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08/04/2021

Je souhaite passionnément que les parlements puissent avoir le crédit de soutenir dans ce moment-ci les lois, la nation, et la vérité

... Sur le droit à l'euthanasie, et m... aux députés LR et leurs 2300 amendements d'opposition : https://actu.orange.fr/politique/euthanasie-debat-clive-e...

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« A Charles-Augustin Ferriol, comte d'Argental

et à

Jeanne-Grâce Bosc du Bouchet, comtesse d'Argental

14 décembre 1765

Mes anges, vous n’allez point à Fontainebleau, vous êtes fort sages ; ce séjour doit être fort malsain, et vous y seriez trop mal à votre aise. J’ai peur que la cour n’y reste tout l’hiver. J’ai peur aussi que vous n’ayez pas de grands plaisirs à Paris ; la maladie de M. le Dauphin doit porter partout la tristesse. Cependant voilà une comédie de Sedaine1 qui réussit et qui vous amuse . Celle de Genève ne finira pas sitôt ; je crois, entre nous, que le Conseil s’est trop flatté que M. le duc de Praslin lui donnerait raison en tout. Cette espérance l’a rendu plus difficile, et les citoyens en sont plus obstinés. J’ai préparé quelques voies d’accommodement sur deux articles ; mais le dernier surtout sera très-épineux, et demandera toute la sagacité de M. Hennin. Je lui remettrai mon mémoire2 et la consultation de votre avocat ; cet avocat me parait un homme d’un grand sens et d’un esprit plein de ressources. Si vous jugez à propos, mes divins anges, de me faire connaître à lui, et de lui dire combien je l’estime, vous me rendrez une exacte justice.

Je ne chercherai point à faire valoir mes petits services ni auprès des magistrats, ni auprès des citoyens ; c’est assez pour moi de les avoir fait dîner ensemble à deux lieues de Genève ; il faut que M. Hennin fasse le reste, et qu’il en ait tout l’honneur. Tout ce que je désire, c’est que M. le duc de Praslin me regarde comme un petit anti-Jean-Jacques, et comme un homme qui n’est pas venu apporter le glaive, mais la paix3. Cela est un peu contre la maxime de l’Évangile ; cependant cela est fort chrétien.

Vous ne sauriez croire, mes divins anges, à quel point je suis pénétré de toutes vos bontés. Vous me permettez de vous faire part de toutes mes idées, vous avez daigné vous intéresser à mon petit mémoire sur Genève, vous me ménagez la bienveillance de M. le duc de Praslin, vous avez la patience d’attendre que le petit ex-jésuite travaille à son ouvrage ; enfin votre indulgence me transporte. Je souhaite passionnément que les parlements puissent avoir le crédit de soutenir dans ce moment-ci les lois, la nation, et la vérité contre les prêtres ; ils ont eu des torts sans doute, mais il ne faut pas punir la France entière de leurs fautes. Vive l’impératrice de Russie ! vive Catherine, qui a réduit tout son clergé à ne vivre que de ses gages, et à ne pouvoir nuire !

Toute ma petite famille baise les ailes de mes anges comme moi-même.

V.»

1 Le Philosophe sans le savoir, comédie en cinq actes et en prose, jouée le 2 décembre 1765. Voir lettre du 22 novembre 1765 à Florian : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2021/03/18/je-ne-sais-si-les-spectacles-ont-cesse-a-paris-dans-la-crise-6304229.html

et : https://fr.wikipedia.org/wiki/Le_Philosophe_sans_le_savoir

3 C’est l’inverse de ce qu’on lit dans l'Evangile de Matthieu, X, 34 : « Non veni pacem mittere, sed gladium. » , https://saintebible.com/matthew/10-34.htm

J’ouvre une caisse, monsieur ; j’y vois, quoi ? moi-même en personne

... Rêve ou réalité ?

 

 

 

« A Charles Michel, marquis du Plessis-Villette

A Ferney, le 11 Décembre 1765 1.

J’ouvre une caisse, monsieur ; j’y vois, quoi ? moi-même en personne, dessiné d’une belle main 2. Je me souviens très bien que 

Ce Danzel 3, beau comme le jour,

Soutien de l’amoureux empire,

A, dans mon champêtre séjour,

Dessiné le maigre contour

D’un vieux visage à faire rire.

