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02/01/2022

Si vous êtes chèvre, madame, il n’y a personne qui ne veuille devenir bouc ; mais vous m’avouerez que de vieux singes, devenus tigres, sont une horrible espèce

... J'adore ce sens du compliment "à la Voltaire" !

UMAC - Comics & Pop Culture: mars 2021

Avis aux vieux singes et vielles guenons ! Zemmour , Le Pen et Mélenchon, vous êtes découverts .

 

 

 

« A Louise-Florence-Pétronille de Tardieu d'Esclavelles d'Epinay

Place Vendôme

à Paris

26è Septembre 1766

Si vous êtes chèvre, madame, il n’y a personne qui ne veuille devenir bouc ; mais vous m’avouerez que de vieux singes, devenus tigres, sont une horrible espèce. Comment se peut-il faire que les êtres pensants et sensibles ne cherchent pas à vivre ensemble dans un coin du monde, à l’abri des coquins absurdes qui le défigurent ? Je jouis de cette consolation depuis quelques années ; mais il y a des êtres qui me manquent : j’aurais voulu vivre surtout avec vous et vos amis. Il est vrai que le petit nombre de sages répandus dans Paris peut faire beaucoup de bien en s’élevant contre certaines atrocités, et en ramenant les hommes à la douceur et à la vertu. La raison est victorieuse à la longue ; elle se communique de proche en proche. Une douzaine d’honnêtes gens qui se font écouter produit plus de bien que cent volumes : peu de gens lisent, mais tout le monde converse, et le vrai fait impression.

Votre petit Mazar 1, madame, a pris, je crois, assez mal son temps pour apporter l’harmonie dans le temple de la discorde. Vous savez que je demeure à deux lieues de Genève : je ne sors jamais ; j’étais très malade quand ce phénomène a brillé sur le noir horizon de Genève. Enfin il est parti, à mon très grand regret, sans que je l’aie vu. Je me suis dépiqué en faisant jouer sur mon petit théâtre de Ferney des opéras-comiques pour ma convalescence ; toute la troupe de Genève, au nombre de cinquante, a bien voulu me faire ce plaisir. Vous croyez bien que l’auteur de la Henriade a fait jouer Henri IV. Nous avons tous pleuré d’attendrissement et de joie quand nous avons vu la petite famille se mettre à genoux devant ce bon roi. Tout cela est consolant, je l’avoue mais il y a trop de méridiens entre vous et moi : mon malheur est que mon château n’est pas une aile du vôtre ; c’est alors que je serais heureux. Madame Denis pense comme moi ; permettez-nous d’embrasser M. Grimm. Adieu, madame ; vivez heureuse. Agréez mon très tendre respect. »

1 Mozart ! Gabriel Cramer écrit en post- scriptum le 3 septembre 1766 à Johann Rudolf Sinner : « Nous avons ici un jeune Allemand qui m'est fort recommandé de Paris, il a neuf ans ; il joue du clavecin comme on n'en a jamais joué ; il déchiffre tout dans le moment, il compose sur tous les sujets possibles dans le moment, cela est gai, enfant, plein d'esprit, enfin on n'ose pas en parler de peur de n'être pas cru. »

Dans l'édition Garnier, Georges Avenel se contente de donner en note, sèchement : « Joueur de clavecin . » !

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