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03/02/2014

Oh! qui est-ce qui n'a pas d'esprit dans ce siècle? Mais du talent, du génie, où en trouve-t-on?

... Au XXIè siècle comme au XVIIIè, l'éternelle question demeure posée . Et ce ne sont pas des jurés avec buzzers qui apporteront une réponse juste ! C'est tout juste s'ils apporteront un maigre avis, pour faire bonne figure sur le petit écran , avec un enthousiasme de façade, histoire de faire croire à la venue d'un nouveau messie du show biz (show must go on ! ) .

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« A Louis-Elisabeth de La Vergne, comte de Tressan
Aux Délices, 12 janvier 1759.
Oui, il y a bien quarante ans, mon charmant gouverneur, que je vis cet enfant pour la première fois, je l'avoue ; mais avouez aussi que je prédis dès lors que cet enfant serait un des plus aimables hommes de France. Si on peut être quelque chose de plus, vous l'êtes encore. Vous cultivez les lettres et les sciences, vous les encouragez. Vous voilà parvenu au comble des honneurs, vous êtes à la tête de l'Académie de Nancy.
Franchement, vous pourriez vous passer d'académies, mais elles ne peuvent se passer de vous. Je regrette Formont, tout indifférent qu'était ce sage ; il était très-bon homme, mais il n'aimait pas assez . Mme de Graffigny 1 avait, je crois, le cœur plus sensible ; du moins les apparences étaient en sa faveur . Les voilà tous deux arrachés à la société dont ils faisaient les agréments. Mme du Deffant, devenue aveugle, n'est plus qu'une ombre. Le président Hénault n'est plus qu'à la reine; et vous, qui soutenez encore ce pauvre siècle, vous avez renoncé à Paris.
S'il est ainsi, que ferais-je dans ce pays-là? J'aurais voulu m'enterrer en Lorraine, puisque vous y êtes, et y arriver comme Triptolème, avec le semoir de M. de Châteauvieux 2. Il m'a paru que je ferais mieux de rester où je suis. J'ai combattu les sentiments de mon cœur ; mais, quand on jouit de la liberté, il ne faut pas hasarder de la perdre. J'ai augmenté cette liberté avec mes petits domaines; j'ai acheté la comté de Tournay, pays charmant qui est entre Genève et la France, qui ne paye rien au roi, et qui ne doit rien à Genève. J'ai trouvé le secret, que j'ai toujours cherché, d'être indépendant. Il n'y a au-dessus que le plaisir de vivre avec vous.
Les vers dont vous me parlez m'ont paru bien durs et bien faibles à la fois, et prodigieusement remplis d'amour-propre.
Cela n'est ni utile ni agréable. Des phrases, de l'esprit, voilà tout ce qu'on y trouve. Oh! qui est-ce qui n'a pas d'esprit dans ce siècle? Mais du talent, du génie, où en trouve-t-on? Quand on n'a que de l'esprit, avec l'envie de paraître, on fait 3 un mauvais livre. Que vous êtes supérieur à tous ces messieurs-là, et que je suis fâché contre les montagnes qui nous séparent !4
Mettez-moi, je vous en prie, aux pieds du roi de Pologne ; il fait du bien aux hommes tant qu'il peut. Le roi de Prusse fait plus de vers, et plus de mal au genre humain. Il me mandait l'autre jour que j'étais plus heureux que lui 5; vraiment, je le crois bien; mais vous manquez à mon bonheur. Mille tendres respects. »

1 Morte le 12 décembre 1758.Voir : http://fr.wikipedia.org/wiki/Fran%C3%A7oise_de_Graffigny

3 Suivi de à coup sûr sur le manuscrit n°2 et les éditions .

4 Ce paragraphe manquant dans l'édition de Kehl à la suite de la copie de Beaumarchais, a été restitué par Clogenson .

5 Sans doute la lettre de novembre 1758 : « De FRÉDÉRIC II, roi de PRUSSE

Novembre 1758.

Je ne mérite pas toutes les louanges que vous me donnez. Nous nous sommes retirés d'affaire par des à-peu-près; mais avec la multitude de monde auquel il faut nous opposer, il est presque impossible de faire davantage nous avons été vaincus, et nous pouvons dire, comme François 1er: Tout a été perdu, hors l'honneur [fors]. Vous avez grande raison de regretter le maréchal Keith; c'est une perte pour l'armée et pour la société. Daun avait saisi l'avantage d'une nuit qui laissait peu de place au courage; mais mal gré tout cela nous sommes encore debout, et nous nous préparons à de nouveaux avancements, peut-être que le Turc, plus chrétien que les puissances catholiques apostoliques, ne voudra pas que des brigands politiques se donnent les airs de conspirer contre un prince qu'ils ont offensé, et qui ne leur a rien fait. Vivez heureux, et priez Dieu pour les malheureux, apparemment damnés, parce qu'ils sont obligés de guerroyer toujours. Vale. FÉDÉRIC. »

Voir lettre de V* de décembre 1758 : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2013/12/28/temp-b555f79d76e7ae3fab3f34c1730ff826-5256908.html

 

 

 

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