13/06/2022
Mon cher président, tout ce que vous me mandez est incroyable, tout vrai qu’il est
... Avoir un gouvernement de cohabitation avec le "généreux" Mélenchon (formidable avec l'argent des autres ) ? Vous n'y pensez pas ! Si ? Il pourrait y avoir de l'émigration bientôt !
« A Germain-Gilles-Richard de Ruffey le Président, etc.
à Dijon
6è février 1767, à Ferney
Mon cher président, tout ce que vous me mandez est incroyable, tout vrai qu’il est. Il ne faut jamais faire des plaisanteries à des compagnies, et celle-ci est trop forte ; il est impossible qu’on la souffre. Il y a tant de choses à dire sur cette espièglerie que je ne dis mot ; mais je crois que M. Le Bault est un homme trop considérable pour souffrir une telle accolade.
Je vous dépêcherai les feuilles en question dès que les chemins seront un peu plus praticables. Nous sommes bloqués par les neiges et par la guerre : nous manquons de tout ; je suis malade dans mon lit ; voilà mon état.
Je vous embrasse et je vous aime tout comme si je me portais bien. On ne peut vous être plus tendrement dévoué que moi.
V. »
18:19 | Lien permanent | Commentaires (0)
Vous sentez, monsieur, combien je dois être flatté de l’honneur de vous avoir pour confrère . Mais entre nous (permettez moi de vous le dire sous le secret) nous avons un étrange associé
... Extrait de conversation surprise dès ce jour entre candidats députés et députés en place , entre postulants de toutes tendances , surtout (sauf erreur ! ) chez la gauche bâtarde et la droite extrême prêtes à toutes les compromissions .
https://www.linternaute.com/?gbmlus=07b4a7d1c939ab997cf79...
« A Antoine-Jean-Gabriel Le Bault
À Ferney, 6 février 1767
Vraiment, monsieur, quand vous voudrez, vous nous ferez grand plaisir de combattre nos abominables neiges avec quarante bouteilles d’excellent vin. Il n’y aurait qu’à les faire adresser par la veuve Rameau, à Nyon, où je les enverrais chercher. Je suis plus las de ma Sibérie que je ne le suis de la guerre de Genève, L’hiver y est pire qu’à Pétersbourg, de l’aveu de tous les Russes qui sont venus chez nous. C’est acheter trop cher quatre mois d’un été agréable. Le plaisir du plus bel aspect du monde n’est pour moi qu’une privation quand je perds la vue ; en un mot, je voudrais venir boire votre vin à Dijon.
Ne croyez pas au reste que notre guerre genevoise soit une pure plaisanterie. Nous n’avons plus de commerce ni avec la Savoie, ni avec Lyon, ni avec la Suisse : il faut tout faire venir avec des frais immenses. Plus notre maison est grosse, plus nous souffrons.
Vous sentez, monsieur, combien je dois être flatté de l’honneur de vous avoir pour confrère 1. Mais entre nous (permettez moi de vous le dire sous le secret) nous avons un étrange associé 2. C’est un tour sanglant qu’on a fait à l’Académie, je ne crois pas qu’elle doive le souffrir. Il est honteux surtout que la nomination d’un homme de votre considération soit l’époque d’une pareille insulte. Un geôlier honoraire n’est guère fait pour être académicien honoraire. Toutes les bienséances sont trop blessées 3.
Je prends la liberté de vous parler avec une confiance que m’inspire mon respectueux attachement pour vous. Vous ne me décèlerez pas.
Mme Denis vous présente ses obéissances ainsi qu’à Mme Le Bault.
J’ai l’honneur d’être avec bien du respect, monsieur, votre très humble et très obéissant serviteur.
Voltaire. »
1 Le Bault a été élu à l'Académie de Dijon le 16 janvier 1767 .
2 Il sera de nouveau question de cet « étrange associé » dans la lettre suivante, sans que l'allusion puisse être éclaircie de façon sûre .
3 Il s’agit de l’Académie de Dijon. Voltaire en avait été reçu membre le 3 avril 1761. Nous n’aurons pas l’indiscrétion de rechercher à qui peut s’appliquer l’épithète de geôlier honoraire. (Note du premier éditeur. Mandat-Grancey) — La lettre du 6 février 1767 à de Ruffey a trait sans doute au même sujet : https://fr.wikisource.org/wiki/Correspondance_de_Voltaire...
10:55 | Lien permanent | Commentaires (0)
Nous sommes en guerre, je suis malade, et j’ai manqué un jour de bouillon
... dit le président .
