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30/11/2016

enfin détruire tout l'effet d'un coup de théâtre entièrement nouveau, se priver de la surprise que cause le mariage

... De Sarko et Fillon dont on ne sait lequel méprise le plus l'autre, et qui vont devoir hypocritement mener campagne pour que l'ex-premier ministre soit calife à la place du calife .

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Et pendant ce temps, à l'Elysée une stratégie (gagnante ?! ;-) ) ...

 

 

 

« A Charles-Augustin Ferriol, comte d'Argental

et à

Jeanne-Grâce Bosc du Bouchet, comtesse d'Argental

Ferney 27 novembre [1761]

Ô anges, croyez-moi voilà comme il faut commencer un peu après le rôle d'Olympie . Ensuite nous le fortifions dans quelques endroits, mais commencer dans le goût de Zaïre ; mais rendre froid dans Olympie ce qui dans Zaïre est piquant par sa première éducation dans le christianisme ; mais disloquer le premier acte, et donner le change au spectateur en discutant la mémoire d’Alexandre après avoir parlé d'amour ; mais enfin détruire tout l'effet d'un coup de théâtre entièrement nouveau, se priver de la surprise que cause le mariage d'Olympie ; ah mes anges rejetez bien loin cette abominable idée ! Et laissez-moi faire . Oubliez la pièce, renvoyez-la moi, je vous la redépêcherai sur-le-champ et si vous n’êtes pas contents dites mal de moi .

Je vous prie, je vous conjure de présenter ma nouvelle requête à M. le comte de Choiseul . Il faut absolument que je gagne mon procès sur mon comte de Talleyrand .

Mlle Corneille jouera le comique parfaitement, et ne sera pas mal dans les seconds rôles tragiques .

C'est une nouvelle bien intéressante !

Dites-moi donc quelque chose du tripot s'il n'y a rien sur l'Espagne . »

 

Qui ? Moi, n'en pas passer par ce que vous daigneriez ordonner !

... Dit en rougissant Manuel Valls à son patron-président-sur-siège-éjectable .

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« A Jean-Philippe Fyot de La Marche

A Ferney, 25 novembre 1761

Monsieur,

Qui ? Moi, n'en pas passer par ce que vous daigneriez ordonner ! Ah ! mon blanc-seing est ma réponse . Je suis confus et reconnaissant, mais je ne suis point étonné . Je ne le suis, monsieur , que des procédés de M. De Brosses dont je n'avais vu d'exemple ni dans les terres australes, ni chez les fétiches . Tout cela me paraissait anti-président et anti-littéraire . M. Fargès ou Fargesse , le maître des requêtes, qui est à peu près son oncle 1 et qui a passé chez moi, a paru émerveillé de cette affaire, et a bien promis d'interposer son autorité d’oncle, attendu qu'il est d'une ligne plus haut que son neveu . Mais, monsieur, je compte encore plus sur l'autorité de votre raison et de votre vertu .

Que M. De Brosses me permette de me laisser vivre et mourir gaiement, c'est tout ce que je lui demande . Il m'a fait cent reproches . Il s'est brouillé avec le conseil, pour un demi-arpent dont la justice appartient évidemment au roi, et qu'il a voulu avoir à mes dépens . Ce n'est pas de cette façon qu'il sera premier président de Besançon . Enfin qu'il oublie toutes ces misères, indignes de sa place . Il m'a vendu cher ses coquilles 2. C'est bien assez . Il a mon argent et je lui demande son amitié pour le vin du marché .

J'ai bien peur après l’œuvre des six jours de dire aussi poenituit fecise 3. Mais si j'avais votre suffrage, je ne me repentirais assurément pas .

Je suis avec un profond respect et une vive reconnaissance, monsieur, votre très humble et très obéissant serviteur

Voltaire. »

1 Il était son cousin, car sa tante Marie-Charlotte de Fargès était la mère de Mme De Brosses, née François Castel de Saint-Pierre-Crèvecoeur . François de Fargès écrivait la veille à Mme Denis : « Ma négociation a été fort difficile, madame ; j'ai trouvé M. De Brosses et toute sa famille très ulcérés de la lettre que M. de Voltaire lui a écrite et surtout de la publicité qu'il y a mise ; car M. de Brosses est instruit que monsieur votre oncle en a envoyé des copies […] il consent qu'il ne soit plus question des moules de bois qui font l'objet de la contestation ; il en tiendra compte à l'homme dont M. de Voltaire les a pris, pourvu que M. de Voltaire veuille bien vous promettre d'en distribuer la valeur dans le courant de l'hiver aux pauvres de la paroisse de Tournay […] A l'égard du procès-verbal concernant les dégradations dont M. de Brosses se plaint, il l'a fait plutôt pour en empêcher de nouvelles, que dans le dessein de faire aucune poursuite, moins encore dans le projet odieux de vous ruiner un jour ; et le propos que l'on fait tenir à cet égard est une imposture . Il veut bien encore […] promettre de ne faire aucune poursuite en conséquence de ce procès-verbal, sous la condition expresse, et sans laquelle sa promesse sera rétractée, qu'il n'en sera plus fait à l'avenir, que M. de Voltaire laissera exactement le nombre d'arbres, par poses prescrit dans le contrat sans rien intervertir à cet égard [...] [qu']il tiendra en défense des bestiaux les coupes nouvelles, pour ne pas empêcher les bois de revenir ; qu'il fera recéper et mettre en bonne revenue ce qui pourrait avoir été brouté par les bestiaux dans l’intervalle de sa jouissance [...]Enfin , madame, qu'il ne soit plus question du passé, et qu'à l'avenir, l'entière exécution des actes assure et maintienne la bonne intelligence que M. De Brosses désire, qu'il ne rompra jamais par sa faute […]. »

2 Formule faisant allusion à l'expression proverbiale A qui vendez-vous vos coquilles ? A ceux qui viennent de St Michel ? laquelle se dit à ceux qui offrent des choses dont on n'a que faire ; elle joue en même temps sur le fait que De Brosses a écrit un livre sur les coquillages fossilisés .

