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13/01/2014

les anciens amis sont les seuls qui tiennent au fond de notre être, les autres ne les remplacent qu'à moitié

... En est-il de même pour les amours anciennes ?

Si oui pourquoi en chercher de nouvelles , mister president of France, car si je compte bien (une moitié de moitié) vous en seriez désormais à un quart d'amourette ?

 http://www.youtube.com/watch?v=h4Bi6S-sY2E

J'attendais mieux , par exemple ceci : http://www.youtube.com/watch?v=HpNCrL0hii8

 

31_3_2013_2045 amis anciens.png

 

« A Marie de Vichy de Chambond, marquise du DEFFAND

Aux Délices, 27 décembre [1758]

J'apprends, madame, que votre ami et votre philosophe Formont a quitté ce vilain monde 1. Je ne le plains pas; je vous plains d'être privée d'une consolation qui vous était nécessaire. Vous ne manquerez jamais d'amis, à moins que vous ne deveniez muette; mais les anciens amis sont les seuls qui tiennent au fond de notre être, les autres ne les remplacent qu'à moitié. Je ne vous écris presque jamais, madame, parce que je suis mort et enterré entre les Alpes et le mont Jura; mais, du fond de mon tombeau, je m'intéresse à vous comme si je vous voyais tous les jours. Je m'aperçois bien qu'il n'y a que les morts d'heureux. J'entends parler quelquefois des révolutions de la cour, et de tant de ministres qui passent en revue rapidement, comme dans une lanterne magique. Mille murmures viennent jusqu'à moi, et me confirment dans l'idée que le repos est le vrai bien, et que la campagne est le vrai séjour de l'homme.

Le roi de Prusse me mande quelquefois que je suis plus heureux que lui: il a vraiment grande raison; c'est même la seule manière dont j'ai voulu me venger de son procédé avec ma nièce et avec moi. La douceur de ma retraite, madame, sera augmentée, en recevant une lettre que vous aurez dictée; vous m'apprendrez si vous daignez toujours vous souvenir d'un des plus anciens serviteurs qui vous restent.

Vous voyez sans doute souvent M. le président Hénault, l'estime véritable et tendre que j'ai toujours eue pour lui me fait souhaiter passionnément qu'il ne m'oublie pas.

Je ne vous reverrai jamais 2, madame; j'ai acheté des terres considérables autour de ma retraite; j'ai agrandi mon sépulcre. Vivez aussi heureusement qu'il est possible; ayez la bonté de m'en dire des nouvelles. Vous êtes-vous fait lire le Père de famille?3 cela n'est-il pas bien comique? Par ma foi, notre siècle est un pauvre siècle auprès de celui de Louis XIV; mille raisonneurs, et pas un seul homme de génie; plus de grâces, plus de gaieté; la disette d'hommes en tout genre fait pitié. La France subsistera mais sa gloire, mais son bonheur, son ancienne supériorité. qu'est-ce que tout cela deviendra ?

Digérez, madame, conversez, prenez patience, et recevez, avec votre ancienne amitié, les assurances tendres et respectueuses de l'attachement du Suisse

Voltaire »

1 Sur le « portrait » de Formont par Mme du Deffand, voir Lewis, VIII,92-94 . La marquise répondra longuement à V* le 5 janvier 1759 .Voir (en particulier page 5 ): http://www.edebiyatdergisi.hacettepe.edu.tr/198852JaleErlat.pdf

2 Sur une copie manuscrite de cette lettre, Walpole a noté : « Il l'a vue encore plus de dix [plutôt vingt] ans après cette lettre . » [lorsque V* retourna à Paris]

3 De Diderot .

 

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