21/06/2015
0 mon aimable, et ferme et gai, et ferme, et profond philosophe, il faut foutre les dames et les respecter.
... Voilà ce qui ne sera sans doute jamais proposé et encore moins adopté comme sujet de philosophie au bac ! Dommage !
Notons bien que sous une injonction d'une brutalité apparente/réelle on doit encore et toujours le respect aux dames, ce qui n'est que justice .
Encore et toujours, extraordinairement vivant, Voltaire !
Respect
« A Jean Le Rond d'ALEMBERT.
20 juin [1760].
Ma cousine Vadé me mande qu'elle a recouvré cet ouvrage moral 1 depuis trois mois, et que notre cousin Vadé étant mort au commencement de 1758, il ne pouvait parler de ce qui se passe en 1760; mais il en parlera par voie de prosopopée.
Je n'ai point vu le Mémoire de Pompignan. Thieriot m'abandonne, tirez-lui les oreilles.
M. Palissot dit que je l'approuve ! Qu'on aille chez M. d'Argental, il montrera ma lettre à lui adressée, en réponse de la comédie d'Aristophane, reliée en maroquin du Levant. Je ne puis publier cette lettre sans la permission de M. d'Argental; elle est naïve. Je pleure sur l'abbé Morellet et sur Jérusalem. 0 mon aimable,et ferme et gai, et ferme,2 et profond philosophe, il faut foutre 3 les dames et les respecter.
Je ne dis pas qu'il faille foutre Mme du Deffant; mais sachez qu'elle ne m'envoya jamais la lettre dont vous vous plaignez. Elle fit apparemment ses réflexions, ou peut-être vous lui lâchâtes [,,,] apparemment 4 quelque mot qui la fit rentrer en elle- même.
N'aurons-nous point l'histoire de la persécution contre les philosophes, un résumé des âneries de maître Joly, un détail des efforts de la cabale, un catalogue des calomnies, le tout avec les preuves? Ce serait là le coup de foudre; intérim ridendum.
Oui5, sans doute, le seigneur, le ministre dont il est question, a protégé Palissot et Fréron, et il me l'a mandé, et il les abandonnait, et il n'est pas homme à persécuter personne, et il pense comme il faut, quoique pædicaverit cum Freronio in collegio Clarimontis 6, et quoique Palissot soit le fils de son homme d'affaires; mais l'insulte faite à son amie mourante est le tombeau ouvert pour les frères. Ah! pauvres frères! les premiers fidèles se conduisaient mieux que vous. Patience, ne nous décourageons point ; Dieu nous aidera, si nous sommes unis et gais. Hérault disait un jour à un des frères : « Vous ne détruirez pas la rel,,, chrét,,,. — C'est ce que nous verrons », dit l'autre 7. »
1 Le Pauvre Diable. — La lettre à maître Abraham Chaumeix, qui précède cette satire, est signée Catherine Vadé.
Jean-Joseph Vadé était mort le 4 juillet 1757 . D'Alembert avait écrit le 16 juin 1760 : « J'ai grande envie de voir le petit poème dont vous me parlez . Je suis certain que feu Vadé a des héritiers auprès de Genève . Vous devriez bien vous adresser à eux pour me faire parvenir ce poème ,Mais s'il n'y a rien sur la pièce des Philosophes, on ne sera pas content de feu Vadé» (voir page 420 : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k6514333b/f434.texte.r=3764 )
2 V* a écrit un autre mot -illisible- au dessus de celui -ci .
3 Mot soigneusement biffé sur le manuscrit , ainsi qu'à la ligne suivante .
4 Ces quatre mots sont changés sur le manuscrit en ou peut-être vous lui achetâtes, peut-être par V* .
5 En attendant il faut rire .
6 [quoique] il ait prêché avec Fréron au collège de Clermont . Le collège de Louis-le-Grand (ou collège des jésuites) porta d'abord le nom de collège de Clermont.
7 C'est au lieutenant de police Hérault que Voltaire fit cette réponse. L'anecdote est rapportée, par Condorcet, dans sa Vie de Voltaire, mais il la tire sans doute de la présente lettre ,
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