01/06/2022
Vous savez que les temps n’étaient pas favorables
... N'oublions pas, en ce début juin 1778, le corps de Voltaire était transporté vers l'abbaye de Scellières, où il allait avoir sa première sépulture bravant les interdits de l'Eglise catholique française . L'obscurantisme et l'intolérance des religions de ce temps reste encore d'actualité . Ecr l'Inf !
https://www.bibliorare.com/lot/73005/
« A Etienne-Noël Damilaville
2è février 1767 1
Mon cher ami, voilà donc Mlle Calas mariée 2 à un homme d’une très grande considération dans son espèce . C’est le fruit de vos soins . Ce sont des vengeurs qui vont naître. Puissions-nous marier ainsi une fille de Sirven ! mais la pauvre diablesse n’a pas l’air à la danse. J’ai actuellement bonne opinion de notre nouvelle affaire. M. Chardon est un adepte. Le Conseil commence à être composé de sages, si une autre compagnie l’est de fanatiques.
L’affaire de la Doiret, qui m’avait donné tant d’inquiétude, est finie 3 d’une manière plus heureuse que je n’aurais pu le prévoir . Il ne s’agit plus que d’obtenir des fermiers généraux la destitution d’un scélérat . Vous savez que les temps n’étaient pas favorables. Ce monstre D’Hémery 4 est venu enlever à Nancy un libraire nommé Leclerc 5, accusé par les jésuites. Qui croirait que les jésuites eussent encore le pouvoir de nuire, et que cette vipère coupée en morceaux pût mordre dans le seul trou qui lui reste ?
Mon neveu, conseiller au grand-conseil 6, s’est comporté, dans toute cette affaire, en digne philosophe. Il y a encore des hommes. Un des malheureux d’Abbeville 7 est chez le roi de Prusse.
Personne ne sait de qui est le Triumvirat. Ce n’est pas un ouvrage fait pour le théâtre français, mais les notes sont faites pour l’Europe .
Il y a de terribles fautes d’impression.
Je vous embrasse, et mon cœur vole vers le vôtre. É L.
Donnez cours, je vous prie à l'incluse, je ne sais point la demeure de Mme Calas . »
1 Copie par Wagnière, sans la formule de l'avant-dernier paragraphe ; copie contemporaine Darmstadt B. sans le dernier paragraphe ; édition de Kehl ; édition Schlobach .
2 Anne Calas a épousé M. Duvoisin : https://gw.geneanet.org/pierfit?lang=fr&p=anne&n=calas&oc=1
3 Le commis de la douane de Collonges, avec lequel on s’était entendu, s’appelait Dumesrel fils . Il avait promis de laisser passer la voiture, moyennant cinquante louis qui lui avaient été comptés, n’avait pas tenu sa parole, et saisit le carrosse de Voltaire, qui était rempli de livres. Cette affaire, qui inquiéta longtemps Voltaire (voir lettre du 23 décembre 1766 à d'Argental -- http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2022/03/28/ils-ont-saisi-les-malles-la-voiture-et-les-chevaux-6373739.html -- et beaucoup de celles qui la suivent), fut étouffée. On vint à bout de faire regarder la chose comme une indiscrétion commise par Mme Denis, à l’insu de son oncle. Le commis fut destitué, et forcé de rendre les cinquante louis qu’il avait reçus. (Beuchot.)
Voir : http://www.leschroniquesdemichelb.com/2010/10/voltaire-contrebandier-4eme-partie.html
4Joseph d'Hémery, inspecteur de la librairie, était loin d'être un « monstre », il remplissait les devoirs de sa charge avec efficacité et intelligence . Voir : https://data.bnf.fr/fr/17113909/joseph_d__hemery/
5Voir note de la lettre du 2 février 1767 à Le Riche : https://fr.wikisource.org/wiki/Correspondance_de_Voltaire/1767/Lettre_6711
La Bibliothèque Nationale conserve des documents relatifs à l'arrestation de Leclerc (évènements allant du 6 janvier au 5 mars 1767) : fonds français, 22098, n° 76-83 et 87
6 Mignot et non D’Hornoy comme le disaient les éditeurs antérieurs ..
7 Morival d’Étallonde.
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