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29/01/2009

Je n’ai point d’admirateurs, je n’en veux point : je veux des amis

Avant de venir au travail, j'ai eu le temps (bref) d'écouter deux dinosaures de la presse : Cavanna et Delfeil de Ton, piliers de Hara Kiri puis de Charlie Hebdo . En hommage à leur humour je n'ai pas résisté à la tentation, et j'ai eu la chance de trouver cette lettre de Volti* datée du jour, il y a 253 ans, où l'on voit qu'il est au sommet de son art de dire du bien en se moquant proprement de l'interlocuteur et ses colègues (pasteurs protestants ). Pour ceux qui ont l'ego exacerbé et un sens de l'humour atrophié, vous pourrez, si vous prenez tout au premier degré, lancer une fatwa et une "terrible" excommunication sur Volti* (ça ne lui fera ni chaud ni froid !) et sur moi qui rit à ces écrits :"cent mille Arabes qui ont été engloutis sous terre : cela peut servir merveilleusement votre éloquence chrétienne, d’autant plus que ces pauvres diables étaient des infidèles"

 

 

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« A Jacob Vernes

 

                            Il est vrai, mon cher Monsieur, que vous m’avez envoyé des vers, mais j’aime bien mieux votre prose. Je n’ai point d’admirateurs, je n’en veux point : je veux des amis, et surtout des amis comme vous.

 

                            On dit que vous avez prononcé un discours admirable sur le malheur de Lisbonne, [? ? :le Discours Philosophique sur ces Paroles de M. Pope : Tout ce qui est, est bien ] et qu’on ne voudrait pas que cette ville eût été sauvée, tant votre discours a paru beau. Vous avez encore Méquinez, et quelque cent mille Arabes qui ont été engloutis sous terre : cela peut servir merveilleusement votre éloquence chrétienne, d’autant plus que ces pauvres diables étaient des infidèles.

 

                            Tous ces désastres ont privé Lausanne de la comédie. On a joué Nanine à Berne ; mais pour expier ce crime affreux, on a indiqué un jour de jeûne. Mme Denis, qui ne jeûne point, a été très fâchée qu’on ne bâtît point un théâtre à Lausanne, mais cela ne l’a point brouillée avec les ministres. Il en vient quelques uns dans mon petit ermitage à Montriond. Ils sont tous fort aimables et très instruits. Il faut avouer qu’il y a plus d’esprit et de connaissance dans cette profession que dans aucune autre. Il est vrai que je n’entends point leurs sermons, mais quand leur conversation ressemble à la vôtre, je vous assure qu’ils me plaisent beaucoup plus.

 

                            Mille compliments à toute votre famille, et à M. et Mme de Labat.[Jean-Louis Labat, baron de Grandcour ]

 

                            Adieu, je vous embrasse de tout mon cœur, sans cérémonie.

 

                   Voltaire

                   A Montriond, 29 janvier 1756. »

 

 

Voir : http://fr.wikipedia.org/wiki/Jacob_Vernes