27/07/2019
vous savez que l'édification des Français consiste à rire .... moins de nouvelles moins de sottises
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« A Etienne-Noël Damilaville
18 juin 1764 1
Mon cher frère, vous recevrez par frère Gabriel deux Meslier . On n' a pas eu le temps de faire le paquet plus gros parce qu'il allait partir . Mais quand ces deux sacrements ne serviraient qu'à sauver deux âmes, cela serait toujours fort honnête . Quand vous en voudrez et que je trouverai une occasion je vous en ferai tenir ; car il ne faut pas mettre la lampe sous le boisseau . Je vous réitère les grands pardons que je dois vous demander de vous avoir empêtré de tant de Corneille . Tout ira beaucoup plus vite en les faisant brocher . Voilà le temps où frère Thieriot se porte beaucoup mieux, et où ce petit exercice peut affermir sa santé . Je lui demande en grâce de vous aider dans cette distribution .
Vous me feriez plaisir de me faire avoir les bêtises de Fréron sur les Commentaires de Corneille . Figurez-vous que Panckoucke à communiqué à M. d'Aquin sa lettre et ma réponse . Ainsi , puisqu'elles sont connues, le droit des gens permet qu'on les imprime 2. Je crois même que la chose est nécessaire pour l'édification publique, et vous savez que l'édification des Français consiste à rire . Je crois ce temps-ci fort stérile en nouvelles . Je suis d’ailleurs toujours comme ce personnage de l’Écossaise 3 qui disait, moins de nouvelles moins de sottises . Portez-vous bien, mon cher frère, et surtout écr l'inf.
N.B. – On a fait de jolies éditions de la Tolérance à Liège et en Angleterre 4. »
1 L'édition de Kehl , suivant la copie Beaumarchais et suivie par les autres éditions, remplace la plus grande partie de cette lettre par des extraits des lettres du 20 juin 1764 et du 22 juin , le tout daté du 22 juin 1764 .Voir page 472 : https://books.google.fr/books?id=4oRJAAAAcAAJ&pg=PA473&lpg=PA473&dq=l%27%C3%A9cossaise+acte+II++sc%C3%A8ne+5&source=bl&ots=lmmzeBPQg5&sig=ACfU3U2kT5_C5q4SF3wdP9A8BJj6V9uQSQ&hl=fr&sa=X&ved=2ahUKEwibgtv_wtTjAhVDQhoKHS4QDaAQ6AEwAXoECAcQAQ#v=onepage&q=l'%C3%A9cossaise%20acte%20II%20%20sc%C3%A8ne%205&f=false
2 Ces lettres ne furent pas publiées dans L'Avant-Coureur mais on lit dans le numéro du 23 juillet 1764 une lettre de Panckoucke : « On vient d'imprimer , messieurs, et de publier une lettre adressée à M. de Voltaire qu'on m’attribue, avec une réponse de cet illustre écrivain . Je déclare que je ne suis point l'auteur de cette lettre, telle qu'elle est ; et j'en appelle au propre témoignage de M. de Voltaire, qui certainement n'a aucune part à cette publication . »
3 C'est Freeport, dans ac. II, sc. 5 : voir : https://fr.wikipedia.org/wiki/Le_Caf%C3%A9_ou_l%27%C3%89cossaise
4 Ces éditions ne sont pas connues, et une traduction anglaise a déjà paru .
09:13 | Lien permanent | Commentaires (0)
Je ne sais mes chers anges si j'aurai le temps de vous dire un mot touchant la lettre ci-jointe
... Réflexion faite : non !
« A Charles-Augustin Ferriol, comte d'Argental
et à Jeanne-Grâce Bosc du Bouchet, comtesse d'Argental
18 juin [1764]
Je ne sais mes chers anges si j'aurai le temps de vous dire un mot touchant la lettre ci-jointe . La poste va partir . Je viens d'écrire à M. Damilaville qui m'a envoyé la lettre de M. de Hulin 1. J'écris à M. de Hulin en conformité ; et je vous supplie de permettre que je vous adresse la lettre .
Je supplie instamment les sages qui travaillent à la Gazette littéraire de me garder toujours le plus profond secret 2. »
1 Jacques Hulin (1681-1774) est le représentant de Stanislas à Paris de 1737 à 1766 . Voir : Lettres inédites du roi Stanislas, duc de Lorraine et de Bar à Jacques Hulin, son ministre en cour de France (1733-1766)
2 Cette recommandation vise spécialement le compte rendu qu'avait fait V* de l'ouvrage de l'abbé Sade (voir lettre du 30 juin 1764 à d'Argental : http://www.monsieurdevoltaire.com/2014/08/correspondance-annee-1764-partie-22.html ) . Inutile de dire que le secret ne fut pas gardé, car, quelque temps après, un certain « abbé Berth …, chanoine de … à Paris » écrit à Sade : « J'ai vu aussi dans le temps M. l'abbé Arnaud, qui me communiqua la critique de l'Homère des Alpes . Je l'engageai à ne point la faire paraître, ou qu'il la modifiât s'il y était contraint par les ordres de la cour . C'est ce qu'il a fait comme vous avez dû voir dans la Gazette littéraire . Il faut avouer que cet habitant des Alpes est bien de mauvaise humeur . Il m'a toujours paru qu'il voudrait en mourant que tout le monde littéraire expirât avec lui . »
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