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02/04/2010

ses organes ne se déploient que dans la passion

"le premier mérite d’un acteur est de se faire entendre." : celui d'un guide aussi.

Oyez ! Oyez ! braves gens, le château de Voltaire à Ferney-Voltaire (01210) ouvre ses portes jusqu'au 31 octobre 2010 .

Qu'on se le dise !

Comme Jean-PhilippeRameau, je bats le rappel :

 http://www.youtube.com/watch?v=_3nb29ACNJA&feature=re... : le rappel des oiseaux !

En fait dans le parc du château ce sont les oiseaux qui chantent leurs amours et je les crois de bon augure .

 

 

 

 

 

« A Charles-Augustin Ferriol, comte d’Argental

Conseiller d’honneur du Parlement

rue de la Sourdière à Paris.

 

Aux Délices près de Genève

2 avril 1755

 

             Lekain est parti, mon cher ange, avec un petit paquet pour vous. Ce paquet contient les quatre derniers magots [4 dernier actes de L’Orphelin de la Chine], il vous sera aisé de juger du premier par les quatre ; je vous l’enverrai incessamment ; il n’y a plus que quelques ongles à terminer. Vous y trouverez encore quatre autres figures qui appartiennent à la chapelle de Jeanne [4 chants de La Pucelle annoncés le 6 février]; et je vous promets de temps en temps quelque petite cargaison dans ce goût, si Dieu me permet de travailler de mon métier.

 

             Lekain a été, je crois bien étonné : il a cru retrouver en moi le père d’Orosmane et de Zamor, et il n’a trouvé qu’un maçon, un charpentier et un jardinier ? Cela n’a pas empêché pourtant que nous n’ayons fait pleurer presque tout le Conseil de Genève ; la plupart de ces messieurs étaient venus à mes Délices, nous nous mîmes à jouer Zaïre pour interrompre le cercle ; je n’ai jamais vu verser plus de larmes ; jamais les calvinistes n’ont été si tendres [Ce même jour il écrit à Jean-Robert Tronchin : « Nous avons joué presque toute la pièce de Zaïre devant les Trochin et les syndics … Calvin ne se doutait pas que des catholiques feraient un jour pleurer des huguenots dans le territoire de Genève . Le fameux acteur Lekain … nous a bien aidés … Mme Denis a lu Zaïre à merveille, et j’ai fait le bonhomme Lusignan. »]. Nos Chinois ne sont pas  malheureusement dans ce goût ; on n’y pleurera guère, mais nous espérons que la pièce attachera beaucoup : nous l’avons jouée Lekain et moi [Lekain, parlant de ce séjour qu’il situe par erreur à Ferney, décrira la scène effroyable que lui a faite V* quand il a joué le rôle de Gengis devant lui ; il reconnaitra que c’est grâce à ses conseils qu’il eut un grand succès à Paris]; elle nous faisait un grand effet. Lekain réussira beaucoup dans le rôle de Gengis aux derniers actes, mais je doute que les premiers lui fassent honneur ; ce qui n’est que noble et fier, ce qui ne demande qu’une voix sonore et assurée, périt absolument dans sa bouche ; ses organes ne se déploient que dans la passion ; il doit avoir joué fort mal Catilina ; quand il s’agira de Gengis, je me flatte que vous voudrez bien le faire souvenir que le premier mérite d’un acteur est de se faire entendre.

 

             Vous voyez, mon cher et respectable ami, que malgré l’absence, vous me soutenez toujours dans mes goûts. Ma première passion sera toujours l’envie de vous plaire. Je ne vous écris point de ma main ; je suis un peu malade aujourd’hui, mais mon cœur vous écrit toujours. Je suis à vous pour jamais : madame Denis vous en dit autant. Mes tendres respects à toute la famille des anges.

 

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