En vérité c’était l’amour

S’amusant à peindre un satyre

Avec les crayons de La Tour.

Il est vrai que dans l’estampe on me fait terriblement montrer les dents ; cela fera 4 soupçonner que j’en ai encore. Je dois au moins en avoir une contre vous de ce que vous avez passé tant de temps sans m’écrire. 

Bérénice disait à Titus :

 Voyez-moi plus souvent, et ne me donnez rien 5..

Je pourrais vous dire :

 Ecrivez-moi plus souvent, et ne me gravez 6 point .

Mais je suis si flatté de votre galanterie, que je ne peux me plaindre du burin.

Je remercie le peintre, et je pardonne au graveur. Mme Denis qui ne veut point que je montre ainsi les dents , joint ses remerciements aux miens 7. On prétend que vous avez des affaires et des procès ; qui terre n’a pas souvent a guerre, à plus forte raison qui terre a 8

.  .  .  .  .  .  .  .  .  .  . .  .  .  .  Dii tibi formam,

Dii tibi divitias dederunt, artemque fruendi 9.

Ajoutez-y surtout la santé, et ayez la bonté de m’en dire des nouvelles quand vous n’aurez rien à faire. L’absence ne m’empêchera jamais de m’intéresser à votre bien-être et 10 à vos plaisirs. Si vous êtes dans le tourbillon, vous me négligerez ; si vous en êtes dehors, vous vous souviendrez, monsieur, d’un des plus vrais amis que vous ayez. Vous l’avez dit dans vos vers 11, et je ne vous démentirai jamais.

Votre très humble ; etc. »

1Selon l'édition « Extrait d'une lettre de M. de Voltaire à M. le marquis de Villette », du Mercure de France, janvier 1766 ; L'édition suivante dans les Œuvres du marquis de Villette, 1782, présentes quelques variantes sans importance et sans autorité, dont une signalée . Les deux éditions omettent une phrase signalée aussi .

2 La seconde édition remplace ce mot par mortel.

3 Un dessin de Jérôme Danzel dont le Mercure de France de janvier , donne une lettre à La Place, relative à ce portrait, et où il est indiqué que l'estampe gravée est en vente chez « le sieur Auvray, rue Saint-Jacques, vis-à-vis Saint-Yves », au prix de 3 livres . Voir : http://www.pastellists.com/Articles/Danzel.pdf

et : https://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb415128429

A propos des dents de V*, voir la remarquable thèse de doctorat de Lucien Choudin : https://www.persee.fr/doc/dhs_0070-6760_1985_num_17_1_157...

et voir : https://www.bibliorare.com/wp-content/uploads/catalogue/p...

4 Le Mercure de France donne ferait . 

6 Les deux éditions donnent peignez pour gravez .

7 Cette phrase disparaît dans les deux éditions .

8 Variation sur le proverbe qui terre a, guerre a, que l'on trouve dans Le Pédant joué, Ac.II, sc. 2 de Cyrano de Bergerac : http://www.theatre-classique.fr/pages/programmes/edition.php?t=../documents/CYRANO_PEDANTJOUE.xml#A2.S22 ( Gareau « Dame, qui tare a, guare a. ») , et dans L'Amour médecin de Molière ; Ac. I, sc. 1 : http://moliere.huma-num.fr/base.php?L%27Amour_m%C3%A9decin

9 Horace, Épîtres, I, iv, 6-7 ( en transformant di en dii V* rend les deux vers faux ): Les dieux t'ont donné la beauté/ les dieux t'ont donné les richesses, et l'art d'en jouir . Voir http://www.perseus.tufts.edu/hopper/text?doc=Perseus%3Atext%3A2008.01.0539%3Abook%3D1%3Apoem%3D4

10 Le Mercure de France omet votre bien-être et . À l'époque le mot bien-être est souvent encore utilisé au sens de bonheur qui à l'époque classique signifiait « heureuse chance. »

11 Mis au bas du portrait : 

Ses talents l’ont déifié,
L’Europe moderne l’honora ;
Jadis à ses autels elle eût sacrifié.
Ce qui flatte mon cœur, et m’est plus cher encore,
Il eut pour moi de l’amitié.