La majorité présidentielle risque fort de boire ce bouillon dimanche prochain, véritable soupe à la grimace , sauce NUPES - bleu Marine dure à avaler . On va fort tchatcher ces jours-ci .
« A François de Chennevières
Ferney, 6 février 1767 1
Vraiment, mon cher ami, vous auriez bien raison de me venir voir . J’appartiens de droit à présent à vos hôpitaux militaires. Nous sommes en guerre, je suis malade, et j’ai manqué un jour de bouillon. J’ai été bloqué par le cordon de troupes qui entoure Genève ; mais M. le duc de Choiseul a eu pitié de moi. Je ne m’en porte pas mieux . Je suis au milieu de trente lieues de neiges, impotent et perdant les yeux . C’est mon revenu de tous les hivers. Je commence à me dégoûter fort de la retraite que j’ai choisie. Elle ne produit rien ; il n’y a de beau que le paysage, et cette beauté n’est pas pour les aveugles. Je ne sais comment les choses de ce monde sont arrangées, mais il me semble qu’on finit toujours tristement. »
1 Copie par Boissy d'Anglas (Clarke).
10:08 | Lien permanent | Commentaires (0)
12/06/2022
Je trouve que de tous les fléaux la crainte est encore le pire ; elle glace le sang
...
« A Charles-Augustin Ferriol, comte d'Argental
et à
Jeanne-Grâce Bosc du Bouchet, comtesse d'Argental
6 février 1767
Votre créature l’a échappé belle, mes divins anges. Les conseillers d’État, les neiges et les maladies attachées à l’âge et à la rigueur du climat, me réduisaient à une pénible situation. Je trouve que de tous les fléaux la crainte est encore le pire ; elle glace le sang, elle n’a donné une espèce d’attaque d’apoplexie. Béni soit monsieur le vice-chancelier 1, qui a été mon premier médecin ! Mais jugez si j'ai pu, pendant un mois de transes continuelles, faire à ces pauvres Scythes ce que j’aurais fait si mon pauvre corps et mon âme avaient été moins tourmentés et moins affaiblis. Tels qu’ils sont, ils pourront ne pas déplaire, puisqu’ils ne nous déplaisent pas et que nous sommes difficiles. Nous en avons suspendu les répétitions, parce que la rigueur de la saison a augmenté dans notre Sibérie, et que nous sommes tous malades. Il n’y à plus moyen de tenir à mon âge dans ce climat, qui est aussi horrible pendant l’hiver qu’il est charmant pendant l’été. Vous, qui n’avez pour montagne que Montmartre et les Bonshommes 2, jouissez en paix de vos doux climats. Je me flatte que vous aurez un très beau temps le carême, et que les Scythes pourront faire quelque plaisir à mes chers compatriotes, qui sont quelquefois si difficiles et quelquefois si indulgents. Les affaires les plus désespérées peuvent réussir, et j’en ai une bonne preuve. On dit qu’il faut remercier deux ou trois maîtres des requêtes qui sont parents de l’abbé Mignot ; mais sans monsieur le vice-chancelier, il n’y avait rien de fait. Je n’avais l’honneur de le connaître que pour avoir joué aux échecs avec lui, il y a plus de cinquante ans ; il pouvait me faire échec et mat cette fois-ci d’un seul mot.
Je ne puis plus rien faire aux Scythes ; je suis dans un état trop triste pour penser à des vers, et même à de la prose ; je suis anéanti. Les deux derniers exemplaires, que je vous ai envoyés par M. le duc de Praslin, peuvent être regardés comme mon testament. Il sera aisé à Lekain de faire porter sur les autres exemplaires les corrections qui sont dans ces derniers. J’aurais voulu finir ma carrière par quelque chose de plus fort et de plus digne de vous ; mais il est aussi difficile d’atteindre le but qu’il est aisé de l’apercevoir. La critique est aisée, et l’art est difficile 3.
M. de Chauvelin n’a envoyé des idées ingénieuses pour le cinquième acte ; mais entre les choses ingénieuses et les théâtrales, il y a un espace immense. Une chose dont je répondrais, c’est que si on joue le cinquième acte comme Mme de La Harpe, il fera plaisir aux Parisiens. Enfin j’ai jeté mes filets en votre nom, et je ne dois plus qu’attendre paisiblement la fin du carnaval.
Respect et tendresse.
V.»
