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01/04/2010

je me tue pour amuser ma foutue patrie,

Poisson-lune.jpg

Poisson d'avril !

http://www.youtube.com/watch?v=oQibquf180k

Je remercie Hautetfort qui me permet de faire paraitre le 1er avril une lettre écrite le 3 ! On entre dans la quatrième dimension je crois ...

De même je serai encore apte à vous faire lire des lettres écrites après ma mort (enfin ! c'est juste un exemple !  ;-)  )

 

 

« A Nicolas-Claude Thiriot

 

[vers le 1er avril 1733]

 

             J’ai donc achevé Adélaïde [Adélaïde du Guesclin, qui sera représentée au Théâtre français le 18 janvier 1734]; je refais Eriphyle et j’assemble des matériaux, pour ma grande Histoire du siècle de Louis XIV. Pendant tout ce temps, mon cher ami, que je m’épuise, que je me tue pour amuser ma foutue patrie, je suis entouré d’ennemis, de persécutions et de malheurs. Ce Temple du goût [paru le 15 mars 1733] a soulevé tous ceux que je n’ai pas assez loué à leur gré, et encore plus ceux que je n’ai point loué du tout ; on m’a critiqué, on s’est déchainé contre moi, on a tout envenimé. Joignez à cela le crime d’avoir fait imprimer cette bagatelle sans une permission scellée avec de la cire jaune, et la colère du ministère contre cet attentat, ajoutez-y les criailleries de la cour et la menace d’une lettre de cachet ; vous n’aurez avec cela qu’une faible idée de la douceur de mon état et de la protection qu’on donne aux belles-lettres. Je suis donc dans la nécessité de rebâtir un second temple [elle aura l’Approbation délivrée par le censeur Crébillon qui ne demande que peu de corrections, mais elle n’aura pas le privilège], et in triduo reedificavi illud [et en trois jours je l’ai rebâti ]. J’ai tâché dans ce second édifice d’ôter tout ce qui pouvait servir de prétexte à la fureur des sots, et à la malignité des mauvais plaisants, et d’embellir le tout par de nouveaux vers sur Lucrèce, sur Corneille, Racine, Molière, Despréaux, La Fontaine, Quinault, gens qui méritent bien assurément que l’on ne parle point d’eux en simple prose. J’y ai joint de nouvelles notes qui seront plus instructives que les premières et qui serviront de preuve au texte. Monsieur votre frère qui me tient ici lieu de vous et qui devient de jour en jour homme de lettres  vous enverra le tout bien conditionné et vous pourrez en régaler si vous voulez quelque libraire [en Angleterre où est Thiriot qui fait imprimer les Lettres ; cependant ce nouveau Temple du goût sera imprimé en Hollande chez Desbordes]. Je crois que l’ouvrage sera utile à la longue et pourra mettre les étrangers au fait des bons auteurs. Jusqu’à présent il n’y a personne qui ait pris la peine de les avertir que Voiture est un petit esprit et  Saint-Évremond un homme bien médiocre, etc.

 

             Cependant les Lettres en question [Letters concerning the English nation  ou Lettres anglaises, qui en France seront les Lettres philosophiques] peuvent paraître à Londres. Je vous fais tenir la Lettre sur les académies qui est la dernière. J’aurais ajouté de nouvelles Lettres, mais je n’ai qu’une tête, encore est-elle petite et faible ; et je ne peux en vérité faire tant de choses à la fois. Il ne convient pas que cet ouvrage paraisse donné par moi. Ce sont des lettres familières que je vous ai écrites, et que vous faites imprimer. Par conséquent, c’est à vous seul de mettre à la tête un avertissement qui instruise le public que mon ami Thiriot à qui j’ai écrit ces guenilles vers l’an 1728 les fait imprimer en 1733, et qu’il m’aime de tout son cœur.

 

             Tell my friend Fakener he should write me a word when he has sent his fleet to Turki [Fakener est devenu ambassadeur à Constantinople et doit à ce titre partir en Turquie par mer avec une escadre]. Make much of all who are so kind as to remember me. Get some money with my poor works, love me, and come back very soon after the publication of em. But Sallé will go over to you. At least come back with her. Farewell my dearest friend. [Dites à mon ami Fakener qu’il aurait pu m’écrire un mot quand il a envoyé sa flotte en Turquie. Dites mille choses à tous ceux qui sont assez gentils pour se souvenir de moi. Obtenez quelque argent de mes pauvres œuvres, aimez-moi, et revenez très vite après leur publication. Sallé ira vers vous. Au moins revenez avec elle. Adieu, mon très cher ami.]

 

 

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