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15/05/2022

qui sole mange, sole lui vient

... Qui a besoin d'un.e premier.e ministre, premier.e ministre lui vient !

 

 

« A Jean-François-René Tabareau, directeur des postes à Lyon

Mardi au soir 20è janvier 1767 à Ferney

Nous vous avons, monsieur, l'obligation d'avoir satisfait parfaitement le goût d'un des sept péchés mortels . Notre gourmandise vous remercie très sensiblement de vos soles qui étaient aussi fraiches que si nous les avions mangées à Marseille . Je suis honteux des offres que vous voulez bien me faire . Plus j'en ai de reconnaissance, plus je crains d'en abuser, mais si vous avez quelque commissionnaire à qui vous vouliez bien me recommander nous profiterions de vos bontés Mme Denis et moi, jusqu'au point de vous envoyer quelquefois une petite liste de nos nécessités . Nous aurions en cela le plaisir d'obéir aux ordres du roi qui a défendu tout commerce entre la France et Genève . Entourés que nous sommes de neiges et de soldats, nous ignorons dans notre retraite si les voitures publiques de Lyon vont à Genève ; en cas qu'on ne pût se servir de cette voie,nous vous supplierions de permettre que votre courrier se chargeât jusqu'à Meyrin de quelques petits paquets, supposé qu'il fasse le voyage en voiture .

J'en étais là, monsieur, lorsque l'on nous apporte de votre part une alose et deux soles ; les chartreux de Ripaille 1 ne font pas si bonne chère que nous, et c'est beaucoup dire . Le proverbe ne savait pas encore que qui sole mange, sole lui vient .

Si Mme Denis et moi nous étions bien impudents, nous vous supplierions d'engager votre pourvoyeur à nous envoyer cet hiver par notre courrier deux pièces de volaille deux fois par semaine ; cela ne le chargerait pas beaucoup, nous paierions exactement le pourvoyeur, et le courrier ne sera pas oublié, mais en vérité nous n'osons pas avoir tant d'indiscrétion .

Je suis très fâché que votre parent qui était fait pour avoir de la considération s'attire des réponses mortifiantes qui courent le monde . S'il venait demander une grâce à M. le duc de Choiseul, la réponse vous venez trop tard est bonne ; mais elle ne vaut rien s'il ne s'agit que d'une visite du Jour de l'An . M. le duc de Choiseul est trop grand pour s’apercevoir si on lui fait sa cour de bonne heure ou trop tard .

Je ne savais pas que M. Jean-Georges, évêque 2 […] . L'église abhorre le sang, à ce qu'elle dit, l'évêque Jean-Georges n'a jamais fait périr personne que d'ennui . Je n'ai jamais entendu dire que j'eusse écrit une lettre à M. le duc de Choiseul sur l'évêque Jean-Georges . On ne tarit point sur les contes .

Avez-vous dans votre arrière bibliothèque la tragédie comique de Saul et de David ? Si vous ne l'avez pas je vous la déterrerai .

Comptez , monsieur, sur mon attachement inviolable.

V. »

1 A Ripaille, au bord du Léman, à l'est de Thonon, est installée la commanderie de l’ordre de St Maurice, fondée par Amédée VIII, duc de Savoie ; la vie qu'on y menait a donné lieu à l’expression faire Ripaille . On y visite ses remarquables cuisines .

2 Six ou sept mots sont emportés par la pliure du papier . Évidemment , il s'agit de Jean-Georges Le Franc de Pompignan, évêque du Puy.

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