1 Maupéou .
2 Le terrain de l'ancien palais des Tournelles sur l’emplacement duquel a été bâti un monastère de minimes .
3 Les Glorieux, ac. II, sc. 5, vers 690 ,de Destouches : http://www.theatre-classique.fr/pages/pdf/NERICAULT_GLORIEUX.pdf
00:09 | Lien permanent | Commentaires (0)
11/06/2022
L’Espagnole ne pourra être prête que dans huit jours
... C'est ce qu'espère le Maroc, lui donnant ainsi le temps de se débarrasser de l'accusation d'espionnage lancée par l'ex-ministre Arancha Gonzalez Laya : https://www.lemonde.fr/afrique/article/2022/06/08/logicie...
Big Brother is watching you (us)
« A Gabriel Cramer
[vers le 5 février 1767]
Le vieux malade vous envoie des additions et des corrections nécessaires pour l'édition de M. Cramer .
L’Espagnole 1 ne pourra être prête que dans huit jours . On y travaille encore . On songera au reste . On n'est pas de fer . On embrasse M. Cramer de tous son cœur . »
1 Certainement Les Quiestions de Zapata, 1766-1767 . Voir : https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k6451940g/texteBrut
17:33 | Lien permanent | Commentaires (0)
Confiez-moi ce que vous en pensez
... Par exemple :
https://www.francetvinfo.fr/meteo/climat/fin-des-ventes-d...
Le fameux fil à la patte qui se transforme toujours en chaine à boulet ( Averell le confirme ! ) .
« A Michel-Paul-Guy de Chabanon , de
l'Académie des sciences
à Paris
À Ferney, 6 février 1767
Je vous réponds tard, mon cher confrère ; j’ai été malade, je suis en Sibérie, on fait la guerre près de ma tanière, et j’y suis bloqué. Nous avons été exposés à la disette ; aucun fléau ne nous a manqué. L’espérance de voir votre tragédie entre dans mes consolations. Je loue toujours beaucoup le dessein que vous avez de la faire imprimer, afin que son succès ne dépende pas du jeu d’un acteur. On dit que le théâtre n’est pas aujourd’hui sur un pied à donner beaucoup de tentation aux auteurs ; et d’ailleurs on juge toujours mieux dans le recueillement du cabinet qu’à travers les illusions de la scène. J’ai fait une pièce fort médiocre, intitulée les Scythes 1. J’ai eu bravement l’impudence de mettre des agriculteurs et des pâtres en parallèle avec des souverains et des petits-maîtres. Je l’avais fait imprimer, et ne comptais point la livrer aux comédiens ; mais je ne me gouverne pas par moi même ; il a fallu céder aux désirs de mes amis, dont les volontés sont des ordres pour moi. C’est à vous à voir si vous aurez plus de courage que je n’en ai eu.
Avez-vous entendu la musique de Pandore ? Confiez-moi ce que vous en pensez ; il faut dire la vérité à ses amis. Je crois qu’il y a des morceaux très agréables ; mais on dit qu’en général la musique n’est pas assez forte. Je ne m’y connais point, et vous êtes passé maître, Dites-moi la vérité encore une fois, et fiez vous à ma discrétion. Adieu ; je ne suis pas trop en état de causer avec un homme qui se porte bien ; mais je ne vous en aime pas moins. »
1 Elle sera jouée le 26 mars 1767.
00:05 | Lien permanent | Commentaires (0)
10/06/2022
Mandez-moi, je vous prie, si on peut avec sûreté vous envoyer de petits paquets
... Message discret du président Emmanuel Macron au président Volodymyr Zelensky . Ce à quoi il est répondu "Les petits paquets entretiennent l'amitié et font les grandes gué-guerres ".
https://www.lepoint.fr/invites-du-point/colomes-guerre-en...
« A Charles-Frédéric-Gabriel Christin fils
Avocat au parlement
à Saint-Claude
5è février 1767 , à Ferney
Mon cher ami, je vous envoie six exemplaires de la seconde édition du Commentaire 1 . Je ne risque que cette demi-douzaine crainte des écornifleurs . L'horreur des neiges et l'âpreté de l'hiver ne sont pas ce qu'on a le plus à redouter . Je l'ai échappé belle, je vous jure . Je vous en dirai de bonnes quand nous nous verrons .
Cet hiver me tue . J’ai encore quelque espérance dans le printemps mais je ne le croirai une belle saison que quand je jouirai de votre société .
Mandez-moi, je vous prie, si on peut avec sûreté vous envoyer de petits paquets .
Je vous embrasse de tout mon cœur .
V. »
1 Commentaire sur le livre des délits et des peines (Traité des délits et des peines ,de Beccaria : http://classiques.uqac.ca/classiques/beccaria/traite_deli... ): https://athena.unige.ch/athena/voltaire/voltaire-commentaire-sur-le-livre-des-delits-et-des-peines.html
11:26 | Lien permanent | Commentaires (0)