Peut-être que la petite sauge avec un peu de lait vous ferait beaucoup de bien. Les aliments et les boissons qui servent de remèdes ont seuls prolongé ma vie, et je ne connais point de médecin supérieur à l’expérience

... Cinq fruits et légumes par jour : OK ? Comme le raisin n'est pas de saison, je me contente de son jus fermenté communément appelé vin .

En plus Astrazeneca ?  oui, pour les plus costauds . Et quelle plante pour éviter les caillots/thrombus ?  Le saule et son Aspirine ? Pourquoi pas  la berberine (j'aime beaucoup ce nom qui a un côté chantant ), -et pas seulement pour les végans- : https://www.santescience.fr/berberine/

Epine-vinette : plantation, taille et conseils d'entretien

Epine vinette : joli nom, jolie, non ?

  

« A Etienne-Noël Damilaville

A Ferney , 9 décembre 1765

Mon cher ami, ma lettre doit commencer d’une façon toute contraire aux épîtres familières de Cicéron 1 ; et je dois vous dire : si vous vous portez mal j’en suis très affligé . Pour moi, je me porte mal. La différence entre nous, c’est que vous êtes un jeune chêne qui essuyez une tempête, et que moi je suis un vieux arbre qui n’a plus de racines. Tronchin ne guérira ni vous ni moi. Vous vous guérirez tout seul par votre régime : c’est là la vraie médecine dans tous les cas ordinaires. Il se peut pourtant que votre grosseur à la gorge n’ayant pas suppuré, l’humeur ait reflué dans le sang : en ce cas, vous seriez obligé de joindre à votre régime quelques détersifs 2 légers. Peut-être que la petite sauge avec un peu de lait vous ferait beaucoup de bien. Les aliments et les boissons qui servent de remèdes ont seuls prolongé ma vie, et je ne connais point de médecin supérieur à l’expérience.

Je fais bien des vœux pour que notre cher Beaumont trouve l’exemple qu’il cherche. Il fera sûrement triompher l’innocence des Sirven comme celle des Calas.

On dit qu’il s’est déjà présenté soixante personnes pour remplir le nouveau parlement de Bretagne ; en ce cas, c’est une affaire finie, et la paix ne sera plus troublée dans cette partie du royaume. Je me flatte qu’elle régnera aussi dans notre voisinage : il n’y a pas eu la moindre ombre de tumulte, et il n’y en aura point. Vous pouvez être sûr que tout ce qu’on vous dit est sans fondement.

Rien n’est plus ridicule que l’idée que vous dites qu’on s’est faite de ce pauvre père Adam ; il me dit la messe et joue aux échecs : voilà, en vérité, les deux seules choses dont il se mêle. Il ne connaît pas un seul Genevois, il ne va jamais à la ville. J’ai eu le bonheur de plaire aux magistrats et aux citoyens, en tâchant de les rapprocher, en leur donnant de bons dîners, en leur faisant l’éloge de la concorde et de leur ville.

M. Hennin, qui arrive incessamment, trouvera les voies de la pacification préparées, et achèvera l’ouvrage. J’ai joué le seul rôle qui me convînt, sans faire aucune démarche, recevant tout le monde chez moi avec politesse, et ne donnant sur moi aucune prise. M. d’Argental sait bien que telle a été ma conduite . M. le duc de Praslin en est instruit . Je laisse parler les gens qui ne le sont point. Je sais bien qu’il faut que dans Paris on dise des sottises ; il y a cinquante ans que je suis en butte à la calomnie, et elle ne finira qu’avec moi. Je m’y suis accoutumé comme aux indigestions.

Digérez, mon cher ami, et mandez-moi, je vous en conjure, des nouvelles de votre santé. »

1 Cicéron dit : « Si vales, bene est ; ego valeo. » ; « si tu va bien, c'est bien; quant a moi, je vais bien »

2 Détersif était employé en médecine comme équivalent de détergent ; dans Le Malade Imaginaire ,et Monsieur de Pourceaugnac, on trouve « un bon clystère détersif » : http://moliere.huma-num.fr/base.php?Un_petit_clyst%C3%A8re