30/11/2009
je suis l’homme aux inadvertances
Volti a des inadvertances bien excusables quand on connait sa puissance de travail et l'attention qu'il porte à tous ceux qu'il aime (et aussi à ceux qu'il déteste, il faut bien l'avouer !).
« A Charles-Augustin Ferriol, comte d’Argental
envoyé de Parme
Rue de la Sourdière à Paris
et
à Jeanne-Grâce Bosc du Bouchet, comtesse d’Argental
29 novembre 1760.
Telle est dans nos Etats la loi de l’hyménée.
C’est la religion lâchement profanée,
C’est la patrie enfin que nous devons venger.
L’infidèle en nos murs appelle l’étranger etc.[Tancrède ]
Il faut avouer, mes divins anges, que je suis l’homme aux inadvertances. On change un vers et on oublie d’envoyer les corrections devenues nécessaires aux vers suivants ; et on fatigue ses anges horriblement. On ne sait plus où l’on est. Il faut recopier la pièce, tous les rôles, c’est la toile de Pénélope. Je suis à vos genoux, je vous demande pardon, je meurs de honte. Il y a plus de cent vers corrigés dans cette maudite chevalerie. Tout cela est épars dans mes lettres. Si vous pouvez attendre, je crois que le meilleur parti est de vous envoyer la pièce bien recopiée .Vous êtes les maîtres de tout. Mais en cas que vous fassiez imprimer, je vous demande toujours en grâce de m’envoyer les feuilles.
J’apprends que messieurs les dévots, et messieurs de Pompignan se sont beaucoup remués sur la nouvelle que j’étais chez Laleu à Paris. J’apprends que les dévotes sont fâchées de voir une Corneille aller dans la terre de réprobation, et qu’elles veulent me l’enlever [entre autres, la princesse de Conti, la présidente de Molé, fille du fameux Samuel Molard ]. A la bonne heure : elles lui feront sans doute un sort plus brillant, un établissement plus solide dans ce monde-ci et dans l’autre, mais je n’aurai rien à me reprocher. Nous verrons qui l’emportera de cette cabale ou de vous. Vous devez savoir que tout cela a été traité pour et contre au lever du roi. Chacun a dit son mot. Voilà de grandes affaires, mais Pondicheri est plus important [Pondichéry capitulera le 18 janvier 1761].
Que dites-vous de la Didon de M. Lefranc de Pompignan suivie du Fat puni ? [ on devait jouer le 10 novembre Didon ( de Lefranc de Pompignan) et Le fat puni (de Pont-de-Veyle). Le public s’esclaffa, suivant les plaisanteries de V*, rapprocha le titre et l’auteur, et on décida de donner une autre pièce que le Fat puni . Didon fut en fait jouée le 8 novembre ] on est bien drôle à Paris.
Mille tendres respects.
V.
16:01 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : voltaire, argental, inadvertance, patrie, étranger, didon, fat