02/09/2013
il est très-convenable, dans le temps présent où l'argent est si rare, qu'un grand prince comme monseigneur le duc ... indemnise M. ... de la perte réelle qu'il fait en retirant son argent de France
... On croit rêver !
Les boursiers doivent n'en pas croire leurs yeux, notre ministre du budget et des finances en rendrait son portefeuille si c' était encore vrai en ce XXIè siècle de misère organisée ! Perdre de l'argent en le retirant de France, voilà qui n'est pas actuel, n'est - ce pas ? Gérard 2par2 , Nanard et Coursensac , pour ne citer qu'eux, ne sont pas des gagne-petit et cherchent fortune loin ,- ou pas-, de leur mère patrie . Comme quoi, le changement (de régime) c'est bien maintenant !
"Froggy condamné au pain sec et à l'eau", ou "la monnaie flottante"
« A Louise-Dorothée von Meiningen, duchesse de SAXE-GOTHA 1
Aux Délices, 24 juin [1758].
Madame, je viens enfin de trouver à Genève le seul homme qui puisse prêter de l'argent à Votre Altesse sérénissime. J'ai retardé, pour venir à bout de cette affaire, un voyage que je suis obligé de faire chez monseigneur l'électeur palatin. Je pars avec la satisfaction de donner à Votre Altesse sérénissime une preuve de ma respectueuse et tendre reconnaissance, et avec la douleur de ne pouvoir venir me mettre à vos pieds. Il ne s'agira, madame, que de faire écrire, ou par un de vos ministres, ou par votre banquier de Francfort, à M. de Labat, baron de Grandcour, à Genève. Que Votre Altesse sérénissime ne soit ni surprise ni fâchée contre moi de la liberté que je prends de servir de caution. C'est un usage de républicains, quand ils contractent avec des princes, et cet usage est même établi à Paris. Ce n'est qu'une formalité entre M. de Labat et moi, dans laquelle Vos Altesses sérénissimes n'entrent pour rien et je regarde comme le plus heureux jour de ma vie celui où je peux leur marquer avec quel tendre respect je leur suis attaché.
Je me flatte que Votre Altesse sérénissime touchera cinquante mille florins d'empire soit à Francfort, soit à Amsterdam, sur le premier ordre qu'elle donnera. Je prends la liberté d'assurer Votre Altesse sérénissime qu'il est très-convenable, dans le temps présent où l'argent est si rare, qu'un grand prince comme monseigneur le duc de Saxe-Gotha indemnise M. de Labat de la perte réelle qu'il fait en retirant son argent de France pour vous le remettre. Sa délicatesse ne lui permet pas de demander un autre intérêt que de cinq pour cent pendant les quatre années qu'il vous laisse son argent et votre générosité, madame, ne vous permettra pas de ne lui point 2 accorder de votre pure volonté un pour cent de plus c'est une bagatelle. Votre ministre peut lui écrire dans cette idée; un simple billet que votre banquier de Francfort ou d'Amsterdam lui enverra signé de monseigneur le duc et de Votre Altesse sérénissime terminera toute l'affaire. Les choses de ce monde ne méritent pas qu'on y consume plus de temps. Que ne puis-je, madame, employer tout le temps de ma vie à vous témoigner mon zèle inviolable , puisse bientôt la paix, nécessaire aux princes et aux peuples, rendre à votre auguste famille le repos, qui est la récompense de la vertu .
Conservez, madame, vos bontés à votre vieux Suisse, qui n'oublie pas la grande maîtresse des cœurs. »
1 Voir lettre du 22 juin 1758 à Jean-Louis Labat : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2013/09/01/il-faut-brievete-et-clarte-bonsoir-5153854.html
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