3 Voir lettre du 23 novembre 1761 à Bernis : http://voltaireathome.hautetfort.com/archive/2016/11/28/2-5880437.html

 

il serait insipide de la faire parler d'amour avant le moment de son mariage, qui est un coup de théâtre très neuf, dont tous ces froids préliminaires feraient perdre le mérite

... dit le scénariste décérébré (sauf en ce qui concerne l'appât du gain !) de cette nouvelle téléréalité "Mariés au premier regard" ( et divorcés au second ) sur la mirifique M6 . Autant dire que ces volontaires qui refuseraient de sauter d'un deuxième étage aidés d'un seul parapluie, n'hésitent guère à se lancer dans le mariage , sans doute plus confiants dans la batterie de tests subis que dans leur propre capacité à trouver l'âme soeur . Vive la science ! Non ?

Oui, la France a bien un "Incroyable talent", celui entre autres d'être à la remorque d'une vingtaine de pays qui ont déjà exhibé ce concept . On ne trouve pas mieux dans Cendrillon, Blanche-Neige , et Raiponce, et Shrek ...

Happy end ? Ils se marièrent et n'eurent que les enfants qu'ils voulaient .

 Noces de Cendrillon

 

 

 

« A Henri Lambert d'Herbigny, marquis de Thibouville

23 novembre [1761]

Vous êtes donc du comité monsieur, vous êtes un des anges, vous avez vu l’œuvre des six jours . Je ne m'en suis pas repenti . Je ne veux pas le noyer, comme on le dit d'un grand auteur 1. Mais je veux le corriger sans me mettre en colère contre lui .

Je vous dirai d'abord ce que j'ai déjà dit au comité, que votre idée de Clairon-Olympie vous a trompés . Ce rôle n’est point du tout dans son caractère . Olympie est une fille de quinze ans, simple, tendre , effrayée, qui prend à la fin un parti affreux parce que son ingénuité a causé la mort de sa mère, et qui n'élève la voix qu'au dernier vers quand elle se jette dans le bûcher . Ce n'est pourtant point Zaïre ; et il serait insipide de la faire parler d'amour avant le moment de son mariage, qui est un coup de théâtre très neuf, dont tous ces froids préliminaires feraient perdre le mérite . Ce n'est point Chimène car elle révolterait au lieu d'attendrir , si elle avouait d'abord sa passion pour l'empoisonneur de son père, et pour l'assassin de sa mère . Chimène peut avec bienséance aimer encore celui qui vient de se battre honorablement contre son brutal de père, mais si Olympie en voulant ridiculement imiter Chimène, disait qu'elle veut adorer et poursuivre un empoisonneur et un assassin, on lui jetterait des pierres .

Il est beau, il est neuf qu'Olympie n'ait de confidente que sa mère . Elle doit attendrir quand elle avoue enfin 2 à cette mère qu'elle aime à la vérité celui qu'elle regarde comme son mari, mais qu'elle renonce à lui . On doit la plaindre . Mais on plaint encore plus Statira et c'est cette Statira qui est le grand rôle .

Vieillissez Mlle Clairon , rajeunissez Mlle Gaussin, et la pièce sera bien jouée . D'ailleurs que de choses à changer, à fortifier, à embellir ! Donnez-moi du temps, sept ou huit jours par exemple .

Je suis absolument de l'avis des anges sur un morceau de Cassandre . Je crois comme eux qu'il priait trop son rival, après avoir tant prié les dieux . C'est trop prier, et quand on s'abaisse à implorer le même homme qu'on a voulu tuer le moment d'auparavant , il faut un excès d’agrément et de douleur qui excuse cette disparate, et qui en fasse même une beauté . Ce n'est pas assez de dire tu vois combien je suis égaré , il ne faut pas le dire, et l'être .

J'envoie une petite esquisse de ce que Cassandre pourrait dire en cette occasion . L'objet le plus essentiel est qu'un empoisonneur et un assassin puisse intéresser en sa faveur . Si on réussit dans cette entreprise délicate tout est sauvé . Les autres rôles vont d'eux-mêmes .

Mais encore une fois ne nous trompons point sur Olympie . Vouloir fortifier ce rôle c'est le gâter . Le mérite de ce rôle consiste dans la réticence . Elle ne doit dire son secret qu'au dernier vers . Si vous changez quelque chose à cet édifice vous le détruisez . C'est dans cet esprit que j'ai fait la pièce et que je peux la refaire dans un autre .

Pardon monsieur de tant de paroles oiseuses . Mme Denis vous écrira moins et mieux .

V. »

1 Allusion à Dieu, dans la Genèse, VI, 7 .

2 enfin est ajouté au dessus de la ligne .