28/02/2019
que de faussaires en tout lieu et en tout temps !
... Et rien n'a changé dans ce constat au XXIè siècle mon cher Voltaire , si ce n'est le nombre de faussaires qui grimpe exponentiellement .
« A Paul-Claude Moultou Ministre
à Genève
[vers le 15 février 1764] 1
Je profite, mon cher et aimable philosophe d'un moment d'intervalle que ma fluxion me laisse pour vous dire que je souhaite que ce soit un ministre d’État qui soit l'auteur de ce livre plus que je ne crois . M. de Maurepas en serait seul capable : mais je doute qu'il se mette en frais pour des intérêts qui lui sont si étrangers . La Tolérance est plus courue que connue ; elle est à Versailles sous la clef . On la mettra en liberté quand la fermentation parlementaire sera un peu calmée . Il est bien triste de n'avoir délivré qu'un galérien tandis qu'il y en a vingt-trois aux fers pour avoir prié Dieu mal à propos .
Il y a certainement un peu de mésintelligence entre la cour romaine et la nôtre . Plusieurs évêques étaient prêts de prendre le parti de Rome ; et voilà précisément pourquoi on a enfermé cette Tolérance ou plutôt cette indifférence afin de ne donner aucun prétexte de crier, et de dire qu'on en veut à la fois aux jésuites , aux papes et aux mystères 2.
Vous me feriez grand plaisir mon cher philosophe de m'envoyer la nouvelle preuve de la fausseté de ce beau monument chinois dont Navarette s'est tant moqué 3.
Comment le sage Abausit peut-il croire à ces animaux venus de Tacin 4 conduits par des nuées bleues ? que de faussaires en tout lieu et en tout temps ! Je vous embrasse, je vous respecte autant que je vous aime .
V. »
1 Les allusions au Traité de Versailles, à la garde sous clé du Traité sur la Tolérance, etc. , suggèrent que cette lettre est celle à laquelle Moultou répondit le 29 février et dont la réponse par V* est du 2 mars , d'où la date ici proposée .
2 La fin du paragraphe, depuis et de dire […] , biffée par l'éditeur sur le manuscrit, manque dans les éditions .
3 Voir la Réponse à l'Apologie des jésuites de la Chine par le père Diego Moralez , de Domingo Fernandez Navarrete, dans la Lettre d'une personne de piété sur un écrit des jésuites, 1701 .Voir : http://124.33.215.236/morisoncategory/show_detail_open_morison.php
4 Ce mot est laissé en blanc par le premier éditeur, avec la note : « Un mot indéchiffrable, de quatre ou cinq lettres . Ne serait-ce pas du ciel ? » En fait , cette lecture est impossible . Celle qui est proposée s'appuie sur l'Essai sur les mœurs, II, et les Lettres chinoises , IV ; voir page 19 : http://www.mediterranee-antique.fr/Fichiers_PdF/TUV/Voltaire/Moeurs.pdf
et : pages-22-23 : https://fr.calameo.com/read/00021549850a4ab9f2901
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