honneurs. Mme du Châtelet a trouvé le secret d’y jouer Issé [« Pastorale héroïque en musique » de Houdar de La Motte] trois fois sur un très beau théâtre et Issé a fort réussi. La troupe du roi m’a donné Mérope ; croiriez- vous, Madame, qu’on y a pleuré tout comme à Paris ? et moi qui vous parle je me suis oublié au point d’y pleurer comme un autre. On va tous les jours d’un palais dans un kiosque, ou d’un palais dans une cabane, et partout des fêtes, et de la liberté.
Mme du Châtelet qui joue aujourd’hui Issé en diamants vous fait mille compliments. Je ne sais pas si elle ne passera pas ici sa vie. Mais moi qui préfère la vie unie et les charmes de l’amitié à toutes les fêtes j’ai grande envie de revenir dans votre cour.
Si M. d’Argental voit Marmontel, il me fera le plus sensible plaisir de lui dire combien je suis touché de l’honneur qu’il me fait [dédicace de Denys le Tyran]. J’ai écrit à mon ami Marmontel il y a plus de dix jours pour le remercier. J’ai accepté tout franchement sans aucune modestie un honneur qui m’est très précieux, et qui à mon sens rejaillit sur les belles lettres. Je trouve cent fois plus convenable et plus beau de dédier son ouvrage à son ami et à son confrère qu’à un prince. Il y a longtemps que j’aurais dédié une tragédie à Crébillon, s’il avait été un homme comme un autre. C’est un monument élevé aux lettres et à l’amitié. Je compte que M. d’Argental approuvera cette démarche de Marmontel, et que même il l’y encouragera.
Adieu vous deux qui êtes pour moi si respectables et qui faites le charme de la société. Ne m’oubliez pas, je vous en conjure, auprès de monsieur votre frère ni auprès de M. de Choiseul et de vos amis. J’attends avec impatience le temps de vous faire ma cour.
Voltaire
A Lunéville ce 25 février 1748. »
10:57 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : voltaire, argental, bernis, pompadour
17/02/2009
ils sacrifient le genre humain à un seul homme
Vous avez peut-être remarqué que mes notes ne sont pas quotidiennes ! Pourquoi donc ceci-celà ? Flemmardise ? Non! Manque d'inspiration ? Non !! Manque de liaison Web ? Yes !! Aujourd'hui, fidèle à la RSR 1 (radio suisse romande) j'ai ouï une déclaration de ce gourou -coucou- de Séguéla (j'ai corrigé "Slégela" !) prenant la défense de Sarko qui arborait des montres à épater les minettes dans sa période bling-bling :"si à 50 ans on n'a pas une Rolex, c'est qu'on n'a pas réussi sa vie" !Eh bien moi, Monsieur, à 19 ans j'avais déjà un Solex !Et ça m'était bien plus utile pour aller à la fac qu'une Rolex qui pesait à ctte époque autant qu'un âne mort (un âne au bras ou un(e) bardot, c'est tout comme pour faire de l'épate ).
J'ai aussi une pensée émue (sniff!) pour les habitants de Guadeloupe, Martinique et Réunion qui sont en grève, manifestent contre la vie chère ! Je suis seulement ébahi qu'on s'en soit aperçu . De très mauvaises langues, dont la mienne, disent que vu le travail qu'ils font en temps ordinaire, ne rien faire laisse voir une maigre différence ! Advienne que pourra, mais comme dit JJ : "si tu veux têter, il faut pleurer !"
Ci-dessous, en voici un qui savait défendre son ouvrage en vérité, lui qui excellait dans l'art de la dissimulation pour la bonne cause, -cela va sans dire !.
« A Marie-Louise Denis, rue Traversière, près de la fontaine Richelieu à Paris
Je suis encore obligé, ma chère nièce, de vous importuner au sujet de ces impertinentes éditions d’une Histoire prétendue universelle qu’on a osé mettre sous mon nom. Mon indignation redouble tous les jours. Un des plus savants hommes de l’Europe, M. Vernet, professeur d’histoire à, Genève, que je vis il y a douze ans à Paris chez le cardinal de Polignac, et qui a conservé une copie du commencement de mon véritable ouvrage, me mande qu’il a vu avec horreur combien il est défiguré. L’insolent éditeur de Hollande [ Néaulme ] a mis dans l’introduction ces paroles : Les historiens, semblables en cela aux rois, sacrifient le genre humain à un seul homme ; et il y a dans mon manuscrit : Les historiens imitent en cela quelques tyrans dont ils parlent ; ils sacrifient le genre humain à un seul homme. Il y a cent passages aussi indignement falsifiés ; vous en avez la preuve dans le manuscrit qui est dans ma maison. Je ne puis trop répéter que je vous conjure de montrer ces différences essentielles à M. de Malesherbes. Tout le monde me doit la justice de concourir avec moi pour condamner l’insolence avec laquelle un éditeur de Hollande m’a imputé ses propres sottises, et pour me justifier dans l’esprit des honnêtes gens. J’écrivis il y a six semaines à M. de Malesherbes ces propres paroles : si M. de Malesherbes veut ajouter à ses bontés celle d’empêcher que cette partie de l’Histoire universelle imprimée en Hollande, n’entre en France, je lui aurai une nouvelle obligation.
Je vous écrivis trois lettres consécutives pour vous prier d’exiger cette grâce de M. de Malesherbes [en décembre 1753, le 11 déjà ]; vous étiez malade alors ; et ce fripon de libraire hollandais faisait déjà débiter son impertinent ouvrage à Paris où il l’avait apporté lui-même dans des ballots de toile. M. de Malesherbes ne put donc malgré ses soins empêcher que la France ainsi que l’Europe ne fut inondée de ce livre que j’ai condamné si hautement [ le 5 janvier, édition Duchesne, et le 17 il y a cinq éditions connues de Voltaire : France, Hollande, Genève, Leipzig ; il enverra des errata à Lambert et à Walther ] ; mais assurément sa probité courageuse doit l’engager à faire parvenir au roi mon innocence . On est bien fort quand on demande justice, et surtout quand cette justice se borne à faire reconnaître seulement la vérité. Je vous prie donc avec la plus vive instance de montrer cette lettre à M. de Malesherbes ; il peut parler fortement à M. le chancelier son père ; il peut parler à Mme de Pompadour. Ce n’est point ici une affaire qui demande des démarches délicates et des négociations ; il s’agit uniquement de dire la vérité, et de s’en tenir là. C’est ce que j’attends de votre amitié, et ce que je ne cesserai de vous demander. Je vous embrasse tendrement et je vous prie de m’écrire en droiture.
Je suis trop malade pour vous écrire de ma main.
Voltaire
Seconde lettre du 17 février 1754. »
19:28 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : voltaire, denis, malesherbes, vernet, polignac, histoire universelle, pompadour