14/11/2013
Je vous répète que les Français ne l'abandonneront pas . Elle est trop vertueuse et trop belle
... Mme Taubira ?
... Angela ?
S'il est question de vertu, on peut y croire . Quant à la beauté, elle est sûrement intérieure comme on le dit si bien .
Ces deux qualités sont-elles en trop dans les cas présents ?
« De Marie-Louise Denis et Voltaire
à Charlotte-Sophie von Altenburg, comtesse Bentinck
Aux Délices 5 [octobre 1758] au soir
Mon premier soin, madame, après avoir vu M. Grim a été d'envoyer chez le peintre pour le portrait de votre divine impératrice 1 . Il me les a apportés tous deux ce matin . Ma sœur 2 trouve toujours le premier meilleur que le second . Mon oncle et moi nous les trouvons bien tous les deux . M. Grim aurait pu s'en charger si le peintre n'avait encore exigé de les garder trois jours . Ainsi nous vous enverrons ces portraits par le carrosse de Genève qui arrive à Lausanne mercredi prochain 11 du courant . On les empaquettera dans une petite boite à votre adresse, et vous aurez la bonté , madame, d'ordonner qu'on aille prendre ce petit paquet à l'arrivée du carrosse à Lausanne .
Je vous promets aussi de faire travailler M. Huber 3, et de ne lui laisser ni paix ni trêve qu'il n'ait fait ce que vous lui demandez . J'ai écrit à Lyon pour vos dessus de souliers . Dès que je les aurai nous verrons où vous serez et comment on pourra vous les faire tenir .
Je ne songe point à votre départ, madame, sans une grande douleur . Pourquoi vous être montrée à nous si bonne, si spirituelle, si aimable pour disparaître si promptement . Vous emportez nos cœurs et vous ne nous laissez que des regrets . Nous parlons sans cesse de vous . Mon oncle vous respecte et vous aime . Il dit toujours qu'il faut que vous demeuriez en Suisse, que vous n'êtes pas assez philosophe, que c'est de toutes les vertus la seule qui vous manque . Il serait bien capable de vous la donner si vous voulez vous laisser endoctriner par lui . A propos de doctrine ce n'est point celle de M. Grim qui m'intéresse, c'est celle de M. Donop 4 que je veux combattre, c'est son âme qu'il faut sauver . Je voudrais le voir bon catholique aux pieds de votre incomparable impératrice . Je vous répète que les Français ne l'abandonneront pas . Elle est trop vertueuse et trop belle . Permettez- moi de ne pas croire un mot de votre nouvelle . Mais soyez bien sûre, madame, que mes sentiments pour vous sont inaltérables .
J'ai mille respects à vous offrir de toute notre maison, de celle de Mme Pictet et de toutes les personnes qui ont eu l'honneur de vous connaître ici .
Oui, madame, le vieux Suisse voudrait que vous n'eussiez ni besoin d'empereurs, ni goût pour les cours . Oui, vous êtes digne d'être philosophe, vous embelliriez nos climats, vous y introduiriez les grâces . Lausanne deviendrait une ville charmante, le lac Major ne tiendrait pas devant le lac de Genève, mais vous n'aimez que le Danube et leurs Sacrées Majestés . Allez donc , mais songez que vous ne serez jamais plus aimée chez les Marcomans 5 et chez les Abates que dans nos paisibles retraites .
V. »
4 Le général Donop, sans doute . Voir lettre du 16 février 1755 à Ruffey : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2011/12/01/tout-le-pays-ou-je-suis-s-est-empresse-a-me-donner-les-marqu.html
et du 2 juillet 1758 à Mme Denis : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2013/09/11/une-belle-terre-a-gouverner-est-une-chose-tres-amusante-5163.html
5 Les Marcomans habitaient la Bohème, et les Abates la Dacie . La mention de ces derniers est intéressante et fait penser à la fin du chapitre III de Candide qui est contemporain .
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