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03/05/2024

affermir ses oreilles contre toutes les sottises qu'on dit

... et ses yeux contre tout ce qui parait sur nos écrans déformants et insultants .

La peste soit de ces milliards de messages inutiles et malsains, de création humaine, ou de l'IA qui n'a d'intelligence que le nom .                     

 

 

« A Joseph-Jérôme Le François de La Lande , de

l'Académie des sciences de Paris, etc.

à Bourg-en-Bresse

A Ferney 19è octobre 1768 1

Vous pardonnerez, mon cher philosophe, à un pauvre malade sa négligence à vous répondre, car un vrai philosophe est compatissant. Ce pauvre Ferney a été un hôpital. Si Mme de Marron 2 l’honore de sa présence, elle sera comme Philoctète, qui vint à Thèbes en temps de peste. Il est vrai que rien n’est plus étrange pour une dame que de faire trois tragédies en quatre mois, et de composer la quatrième. Il est très difficile d’en faire une bonne en un an. Phèdre coûta deux années à Racine. Mais quand il y aurait des défauts dans les ouvrages précipités de Mme de Marron, cette précipitation et cette facilité seraient encore un prodige. J’irais l’admirer chez elle, si je pouvais sortir ; mais si elle veut que je voie ses pièces, il faudra bien qu’elle vienne à Ferney. Vous savez bien que les déesses prenaient la peine autrefois de descendre sur leurs autels pour y recevoir l’encens de leurs adorateurs. Elle me verra malade, mais je suis le malade le plus sensible au mérite et aux beaux vers.

Je ne sais si vous êtes actuellement occupé avec les astres . Pour moi, je suis fort mécontent de la Terre  . Nous ne pouvons semer . On n’aura point de récolte l’année prochaine, si Dieu n’y met la main.

Je crois à présent M. le marquis de Jaucourt à Paris . Il a été aux eaux à Aix pour affermir ses oreilles contre toutes les sottises qu'on dit dans la bonne ville .

Permettez-moi de vous embrasser sans cérémonie . Les plates formules des gens du monde ne sont pas faites pour les gens qui pensent.

V. »

1 Original, cachet « Genève » ; l'édition Kehl omet les deux derniers paragraphes et bien entendu l'adresse.

2 Marie-Anne Carrelet de Marron, baronne de Meillonnaz, publia une tragédie « La Comtesse de Fayel », 1770 ( https://books.google.fr/books?id=QTiWORucXhcC&printsec=frontcover&hl=fr&source=gbs_ge_summary_r&cad=0#v=onepage&q&f=false). Elle en écrivit d'autres dont on ne connaît que les titres ; voir C. Brenner, n° 8871-8873.

Voir : http://litterature01.chez-alice.fr/Madame-Meillonnas2/Meillonnas.html

et : https://www.pop.culture.gouv.fr/notice/palissy/PM01000819

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